Chapitre 1

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Dans son lit en pagaille, Deimos plissait les yeux.

Il faisait atrocement chaud dans la chambre, le soleil tapait à travers les carreaux. La faute revenait au brun, qui trop bourré en rentrant, n'avait pas pris la peine de fermer les volets. Et ça sentait mauvais. L'atmosphère était chargée de relents d'alcool et de sueur.

Une odeur de mâle, pensait le trentenaire en cherchant après son téléphone.

Il était presque onze heures. Deimos n'en revenait pas. Certes, il était très souvent le dernier à se lever, et généralement il ne pointait pas le bout de son nez avant neuf heures minimum mais onze heures, c'était une première.

Le grand brun avait la gueule de bois. La veille, il se trouvait dans un bar non loin de l'Enfer. Beaucoup de ses collègues s'y retrouvaient. Faut dire, il s'agissait du terrain de chasse préféré des prostitués du deuxième étage. Et Deimos y passait la plupart de ses soirées, à picoler jusqu'à plus soif.

Quelque chose clochait dans l'enceinte du septième. Le calme... Le silence. Cela n'arrivait jamais. Il n'y avait pas un matin qui passait sans qu'un vacarme assourdissant ébranlait tout le bâtiment. Souvent, les jumelles Charybde et Scylla – de la chambre voisine ‐ se hurlaient dessus comme des harpies déchaînées pour une question de maquillage. Ou bien encore Mavros, qui faisait son jogging en rangers à travers les couloirs. Et sans oublier Markyle, qui claquaient les portes en vociférant que l'eau chaude était à sec.

Mais pas aujourd'hui. Deimos respirait le calme. Il allait prendre son temps. Si personne n'était venu le chercher, c'est qu'il n'y avait aucune urgence. Alors le trentenaire s'asseya au bord de son lit et fit craquer les vertèbres de sa nuque. Son regard se baladait dans la chambre. C'était le bazar là-dedans. Du linge sale traînait dans le coin, à moitié caché par l'armoire. Il y avait aussi une bonne couche de poussière qui s'accumulait sur la commode à trois tiroirs. Sans parler des vitres, recouvertes de traces blanches et de fientes d'oiseaux. Cela faisait un bon moment qu'il n'avait pas fait le le ménage. Il allait s'y mettre, un jour...

Deimos arrêta son regard sur le lit face au sien, accolait au mur côté droit de la pièce. Il était parfaitement fait. Drap et couverture au carré, pas un pli ne dépassait, et l'oreiller reposait au pied.

Les souvenirs affluaient dans l'esprit du brun et il tenta de les chasser en secouant la tête, en vain.

On ne se faisait pas d'amis en Enfer, ce n'était pas le but. Il fallait considérer les autres comme des collègues, rien de plus, ou au mieux, comme des adversaires. Deimos avait essayé de tous les ignorer, voir même d'en détester certains. Il y était parvenu avec la majorité, mais pas avec son camarade de chambrée.

Érèbe... murmurait le trentenaire en fixant le lit vide.

Il était parti depuis presque six mois, dans la nuit en pleine tempête de neige. Deimos s'en voulait de ne pas l'avoir entendu s'en aller. Peut-être que s'il s'était réveillé, il aurait pu retenir le blond, le convaincre de ne pas s'enfuir. En dix ans, si Deimos savait bien une chose, c'était qu'on ne quitte pas l'Enfer.

Érèbe était sûrement mort et incinéré à l'heure qu'il est.

C'était cette pensée que Deimos tentait de faire disparaître en buvant à outrance. Mais chaque matin, elle réapparaissait dans un coin de son esprit comme une sangsue.

L'heure défilait lentement et il fallait se lever. Cet étrange silence piquait la curiosité du brun. Où étaient-ils tous passés ? Les tueurs à gages manquaient de contrats en ce moment donc impossible qu'ils soient tous en mission. Pas non plus d'anniversaire surprise et rien qui ne pouvait expliquer que les jumelles ne se soient pas disputées au réveil. Pour en avoir le cœur net, Deimos n'avait pas d'autre choix que de partir à leur recherche.

Le Septième cercle Où les histoires vivent. Découvrez maintenant