Chapitre 2 : Résidence Constenza

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Le lendemain, Colocation : 18h30

Page 680. Je referme mon bouquin avec rancoeur. Je déteste terminer un roman : c'est comme sortir de cette bulle qui nous enferme pendant un court instant. Là ou les pensées se taisent, et l'imagination prend forme. On se sent vide. Et seule.

Je me lève de mon lit pour contempler la vue de ma chambre, donnant sur une petite cour. La vue d'en dessous est grisâtre, mais j'aime regarder en face : On y voit de grands appartement luxueux, blanc, ornés d'une multitude de fenêtre sans aucun rideaux. J'aime imaginer la vie que leurs habitants peuvent avoir. Une vie tranquille, paisible. Sans trafics, sans gang, sans traumatismes, sans meurtres...Sans emmerdes.

J'ouvre la fenêtre pour y respirer l'air humide et frais de ce début d'automne. Le vent fouette mon visage et une fine brume vient caresser ma peau. J'inspire profondément en profitant du calme de la ville de Lostwood. Encore plongé dans mon livre, je tente de me libérer du monde dans lequel j'étais plongée quelques minutes plus tôt. Certains disent que lire est très bénéfique. Au contraire, je pense que ça peut être considéré comme une drogue. Pour ma part c'est une sorte d'échappatoire, qui m'éloigne de tout problème, qui fait taire mon cerveau. Mais lorsqu'on en sort, le retour à la réalité est brutal : on doit refaire face à nos vies, qui soyons réalistes, est beaucoup moins rose que dans les romans.

- LUNAAA !

Forcée de sortir de mes pensées, je souffle en refermant ma fenêtre.

- Oui ?

Ivy ouvre ma porte brutalement et s'assoie sur mon lit, affichant un sourire jusqu'au oreilles. Je l'interroge du regard, appuyée contre ma fenêtre.

- On a réunion ce soir !!

Je signe un non de la tête sans lâcher un mot.

- Non non non ma belle, tu ne peut pas te défiler cette fois. Le chef à rassemblé tout le monde, ça a l'air important.

Perplexe, je fronce les sourcils.

- Pourquoi il rassemble tout le monde ? Ça n'arrive jamais sauf pour l'Annuelle...

- J'en sais rien, me coupe-t-elle. En tout cas, ça doit être important. Et c'est peut être le bon moment pour réapparaitre, tu crois pas ?

Je considère la proposition quelques secondes en laissant un petit silence s'installer. Retourner à la résidence ne m'enchante pas vraiment. Surtout pour une réunion officielle. J'essayais d'éviter au maximum de me rendre là bas en ce moment. La dernière ne s'est pas vraiment bien passé... Depuis, je fais la morte. En revanche, une réunion officielle organisée du jour au lendemain, sans aucun contexte, c'est étrange.

- Où, quand et comment ?

- Résidence, 20h et taxi, répond Ivy du tac au tac.

- Je crois que j'ai pas trop le choix de tout façon.

- T'as tout compris ma grande ! Allez t'as une heure pour te préparer.

Elle me caresse le dos de la paume de la main, signe de réconfort, avant de sortir de ma chambre. Ivy est une femme pétillante et toujours très souriante. Ce qui fait d'ailleurs son charme naturelle. Je pense que spirituellement, elle est sûrement mon âme soeur platonique. C'est la seule personne envers qui je m'autorise à montrer mes émotions et à me confier. La seule qui me comprend, m'écoute. Charlie aussi. En revanche, Charlie me ressemble un peu : elle est réservée sur ses ressentis et ne se confie pas facilement. Avec elle, je n'ai pas besoin de parler, on peut même dire que j'évite, mais ça ne l'empêche pas de me comprendre. J'ai rencontré ces filles au Blue Corner, mon ancien lieu de travail. C'est grâce à elle que j'ai pu rentrer dans le réseau Constenza. Réseau que je détestais. Qui m'étouffais. Un monde sombre, dangereux, dans lequel je suffoquais. Je faisais ça pour lui. Rien que pour lui.

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