L'affrontement (Le Sceau tome 3)

Chapitre 2

Le cœur d'Astoria rata un battement. Durant tout ce temps, elle avait espéré que le message n'arrive jamais. Les yeux perdus dans le vide, sa fourchette faillit lui échapper de la main. Elle se ressaisit rapidement, resserrant ses doigts sur son couvert, et reprit la dégustation de son repas, comme si de rien n'était. Ce n'était pas le moment de perturber le semblant de calme qui régnait dans la pièce. Il avait été décidé d'offrir une pause à la meute, pas de les affoler encore plus.

Malheureusement, son manège n'avait pas échappé à Zion qui tentait de garder contenance. Son teint avait brusquement perdu un ton et sa main se contractait nerveusement sur sa serviette en papier qui ne ressemblait plus à grand-chose. Pendant presque qu'une minute, il chercha le regard de la tigresse pour savoir si c'était bien ce qu'il pensait, mais elle l'évitait soigneusement. Le stress fit place à de l'agacement.

« Tori, je sais qu'il s'est passé quelque chose. C'était mon téléphone ? »

Astoria maudit intérieurement ce foutu lien du sang qui l'empêchait de cacher quoi que ce soit à son compagnon. Elle n'arrivait absolument pas à lui cacher ses émotions contrairement à lui qui arrivait à fermer son esprit complètement. Il n'y avait que ses pensées qu'elle pouvait protéger parfaitement, son cœur, lui, la trahissait en permanence. Réunissant tout son courage, elle vissa ses yeux dans les siens, déterminée à ne rien lui dire. C'était une erreur, les pupilles du lion, dilatées par le stress, la suppliaient de répondre. Sa ressemblance avec Raco la frappa. Comment pouvait-elle rester de marbre ? Ce n'était pas humain.

« Et merde, dans quoi je me suis foutue ? »

Elle n'avait plus le choix, sa faiblesse avait repris le dessus.

« C'est bien ton téléphone... mais ça peut venir de quelqu'un d'autre que les Redhead », répondit-elle télépathiquement, espérant sincèrement que c'était le cas.

La moue dubitative de Zion lui fit bien comprendre que c'était peu probable, qu'il n'y croyait pas une seconde.

« C'est un téléphone qui ne sert que pour les histoires de métamorphes, ce n'est pas un numéro que je donne à mes amis ou à des partenaires économiques ».

En effet, il y avait peu de doute sur la personne à l'origine du fameux message, mais l'optimisme de Tori ne se laissait pas dompter si facilement. Elle avait toujours un petit espoir que toute cette histoire se terminerait bien, ou du moins pas trop mal. Les Redhead n'avaient rien contre Angie normalement, ils ne pouvaient donc rien contre elle. C'était bien trop risqué pour eux.

« Encore des gens qui aboient plus fort qu'ils ne mordent... » pensa-t-elle, agacée.

Le repas s'éternisait et Zion perdait de plus en plus patience. Il fallait trouver un moyen de sortir d'ici, et de mettre fin au suspense insoutenable. C'était plus compliqué que prévu parce que tout le monde allait et venait entre les tables pour discuter, profitant du semblant de calme. Partir trop tôt, alors que personne ne quittait la pièce, pourrait inquiéter certains et la trêve serait brisée. Astoria avait bien conscience que la dernière chose dont ils avaient besoin était que les esprits s'échauffent et que la meute décide sur un coup de tête de partir chercher des noises aux voisins un peu trop turbulents, sans aucune préparation. C'était courir droit à l'échec. Le lion le savait aussi, et prenait sur lui pour que tout se passe pour le mieux.

La seule personne qui ne semblait étonnamment pas le moins du monde atteinte par la situation était Raco. Il était aux anges et rien ne semblait pouvoir lui retirer le sourire qu'il avait aux lèvres depuis le début de la matinée. C'était son premier Noël avec des décorations, des cadeaux, un repas spécial et le droit de courir dans tous les sens avec des enfants de son âge. Autrement dit, il était au septième ciel. Il se comportait enfin comme un enfant de douze ans, sans ce regard grave qui lui était propre.