Passé

Le réveil est rude, mes membres sont courbaturés, frigorifiés et extrêmement douloureux; d'avoir dormi dans une couchette de fortune rigide et de ne pas avoir été soigné la veille.
J'ai passé la nuit au poste, détenu dans une cellule, ou j'ai déjà passé la plupart de mes temps libres ici, pour ainsi dire, depuis que je suis en âge d'y aller.

C'est l'agente Whitehead qui me sort de mon sommeil, cette dernière travaille dans le coin depuis que j'ai foulé le sol de cet endroit, et à force, de mes nombreuses visites, elle a appris à me connaître.
C'est une bonne femme, préférant garder son statut de célibataire et de s'occuper de sa fille donc elle est folle.

Après m'être fait choper par ses collègues – pour détention de stupéfiants – ils me laissent la plupart du temps filer, ou me sermonnent encore une fois de plus avec leurs leçons de morales aussi ridicule qu'une tape sur la main pour un gosse.

Elle connait mon oncle, mon seul et unique représentant légale encore en vie à ce jour, et, elle a sûrement pitié du nombre de fois qu'il doit venir me chercher par la peau du cou face à mes conneries d'ado ingérable.

Cette fois-ci, mon oncle m'a laissé poireauter ici, seul.
Pense-t-il seulement que cela va me remettre les pendules à l'heure et faire de moi un adolescent réfléchi et mature ? Non.
Du haut de mes 20 ans, je suis sans doute le pire irresponsable qu'un ado de 14.

Il m'attend, la mine sérieuse figée sur son visage avant qu'un salarié lui demande de signer les papiers pour que je puisse enfin sortir d'ici.
Ce qui est étrange, c'est qu'il reste un moment silencieux, et cela n'augure rien de bon, j'aurai pu être soulagé de cette nouvelle, mais c'est le contraire. j'ai l'impression d'avoir un étau qui se serre dans mon estomac.
En parcourant la distance jusqu'à sa Ford rouge, il ne me pose aucune question, et s'installe dans un silence de plomb dans l'habitacle, je limite, et l'observe actionner l'embrayage et de passer la vitesse dans un geste nonchalant les yeux rivés devant lui.
Il est épuisé, saoulé, et bien sûr écoeuré de mes actions.

Je ne peux que le comprendre, je le suis aussi, je ne suis qu'un minable.

Lorsqu'on arrive enfin l'immeuble décrépit, je me retiens de vouloir sauté en dehors du véhicule, c'est plus fort que moi, le silence m'oppresse, j'ai la sensation d'étouffer, je n'arrive pas à m'y faire, et malgré ça, j'affronte mon oncle dans un espace si étroit, les fenêtres ne sont même pas ouvert et j'ai la désagréable sensation qu'il en joue, il sait.

Il soupire lentement. Je me tend. Pas vraiment encore prêt à recevoir un sermon de sa part, même si cela est devenu une habitude.

– C'est la dernière fois que je viens te chercher en garde-à-vue, déclare-t-il lasse. La prochaine fois, ce sera quelqu'un d'autre, quelqu'un qui voudra bien te sauver le c*l.

Je me mords furieusement la joue pour ne pas rappliquer. Je me garde de lui dire que je n'ai pas de " quelqu'un d'autre" il le sait.  Lorsque j'ai perdu ma famille, il a lui aussi porté le deuil en plus du foutu gamin que j'étais et que je suis toujours.

Je fronce les sourcils, me creuse la tête  à la recherche d'un nom, d'une tête, mais impossible, j'ai personne.

– Qui ? Finis-je par demander.

Davis détourne le regard, je déteste déjà ce qu'il va en sortir de sa bouche.

– L'homme que je vais te faire rencontrer ce soir. Au club. Précise-t-il en plongeant ses iris grises dans les miennes.

À peine sa phrase terminée, j'attrape mon sac à la volée et sors sans plus attendre de la voiture.

Davis ouvre aussi sa portière mais déjà j'instaure une distance entre lui et moi.

– C'est hors de question ! Je t'ai combien de fois dit non !

– Joël ! Écoute-moi !

– Putain ! Non ! Appuyais-je en me dégageant de son emprise.

Je cours jusqu'à la porte et tente de la pousser, mais encore une fois, le karma m'attrape, celle-ci est verrouillée.
La colère me monte vite à la tête, je serre les poings pour calmer mes tremblements.

– Putain Davis !

Comprenant que je sors de mes gonds, celui-ci se trouve à une distance raisonnable, je ferme les yeux et inspire une longue inspiration, même si je le déteste pour ça, je ne peux pas m'énerver contre lui.
Davis est le gérant d'un club libertin ouvertement SM.  Dès que j'ai eu l'âge de comprendre, il m'a confié la nature de son travail, si bien que Je n'ai jamais trouvé cela étrange.

Jusque-là, il m'a toujours éloigné de son propre monde – de ses pratiques.
Mais ces derniers temps, il a plus ou moins laissé sous-entendre que je pourrais y trouver des réponses à certaines de mes questions.

– Joël, j'ai bien compris que tu n'en as  rien à foutre de mon aide, et je le respecte.

Je rouvre les yeux, et le juge fort, j'aurais même rigolé sur le coup de la nervosité, mais c'est bien une première qu'il me dit ce genre de chose – et ça me déstabilise plus que je ne souhaite l'admettre.

– Mais tu as vraiment besoin d'aide Joël. Continue-t-il. Et ça, tu ne peux pas me dire le contraire, bordel regarde ta putain de tronche ! Sérieusement regarde toi !

Je grimace face à sa tentative réussi, je n'ai pas besoin de me voir dans un miroir pour constaté moi-même les dégâts pour comprendre ce qu'il veux me dire : j'ai l'arcade sourcilière éclatée, la lèvre fendue, et en prime, un énorme hématome s'étale sur le côté droit de ma machoire.

Pour compléter le tableau, s'ajoutent mes habituelles cernes bleutées, mes tatouages très visibles et mes boucles en pétard. J'ai tout l'air d'un délinquant, le genre dont on ne souhaiterait pas croiser la route.

– J'ai toujours respecté tes pratiques, mais je ne crois pas une seule seconde que baiser les pieds comme un fétichiste, et d'être bâillonné comme un saucisson par un individu en cuir va m'aider à payer mes factures.

                              ✨✨✨

Salut !

J'espère que vous avez apprécié ce chapitre 🤞
Avant de le publier j'avais " the weekend" dans les oreilles, et qui plus est, cette chanson 🤭

Oui oui ! Rien à voir avec le chapitre en question sorry not sorry

ORGARSMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant