Chapitre 15 : Obsession

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Ace

Je me laisse porter par les notes du piano, chacune d'elle faisant vibrer mes veines. J'aime faire du piano. Ça a tendance à calmer mes nerfs. A réduire cette putain de boule au fond de mon ventre. Le Xanax détend mes muscles, laissant mon coeur s'apaiser et déambuler autour de la mélodie. Je ferme les yeux, profitant de cet instant de paix rarissime. Mais tout ce que je vois, c'est elle.

Ses yeux.

Je les vois en boucle, sous tous les angles. En colère, quand elle troque le bleu clair contre un bleu marine, assombrissant tout sur son passage. Triste, lorsque un océan de larmes laisse entrevoir la tornade se déchainant en elle. Puis ce regard.

Ce regard qu'elle ma lancé ce soir, entre bataille et meurtre. Ce regard, tamisé d'une lueur d'espoir déjà morte en moi depuis longtemps. Un regard nouveau, que je ne lui connaissait pas. C'est la première fois qu'elle me regardait autrement qu'avec l'envie de me tuer, ou de se tuer. La première fois que nous nous regardions réellement, finalement.

Comme si nous lisions en nous, âme à âme, coeur à coeur.

Cette fille m'intrigue. Et putain, j'aime pas ça.

Je suis censé la haïr, la détester. Elle, son sang, ses gènes. Tout en elle devrait me révulser de l'intérieur. Et c'est le cas parfois. Certains traits de son visage me rappelle son connard de père.

Putain de Sam.

En revanche, elle garde une singularité qui lui est propre, la rendant d'autant plus fascinante. Je connais tout de cette fille. Son passée, ses traumatismes, sa vie, sa famille. J'en sais plus qu'elle sur sa propre vie. Tout était planifié, prévu.

Sauf elle. Et le pouvoir de ses yeux.

J'ignorais à quelle point Betty s'attacherait à elle. A quelle point sa gueule d'ange hanterait mes pensées. Et ça annonce rien de bon. Car notre accord se base sur la mort.

Serait-je capable de la tuer ?

Quelque chose se cache en elle, quelque chose qui m'échappe. Qui nous à tous échappés. Elle porte la douleur du monde entier dans ses yeux, et je le vois. Je le ressent.

Qu'as-tu à cacher, Luna ?

Je repense à nos diverses altercations, qui m'ont mis la puce à l'oreille. Sa façon de frémir facilement, trahissant sa peur. Ses crises d'angoisses répétées, la faisant suffoquer. Ses cris de détresse pendant la nuit quand ses démons la rattrapent au fin fond de ses rêves. La manie qu'elle a de se ronger les ongles. Son impulsivité, aussi dangereuse et tranchante qu'un hachoir, étant son seul moyen de défense contre la peur. Sa cicatrice, dont je redoutais l'existence. J'ai relevé beaucoup de chose d'elle.

Trop de choses.

Trop de choses par rapport à ce qu'elle est.

Une ennemie.

J'ai lancé ce pari su un coup de tête, ignorant les conséquences. Mais ce soir, quand je suis resté scotché à ses yeux, ce n'est pas son père que j'ai vu. Mais elle.

Putain ferme là Ace.
C'est qu'une fille parmi tant d'autres.

Je grogne en faisant une fausse note, rendant la mélodie du piano ignoble. Je me relève, épuisé. Je perd le contrôle.

Tu as le controle Ace.
Je la déteste.
Je déteste son père.

Ses yeux bleus, si semblable à ceux de sa mère et pourtant brillant d'une tout autre lueur. Elle à vécu l'enfer, comme personne ne pourrait le vivre. Je veux savoir à quoi elle pense, de quoi elle a peur. Cette d'obsession naissante en moi est une putain de connerie, et je le sais.

ApophisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant