Carrots World [Rant Book]

Être travailleur social

Y a pas métier plus plaisant et fatiguant à la fois.

Je vous promet ! J'adore ce que je fais, je l'ai surement dit, mais bon sang, ce que j'aimerai ne voir personne de ma journée parfois. 

Une journée peut commencer de la manière la plus agréable :

Le réveil est doux, tu es heureuse, tu as fais tout ton travail la veille et tu es de bonne humeur.

Tu te prépares à partir en visite à domicile pour voir avec une famille comment on pourrait organiser une chambre pour l'arrivé d'un enfant (à naitre, je précise). Tu as ton sac, tes chaussures, tu vas mettre ton manteau et juste par curiosité tu vas regarder ton téléphone pro. Et, tu vois ce message :

"Bonjour Madame L******, je viens de me souvenir que j'ai un rendez-vous à 10H, je peux pas ce matin ! On peut décaler à 16H?"

Tu as un emploi du temps chargé, pas de place avant 2 semaines pour proposer un rendez-vous et tu sais très bien que cette personne n'a pas de rendez-vous parce que ça fait 6 fois qu'elle annule parce qu'elle ne veut pas te voir. 

- tu as perdu 1H30, pas de colère mais très déçu de ce contre temps.

Tu arrives enfin à ton bureau, tu poses tes affaires et ta cheffe vient te voir et te dis :

"Tu n'as pas renouvelé la demande de logement social de Monsieur B******, l'échéance était hier !"

Ce Monsieur en question, cela fait plus de deux semaines que tu n'arrives pas à le joindre et tu l'a déjà dit 7 fois à ta cheffe qui ne t'écoute pas tellement elle est occupée.

 - tu vas perdre 30 minutes à préparer une convocation qui n'aura pas lieu, ce n'est pas encore de la colère mais tu commences à t'impatienter.

Tu arrives à te poser pendant 2H pour travailler sans être dérangé ou quoi que ce soit. Tu es satisfaite car tu as pu finir un écrit à rendre à la préfecture dans peu de temps. Tu vas pouvoir te concentrer sur une autres affaires jusqu'à ce que ton téléphone sonne. 

"Madame, je suis en formation depuis une semaine, je n'ai plus de ressources !

moi : vous avez démissionnez de votre employeur ?

Non ! Je suis en arrêt maladie, je me forme !

moi : Pardon ? Vous vous formez alors que vous êtes sensé être en arrêt ?"

(info : J'accompagne des personnes dans l'insertion  par le travail, je dois faire en sorte que les personnes aient une situation cohérente pour faciliter le relogement)

Là ! Oui, là ! Tu es énervé. Tu expliques calmement au Monsieur qu'il ne peut pas être en formation pendant son arrêt de travail. Que s'il est inspecté par l'assurance maladie, le Monsieur est en dette de toutes les indemnités journalières qu'il a reçu depuis le début, soit plus de 1200€.

Ce Monsieur s'enfonce. C'est la misère et tu lui explique encore et encore mais ses oreilles laisse tout ressortir de l'autre côté sans filtre. 

- tu as "perdu" 40 minutes à discuter avec ce Monsieur, tu commences à perdre patience. Cette journée devient bien longue, encore moins d'une heure avant ta pause. 

L'après midi commence enfin, tu as pu reprendre de l'énergie pour effectuer un travail administratif colossal sur tes dossiers. Et, tu reçois un appel d'une dame que tu accompagnes et avec laquelle tu as l'habitude d'avoir de bon rapport. 

"Pourquoi t'as augmenté mon loyer ? T'as pas compris que j'avais pas de l'argent pour le loyer mais pour mes enfants, je dois donner du lait à mes enfants !"

Tu comprends, mais tu te fais crier dessus pour quelque chose dont tu n'est pas responsable. Cette dame a des ressources, largement de ressources pour payer son loyer et s'occuper de ses enfants. 

- tu as donné plus d'une heure pour tenter de te faire entendre par cette dame et son mari qui ne fait rien mais qui a une grande bouche. Tu sens que tu n'as presque plus d'énergie et que ta patience arrive à sa limite.

Il reste près de 30 minutes avant la fin de la journée. Une autre dame appel, tu laisses le téléphone sonner car tu as besoins de repos. Tes oreilles siffles et t'as la migraine qui monte. Cette dame va t'envoyer un message vocal de 2:35 parce que tu n'as pas répondu à sa demande. Demande qui est de lire un courrier qui ne la concerne même pas.

Ta journée ? Tu vas répondre : ça va, c'était mouvementé ! Pourquoi ? Oh, comme ça !

NON, t'as juste pas envie d'en parler parce que tu es trop fatigué et que t'as juste envie de penser à autre chose. 

J'adore mon métier, mais vraiment, il y a des jours sans et ces jours sans je ne les comptes plus tellement ils sont nombreux.