OS

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« And time washes clean, love's wounds unseen,

That's what someone told me but I don't know what it means

And I think I'm gonna love you for a long long time » 1

La météo était insupportablement belle pour une journée aussi insipide. Les oiseaux chantaient, les feuilles frémissaient sous le poids du vent. Ce paysage magnifique, à l'accoutumée, ne faisait que nourrir sa rancœur. Pourquoi fallait-il qu'il fasse beau ? Pourquoi ne pouvait-il pas pleuvoir, gronder, à l'instar des battements de son cœur qui hurlaient leur tristesse.

- Maman tu viens ? On va être en retard.

Le regard noir, ancré dans le reflet de la nature fleurissante, Florence se tenait face à son miroir.

- J'arrive. Répondit-elle à mi-voix.

Ses yeux se détournèrent vers le dessin marquant sa chair. Lorsqu'elle l'avait fait, quelques mois plus tôt, elle ne s'était pas imaginé la signification imprévue qu'il prendrait. Une tragédie ne prévient jamais, elle n'envoie pas de fleurs pour s'annoncer, mais laisse une traînée fanée sur son passage. Elle avait frappé, vive et sournoise. Un simple coup de fil déversant son flot de conséquences.

Elle s'appuya sur le bord du meuble et ferma les yeux. Aussitôt son sourire enjôleur et ses yeux moqueurs se dessinèrent dans sa tête. Elle pouvait sentir son odeur, sa tête se poser dans le creux de son épaule et ses bras s'enrouler autour de sa taille, se balançant au rythme d'un blues qu'il aimait tant. Mais dès qu'elle rouvrait les yeux, la même douleur lui poignardait le cœur, encore et encore et chaque fois plus intensément.

Il ne reviendra pas.

Elle ferma sa chemise, verrouillant un peu plus son esprit. Il y aurait du monde, trop de monde. Chacun allant de son petit mot, présentant de vaines condoléances. Les hauts gradés loueraient les éloges du défunt capitaine sans jamais l'avoir rencontré. Lily pleurerait sous le regard impuissant de Jules, Nicky serait effondrée et Jean-Paul la consolerait, tentant sans succès de masquer sa propre peine. Sisi qui avait fait le voyage serait blottie en silence dans les bras de son mari. Le chagrin était légitime et tous l'exprimeraient à leur façon.

Elle, avait préféré le silence. Une semaine que l'accident avait eu lieu et c'est à peine si elle avait prononcé un mot. Elle s'était murée dans un mutisme complet pour ne pas s'écrouler. Qui viendrait la relever maintenant qu'il n'était plus là ?

Pascal n'avait jamais été croyant, mais le discours du prêtre était le passage obligé avant le dernier voyage. D'abord Évelyne, qui avait emporté avec elle le souvenir d'une mère que Florence n'avait jamais eu. Maintenant lui. Après tout ce qu'ils avaient traversé, tout ce qu'ils s'étaient dit. A croire que la vie prenait un malin plaisir à la laisser toucher du doigt le bonheur avant de lui l'arracher.

Audrey, sa sœur était revenue et avait tenu à prendre la parole. Alors que tous l'écoutaient avec attention, Florence restait fixée sur le cercueil. Que se passait-il à l'intérieur ? Se doutait-il du vide qu'il laissait en elle ? Voyait-il la larme couler le long de sa joue ?

- rence ? Florence ? Vous voulez dire quelque chose ?

Elle mit quelques secondes à lever les yeux vers la jeune femme. La pauvre n'y était pour rien, mais à cet instant, rien que la voir faisait bouillir le sang de la commissaire. Tout ce qu'elle voyait, c'était le visage de Roche.

- Vous étiez proches, peut-être que ça vous ferait du bien ? Tenta Audrey avec un tendre sourire.

- ... Pourquoi ? Ça ne le ramènera pas.

Les éclats du cœur IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant