Was it love

Prologue

Jared

Jamais je n'ai eu aussi froid.

Jamais le bruit de ses clefs contre le bois du meuble d'entrée n'a retenti si fort.

Jamais je ne me suis senti si mal.

Et jamais je n'ai eu l'impression d'avoir gâché ma vie.

Je sais que je suis égoïste, ça va avec mon personnage. Alors pourquoi je ne l'ai pas retenu ? J'ai essayé oui, mais j'aurai pu y arriver avec les bons arguments.

Je n'ai même pas pu la retenir de partir.

Tout le monde fait des erreurs. Alors pourquoi elle ne peut pas m'aimer assez pour le comprendre ?

Je suis resté debout un moment à fixer la porte par laquelle Jahra s'est échappée. J'ai attendu qu'elle réapparaisse... l'espoir fait vivre.

Elle n'est pas revenue.

Alors je me suis assis et j'ai réfléchi.

Un moment. Un court instant qui m'a semblé une éternité.

Et ce qui a éclaté ma bulle de réflexion inutile et ininterrompue a été mon téléphone.

Brad ?

J'ai décroché mais j'ai senti ma gorge se nouer au moment de prononcer un mot. La dernière personne à qui j'ai parlé était Jahra et je n'ai pas envie de faire l'effort de parler si ce n'est pas pour elle.
Alors j'ai soupiré.

Brad- Yo...

J'ai eu le temps de déglutir. Et encore... j'ai eu le temps d'inspirer, avant de sentir qu'il était trop tôt pour ça.

Trop tôt pour parler à qui que ce soit.

Et c'est en suivant cette logique que j'ai raccroché.

Ce matin encore, ma vie était parfaite. J'arpentais le monde avec Jahra.

Ce matin encore, je me sentais digne d'être aimé. Et de la façon la plus entière qui soit.

Il y a encore une trentaine de minute, je m'attendais à ce que Jahra m'apprenne une grossesse.

On aurait pu l'appeler Aaron, ou si c'était une fille Marisuna. Je n'aimais pas trop ce prénom là. Mais Jahra était si heureuse de l'avoir trouvé... alors oui on l'aurai appelé Marisuna.

Et il y a tout juste 10 minutes, j'ai compris qu'une fois encore par ma faute, j'avais tout perdu.

Je suis resté droit comme un I, à attendre qu'elle revienne. À attendre qu'elle passe le pas de la porte et me rassure comme d'habitude.

Elle aurait pu me dire :

- « C'est toi que j'ai choisi Jared, ce sera toujours toi »

Mais elle aurait pu me dire aussi :

- « Ça prendra du temps pour que je te pardonne, mais c'est nous deux. On s'est choisi, on ne se lâche pas »

Elle me l'a dit tellement de fois avant. On s'est répété à se crever les tympans qu'il n'y aurait aucune marche arrière, que la fin était inenvisageable.

Jusqu'à ce que la mort nous sépare

Elle m'aurait caressé la mâchoire du bout des doigts et dans ses yeux j'aurai pu lire tout l'amour qu'elle avait pour moi.

Elle m'aurait pris dans ses bras en attrapant ma tête et en la plaquant contre sa poitrine.

Parfois elle me serrait tellement fort que je pensais lui péter le thorax. Et à chaque fois j'en avais besoin.

- Jahra... ?

C'est comme un monde qui s'assombrit, c'est comme une pièce noire. Ça a le goût des abysses.

- Jahra !...

J'essaie de hurler, de crier, j'essaie c'est le mot. Je n'arrive à rien et elle doit être bien loin.

- Reviens.

C'est en sentant le goût salé du ruisseau qui s'écoule sur mes joues que je comprends ma réalité. C'est fini.

Ça fait 23 putains de minutes que c'est fini.

C'est tout.

Elle était mon oasis, elle était mon paradis.

Elle était tout.