Funeste phototype

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Je crois que toutes mes expériences ont contribué à m'offrir la chance de connaître cet amour. Mais ce sont les conséquences de ces expériences qui m'ont conduites à le perdre. Après tout, quand ton premier amour abuse de toi et le suivant te frappe, je pense qu'il devient impossible de croire que quelqu'un puisse un jour nous aimer. Pire encore, on s'attache au premier qui nous promet monts et merveilles.


Quand on est jeune, on est si crédule. Comment ne pas croire au grand amour ? La littérature, le cinéma et l'industrie musicale nous vendent ces belles histoires où malgré les obstacles les protagonistes traversent vents et marées ensemble et finissent heureux pour toujours. C'est un beau tableau n'est-ce pas ? Je trouve que c'est un tableau auquel il faut croire malgré tout les déboires que la vie nous a fait subir. Et Dieu sait que j'ai connu bien des calamités.

Quand votre premier amour est le garçon avec qui vous avez grandi toute votre enfance, comment ne pas croire sincèrement que votre histoire n'est pas un conte de fées ? Tout semble parfait. Mais la désillusion est rude lorsque la vérité éclate au grand jour et que le masque tombe. Quand on découvre le monstre qu'est la personne qu'on aime alors le plus au monde, comment ne pas sombrer ? Comment croire encore au grand amour ?

J'ai découvert l'amour par deux funestes phototypes qui m'ont fait connaître le pire. Je n'ai connu le meilleur qu'après toutes ces souffrances. Mais c'est à cause de ces deux êtres abjects que j'ai perdus l'amour de ma vie. Je le sais à présent.

J'ai mis fin à notre relation il y a cinq ans. Et pas un jour ne passe sans que je vive avec ce regret. J'ai perdu la seule personne qui n'a jamais voulu que mon bonheur. En cinq ans, j'ai eu le temps d'avoir deux relations qui se sont soldées par des échecs cuisants. Comment vivre auprès d'un autre quant au fond de soi, on sait pertinemment que jamais on ne revivra ce sentiment d'extase auprès de l'être aimé ? On ne peut pas, mais on essaye. C'est cruel pour les suivants qui passent après cette relation parfaite et je m'en veux d'avoir été aussi brisé et aussi peu réceptive. La culpabilité me ronge d'avoir fait souffrir ces messieurs contre mon gré. Alors voilà comment mes premiers amours ont détruit ma seule chance de vivre avec l'homme de ma vie.

Je suis tombée amoureuse d'un garçon avec qui j'avais grandi durant mon enfance. Le début d'une belle histoire d'amour direz-vous. Que neni. C'est le début de mon cauchemar. L'amour rend aveugle et le dicton n'existe pas pour rien, car j'ai été la plus aveugle des femmes. J'ai cru à cette histoire, j'ai cru au grand amour. Ce fût là ma plus grande erreur. J'ai accordé ma confiance à tort. J'ai aimé cet homme plus que je m'aimais moi-même. Je suis comme ça et malgré tout ce que j'ai vécu, je ne changerai ça pour rien au monde. Et après avoir tout donné, il m'a tout pris. Il a arraché à mon être ma pureté. Il m'a pris mon innocence et ma joie de vivre. Je suis devenue un être insipide, renfermé, méfiant. Une personne blessée dans son corps et dans son âme. Le dégoût de soi et la culpabilité m'ont fait envisager le pire. Paradoxalement, c'est à ce moment-là que j'ai trouvé refuge dans la lecture, que je me suis enfouie sous une montagne d'histoire à l'eau de rose. Et cette bouée que fut la littérature a fait naître en moi un espoir. L'espoir que je méritais de vivre moi aussi un amour aussi beau et aussi pur. Mais ce que les livres ne raconte pas, c'est l'après. Ils s'arrêtent toujours aux premiers mois, aux premières années de la relation en ignorant les trahisons, les déceptions et les obstacles du couple. Aveuglée par cet espoir, j'ai tenté de me remettre de cet événement. J'ai essayé de pardonner, de lui trouver des excuses jusqu'à ce matin où mon téléphone afficha son message. Du jour au lendemain, tout s'écroulait sans que je n'aie aucune explication. À ce moment, ce n'est plus la littérature qui m'a sauvé, mais les études. Me plonger dans mon travail, dans mes révisions et m'y donner corps et âme me permirent de survivre. Mais on ne survit pas longtemps.

Comme je le disais, les déceptions font naître l'espoir du sauveur, de cet homme qui arriverait dans notre vie sans qu'on ne s'en rende compte et qui guérira cette blessure en nous. J'y ai cru. Comme j'étais sotte et naïve. Rapidement le rouge du rougissement à laisser place au bleu du ciel. Un bleu changeant qui mutait jour après jour. Je suis devenue une experte en camouflage. Rien ne m'a paru aussi simple que de cacher la vérité de mon couple aux yeux du monde entier. Avec le recul, je n'ai jamais aimé cet homme, j'aimais l'idée qu'il puisse m'accorder de l'attention et me dire à quel point je valais la peine après avoir vécu ce que j'avais vécu. Mais quelle grossière erreur j'ai faite en lui confiant mon secret. Il a su ma faiblesse et en a profité pour transformer ma joie en tristesse profonde. J'ai mis le masque de la socialisation en disant "tout vas bien" alors que sur mon corps, se dessinait un SOS. J'en étais arrivé à un point où je changeais toutes mes perspectives d'avenir simplement pour lui. Il a créé une dépendance et il savait ce qu'il faisait. Il a profité de ma faiblesse et s'est engouffré dans la faille en sachant pertinemment qu'il en ferait usage.

Mais un jour, le vase avait atteint sa limite. Et avant qu'il ne se brise, j'ai pris la décision de fuir. De tenter de remonter cette pente montagneuse sous une pluie torrentielle. Les avalanches et les chutes de gravats n'aidaient en rien. Seule face à l'adversité pendant une année, la montagne m'a paru insurmontables. Je ne voulais plus me battre, et quand bien même mon corps le pouvait, mon esprit était résigné. Mais je suis une combattante, j'étais encore assez fière pour ne pas les laisser gagner. Alors à plat ventre, rampant pour ma survie, j'ai continué centimètres après centimètres. J'ai usé ma santé par mon silence. Nombreux sont ceux qui ont osé émettre un jugement sur mon état, me reprochant d'être trop fière pour ne pas avoir demandé de l'aide. Mais ce n'était pas de la fierté, c'était de la honte. Une honte qui me rongeait de l'intérieur et qui s'accompagnait d'une culpabilité immense. Comment j'avais pu laisser la situation m'échapper à ce point. À quel moment j'avais admis que laisser un homme me dégrader de la sorte était normal ? Pourquoi je ne m'étais pas défendue ? Le comble était que je ne leur en voulais pas, mais je me reprochais tous ces déboires. Tout ne pouvait être que de ma faute parce que j'étais faible physiquement et mentalement. Avoir réussi à m'en sortir seule ne faisait pas de moi quelqu'un de faible. Mais le chemin vers la guérison était loin. Trop lointain. Dans un monde où la patience disparaît, où les générations veulent tout dans l'instantanéité, le chemin tortueux de la guérison me révulsait.

Et puis un jour, j'ai réussi à atteindre le sommet, non sans séquelles. Je voyais enfin le soleil derrière les nuages. Mais la vie est une montagne faite d'un millier de pics qui doivent être gravis et le suivant m'attendait déjà. Découragée, épuisée et sans force vitale, j'ai tenté de le gravir seule jusqu'à ce que je la rencontre. Cette bonne étoile qui deviendra ma meilleure amie et sans qui je ne m'en serais pas sorti. Elle m'a ouvert son cœur et a partagé ses blessures pour me montrer que je n'étais pas seule et ensemble nous avons gravit la montagne main dans la main jusqu'au jour où elle a rencontré ce jeune homme. Jusqu'au jour où j'ai rencontré l'ami de ce jeune homme.

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 09 ⏰

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Chroniques de l'amante de l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant