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La succulente odeur de café m'extirpa tant bien que mal de mon sommeil. Maud et ma mère Paula bavardaient devant la porte de la chambre. J'étais surement le sujet de leur conversation, puisqu'elles jetaient des coups d'œil furtive à travers le petit hublot de la porte. Pâteuse, je m'agenouillai sur le lit en attrapant le gobelet où séjournait le délicieux breuvage. J'eu soudain envie de pleurer, cette boisson venait de l'Escapade, le bistrot ou tous les élèves de la classe de terminale S se retrouvait après les cours, c'était anciennement notre QG. Lexie et moi étions les seules à continuer d'aller dans cet endroit sentant bon l'arabica. Je retins une larme alors que la petite rousse qui parlait avec ma génitrice fit irruption dans cette pièce à l'atmosphère si triste. 


Durant de longues minutes, elle me serra fort contre elle, puis se détachant avec douceur, me demanda. « _ Je suis vraiment désolée pour Lex, comment tu te sens ? Non, c'est vrai, tu n'es pas obligé de répondre à ça. Dis moi les policiers m'ont interrogés, tu te rends compte la voiture a été volée.

_ Je n'arrive pas à croire qu'elle n'est plus la. Je me fiche de savoir que cette voiture a été volée, j'aimerais juste oublier ces derniers jours. » Les larmes me montant aux yeux, je me levai et me posai à côté de la fenêtre. Au fond de moi, je n'avais qu'une envie, me retrouver seule afin d'essayer de panser les blessures ouvertes de mon cœur. Malgré tout, je n'eu pas le courage de renvoyer mon amie et ma mère chez elle. Je pris mon courage à deux mains et attendis la fin de cette longue journée. 


L'heure des visites terminée, l'infirmière me déposa le plateau-repas auquel je ne portai aucune attention. Ce n'est qu'à cet instant que je m'accordai le droit d'être triste, et même de pleurer. Les yeux rouges et gonflés, je ne répondis pas aux questions du médecin qui semblait s'inquiéter de retrouver mon diner intact et froid dans le plateau. Honteuse, je relevai la tête et posai mes yeux douloureux dans les siens. Tout en bégayant, je m'excusai de ma réaction, je n'avais rien contre cet homme, c'est juste que j'étais fatiguée, que je n'avais pas faim et que je n'avais envie de rien pour le moment. Insistant, le jeune médecin sortit et ramena un croissant au chocolat tout chaud dans la chambre. M'excusant encore et encore je refusai la pâtisserie en ayant les yeux qui se remplissait d'eau. Gênée, je regardais ailleurs, en suppliant le docteur de me laisser seul. Je m'allongeais sur le côté, et pleurai jusqu'à ce que la fatigue s'empare de moi.


De petits coups tapés à la porte me sortirent de mon sommeil, jetant un œil par la fenêtre, je vis que le soleil n'était pas encore levé, il devait être très tôt. Entamant un inventaire rapide de mes pensées, le souvenir de ma présence à l'hôpital ressurgit. La bouche sèche, j'articulais un timide entrez lorsque la porte s'ouvrit sur Romain. Ce jeune homme, plus jeune que moi était mon ex petit ami. Bien que notre relation ne soit plus d'actualité, nous avions réussi à garder une certaine complicité qui rendait sa nouvelle copine folle de jalousie. Le contact chaud de sa peau contre moi me procura un sentiment de bien être. Dans ses bras, j'avais toujours eu la sensation d'être en sécurité, qu'à cet endroit rien ne pouvait m'arriver. Malgré cette étreinte réconfortante quelque chose était étrange dans l'attitude de mon ami. Perplexe je n'osais pas poser de questions de peur des réponses qui pourraient sortir de sa bouche aux lèvres si douces. 


Me rappelant le goût de ses lèvres je passai une main sur les miennes, comme pour mieux sentir le parfum frais et délicat de mes souvenirs. Doucement, je me retournai vers lui et posa ma main tremblante sur son visage, imparfait mais si beau a mes yeux.

"_ Tu me manques, articulais-je en détachant chaque syllabe. J'ai besoin de toi.

_ Je suis là, tu sais très bien que je serais toujours là pour toi. C'est juste qu'en ce moment ça va être compliqué. Tu sais qu'Elisa ne voit pas d'un bon œil notre relation, il faut que je la ménage en ce moment. Abby, je vais être papa."

Choquée, je ne sus comment réagir à cette nouvelle, mon cœur déjà meurtri encaissait un énième traumatisme, que je n'imaginais pas pouvoir surmonter. Prenant appui sur mes jambes, je me postai devant la fenêtre, lui tournant les dos, je réussi enfin à demander si c'était une blague. Malheureusement, je savais déjà la réponse. Abasourdi, mon cerveau n'enregistra même pas la foule de phrases prononcé par Romain. Seulement quelques mots comme désolé, ce n'était pas prévu, on restera quand même proches se frayèrent un chemin dans ma petite tête bien remplie.


En colère, je lui criai de se taire lorsqu'une infirmière rentra suivie du médecin de la veille. Romain se fit enguirlander car les visites étaient interdites aussi tôt. Énervé, j'avais le sentiment d'avoir était trahie par le deuxième homme le plus proche et le plus important de ma vie. Les larmes envahissaient mon champ visuel tandis que je regardais la petite fontaine située au cœur de la cour intérieur de l'hôpital. En sursautant pour échapper à l'étreinte d'adieu de Romain, je trébuchais dans la perfusion de calmant qu'une aide soignant m'avait posé dans la nuit. Une douleur conséquente envahie mon crâne lorsque celui ci heurta le carrelage froid de la chambre. La vision trouble, j'essayais de donner une gifle à mon ex lorsque celui ci se pencha vers moi. 


Ratant ma cible, je ne réussi qu'à toucher le genou du médecin qui examinais déjà la plaie sur ma tête. Me prenant dans ses bras, le docteur me recoucha dans le lit tout en m'interdisant de bouger durant quelques minutes. Se tournant vers l'infirmière, il demanda à celle-ci de raccompagner le visiteur hors de l'établissement. Désormais seul avec ce jeune diplômé en médecine, je n'osais pas bouger une oreille. Une douleur située dans mon crâne me lançait toujours, tandis qu'une nausée venait s'ajouter au lot de mes traumatismes.

"_ Comment vous sentez vous ? Le petit déjeuner va être servi, mais je voulais vous parlez avant. J'espère que vous avez faim ce matin. Temps que j'y pense, une petite clarification, vous êtes en observation pendant 72 heures, un peu moins maintenant, je pense que vous savez que vous êtes dans le service psychiatrique pour toute la durée de votre séjour. Donc il faut que vous sachiez que les visites sont interdites dans cette phase, que ce soit la famille ou les amis. Vous comprenez ?

_Non, de toute façon la seule personne dont j'ai besoin est morte. "


Bien sur, c'était inévitable que ma tentative de suicide ne soit pas punie. J'obtempérai, tout en avouant que je n'étais moi même pas au courant que mon meilleur ami allait venir me rendre visite. Les détails techniques abordés, le médecin repartit sur le sujet qui lui tenait à cœur, mon envie de rien, et surtout mon refus d'avaler de la nourriture. Ne ressentant toujours pas la sensation de faim, je fis marcher mon cerveau à plein régime pour trouver une excuse convaincante, sans résultat. Jouant la carte de la sincérité, j'avouais à mon docteur que j'étais trop chamboulée par tous les événements qui venaient de s'écouler durant les dernières heures pour me demander si j'avais envie de manger. Juste l'odeur et le goût de café me revenait sans cesse dans la bouche. De cet aveu découla une routine, chaque matin au lever du soleil durant trois jours, le médecin m'apportait un grand gobelet de café provenant d'une boulangerie bien cotée.

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