Prologue (New)

5 0 0
                                    

C'était la pleine lune et nous venions de terminer notre rituel. Comme à chaque pleine lune, nous remercions la nature de son abondance et de sa générosité. La magie paraissait plus puissante à chaque pleine lune, mais celle-ci, je ne pensais jamais connaître une nuit aussi funeste. La douleur, les cris, le sang et l'horreur. Il y avait quelques instants, nous festoyons autour d'un brasier, partageant un repas et des histoires fantastiques sur nos ancêtres ou sur des temps jadis, oubliés pour la plupart, tout cela avait été bousculé, anéanti par des cris de souffrance et des ordres pour que nous puissions nous mettre à l'abri.

Mon père m'avait ordonné de rentrer en vitesse, me cacher à l'endroit indiqué si par malheur une catastrophe similaire se produisait. Dans l'armoire familiale, je tentais de percevoir ce qu'il se produisait dehors, mais il n'y avait que des hurlements de terreur et féroce qui se mélangeaient en une symphonie funeste. J'en tremblais de tout mon corps. Nous étions une communauté, habitant dans un lieu reculé afin de contrarier aucuns seigneurs, ni même l'Impératrice au pouvoir. Nous nous faisions discrets, vivant en parfaite harmonie avec la nature.

Soudain, la porte s'ouvrit dans un fracas, me paralysant. Mon souffle, bloqué dans la gorge, me brûlait, mais je restais immobile, ne cherchant plus à savoir qui venait de pénétrer dans la maison. Un souffle haché me parvint ainsi que le crépitement d'une torche. Dans un reniflement, l'inconnu retourna table et potions en pleine préparation, et dans un sifflement de rage, quitta la pièce sans chercher plus avant. Soulagée, je respirai à nouveau mais un craquement m'interpella. Jetant un regard à travers l'ouverture, l'effroi me prit aux tripes alors qu'un incendie dévorait le bois de la charpente. Je m'extirpai de ma cachette, toussant à cause de la fumée aigre qui pénétrait dans les poumons. Me protégeant le visage, je cherchais à tâtons la trappe menant au sous-sol, en bas, un tunnel menait vers l'orée du bois, vers la sécurité.

Malheureusement, un craquement effroyable me fit lever la tête et une poutre me tomba dessus dans une gerbe de feu hypnotique. La douleur ne vint pas de suite, mais je sentis le sang coulait le long de mon visage alors que je parvins à accéder avec difficulté au sous-sol. Le souffle erratique, j'empruntai le tunnel dans un état second, la tête me tournant tel un arceau de feu qu'aimait tant utiliser ma mère lors de fêtes communes.

Enfin, l'air frais emplit mes poumons et le silence de la forêt me réconforta, malgré les cris lointains que je percevais. Je restai un petit moment au sol, reprenant mon souffle et grimaçant de douleur. Levant une main tremblante, je tâtai légèrement ma blessure mais une vive souffrance parcourut mon corps alors je retirai la rapidement. Me relevant derrière les bosquets, j'aperçus avec effroi notre village en feu. Les habitants tentaient de fuir vers la forêt environnante, mais des flèches pleuvaient dans leurs directions, parfois des lances frappaient en traite dans le dos des fuyards.

Un contingent de soldats en habits noir courait après les villageois, les tuant de sang froid, brûlant les maisons et les corps déjà tombé à terre. La peur me tenaillait le ventre alors que j'assistais impuissante à ce massacre. Pourquoi nous ? Pourquoi ce soir ?

Soudain, un homme sortit d'un pas lent du village en flamme, levant un bras assuré vers les derniers survivants tentant de rallier les sous-bois. Je m'approchai, méfiante, tout en gardant les yeux sur cet homme imposant. Il arborait une tunique noir, une capuche lui couvrant le visage. Ses mains gantées ne présentaient aucuns objets me permettant de découvrir qui il était. Une longue épée pendait à son côté et aucune armure ne le protégeait, car je reconnus le sort envoyé par mon père vers lui. Mes yeux s'agrandirent alors que je reconnaissais mes parents au milieu des derniers villageois. Ils se tenaient côte à côte, lançant sort de protection et d'attaque afin de ralentir l'avancée des hommes armés. Je commençai à courir afin de les rejoindre mais je m'arrêtai d'un coup alors que l'imposant soldat prenait de force une lance à l'un de ses sbires et la lança avec une force surhumaine, détruisant la barrière magique de ma mère.

Je retins un cri alors que l'arme transperçait mon père. Ma mère hurla vers les survivants qui redoublèrent d'effort pour se mettre à l'abri, mais une pluie de flèche s'abattit sur le dernier groupe, les tuant tous dans un hurlement déchirant. Mes genoux me lâchèrent et des larmes me montèrent aux yeux alors que j'observai l'homme s'approcher de mes parents.

Ma mère ne se rendit pas, maudissant l'homme de paroles aussi mauvaises et empoisonnées que les plantes vénéneuses que nous utilisions lors de préparations de potions. D'un revers de main, il la fit tomber au sol, laissant une marque impressionnante sur sa joue. Mon père tenta un ultime sort, mais le gaillard l'envoya, d'un coup de pied, dans ma direction.

Mon esprit me dictait de le rejoindre mais mon corps refusait de l'écouter, j'étais obnubilée par le sort que réservait l'imposant soldat à ma mère. Il la tenait fermement par ses cheveux et lui parlait d'une voix sourde et à peine audible. Je ne compris pas ses paroles, mais celles de mon père s'insinuèrent en moi.

"Cours Hazel... Ne cherche pas à nous venger, cela n'en vaut pas la peine..."

Il toussa du sang mais parvint à fixer son regard dans le mien.

"Et surtout, vis... Ne te retourne pas... Ne te retourne jamais..."

Un cri déchirant me donna la chair de poule mais je ne pus me résoudre à relever les yeux vers ma mère car je savais qu'elle venait de mourir dans la souffrance. Mon père serra les dents mais me sourit une dernière fois.

"Je t'aime ma fille... Maintenant va-t'en !"

Je commençai à me retourner lorsque j'aperçus le masque qui recouvrait le visage de l'imposant soldat. Un masque noir sans aucun reflet miroitant dessus. Il était lisse, sans aucune ouverture pour voir ou respirer. Un frisson me glaça le sang alors que j'entamai une transformation en une souris et je pris les jambes à mon cou.

La forêt saurait me protéger mais pas du dernier cri de mon père, voulant me faire gagner du temps. Je ne savais pas qui étaient ces hommes et pourquoi ils nous avaient massacrés cette nuit, mais je suivrais les dernières volontés de mon père et je ne me retournerais jamais. Je devais oublier cette nuit et mettre le plus de distance possible entre mon village que je chérissais tant et une nouvelle vie qui m'attendait quelque part, loin de toute cette violence. Mais derrière moi, s'accrochait déjà cette nuit d'effroi, c'était une nuit de pleine lune et nous venions d'achever un rituel...

HazelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant