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Les deux semaines approchent grandement, et je n'ai jamais autant pris plaisir à travailler. Les femmes de Umoja ont tellement de choses à nous apprendre, leur force, leur courage et leur volonté de réussir.

Chaque soir, chacune d'entre elles nous racontent son histoire, toutes plus difficiles que les autres, et elles réussissent presque tout le temps à me mettre la larme à l'oeil.

Dû au rejet que Ethan a subi au tout début, il m'informe qu'il comprend à peu près maintenant ce que je ressens à Nice.

– Je ne savais pas que c'était aussi compliqué pour toi, Elena.

J'arrête de tapoter sur mon clavier et tourne ma tête vers lui, avec un air interrogateur.

– Tu dois te sentir très mal, surtout avec des personnes comme Mark.
– Je n'ai pas besoin de ta pitié, Ethan.
– Arrête un peu, ce n'est pas de la pitié, mais de la compréhension. Ça fait même pas deux semaines que nous sommes ici, et je me sens tellement oppressé quand certaines femmes me rabaissent car je suis un homme.

Je m'apprête à contester, qu'elles sont seulement sur la défensive, mais il me coupe :

– Et encore, parce que ce n'est pas tout à fait la même chose. Ces combattantes ont un rapport difficile avec les hommes, parce que toutes les personnes de sexe masculin les ont mal traité. C'est compréhensif qu'elles sont en retrait lorsqu'elles cohabitent pour la première fois depuis longtemps avec une personne du même sexe que leur bourreau. Tandis que chez nous...

Il soupire et pose ses mains entre son ordinateur. Je tente de dire quelque chose mais je m'abstiens. 

– J'ai une sœur, m'annonce-t-il soudainement. Elle a seize ans.

Mon voisin de table ferme ses poings et prend une grande inspiration.

– Je te garantis que si un jour, il lui arrive une seule chose de ce que ces Kenyanes ont enduré, je détruirai le monde.

Sa poitrine se fige comme la mienne.

– Les hommes banalisent tellement de choses, le viol, la violence conjugal ou même psychologique !

La peine qui coule dans mes veines parcourt, à présent, aussi les siennes.

– J'ai toujours dénoncé ce genre de comportements, j'ai toujours été ahuri des personnes qui faisaient subir cela, mais encore plus maintenant.

Je reste toujours dans le silence et l'écoute attentivement.

– Bizarrement, je n'éprouve même pas de colère envers le fait qu'elles me dévalorisaient. J'étais plutôt content de devoir subir ça, à la place d'une autre femme dans le monde. C'est peut-être con ce que je dis et inutile, mais je veux pouvoir empêcher ça.

Il lève la tête vers moi et plante son regard dans le mien.

– Je veux pouvoir empêcher ce qu'ils te font subir au travail, Elena. Et j'ai l'impression que tu trouves cela normal. Les remarques que les hommes font chaque fois que tu passes à côté d'eux comme si tu étais une bête de foire ou le fait qu'ils te prennent juste pour une belle "chose" à voir. Ou encore le fait qu'ils sont sûrs que tu remportes tous tes prix seulement parce que tu as de beaux yeux verts.

Irrité, il se replace sur sa chaise et ébouriffe ses cheveux.

– La vérité Elena, c'est que si tu es ici, c'est parce que tu l'as mérité, parce que tu t'es battue, pas pour les raisons pour lesquelles nos putains de collèges t'ont dit. Garde-toi ça en tête. Et même si on a toujours été en compétition tous les deux, je l'ai toujours pensé.

Derniers BattementsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant