Aux fanatiques

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Aux fanatiques

O peuple respectable ! ô peuple endolori

Qui cherche en mes vers la moindre dose de vie

Vous qui ne ressentez rien, vous qui êtes vide

Voilà quelques lignes en appât, rongeurs avides !

Vous vous divertissez en lisant mes tourments

Comme d'autres vont au théâtre, piétinant

Impatients, la gorge enrouée, tout s'éclaircie

Et la meute s'affole, et d'agitation crie :

Quelle hâte ! Un nouveau ! Quels malheurs pour cette fois ?

Nous nos vies sont réglés tel un prêtre en sa foi !

Quelle amertume pour parsemer l'insipide

Quelles nuances d'aigreur, quel charme au yeux livides

Pour nos vies qui se meurent en attendant la fin !

La grisaille se vide, son cœur en est plein !

Et le poète autrefois clamé de louanges

N'est qu'une bête en cage, un paumé qui dérange

Qu'on veut en spectacle et destine à l'abattoir.

Si l'amour est aveugle, qui peut l'entrevoir ?

Pitié, faites la queue ! Chacun aura sa dose !

L'insanité se noit dans l'encre de mes proses

Emportant les tourments qui m'entrainent au trépas.

Tendres cœurs amorphes ici tout n'est que dégâts

Le deuil saccage les songes ainsi que la peur

L'ennui s'imbibe plus de sueur que le labeur

Il tourmente l'âme ! et l'âpre corps qui debout

Vacille à vos yeux trainant peines et courroux

Sombrera bientôt ! sous vos applaudissements !

Et l'on entendra crier : C'est super ! encore !

Un autre poète qui pourri, se voit mort,

Qu'on exhausse son vœu, nous ne sommes cruels !

A ces jeux, le poète et la mort sont en duel !

Une autre dose ! de l'adrénaline pure !

Crucifions-en plus ! Pourvue que l'extase dure !

Que l'on goutte un peu de cette mélancolie

Qui les rend si uniques, et qui toujours nous fuit !

Si vous saviez...

Mourir en son être est un bagne

Tout s'éteint à mesure que l'obscur nous gagne. 

Dissidence poétiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant