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Trois mois plus tard,

Fin mars

< Oliver >

Je cours à travers la pièce. Le feu envahit les lieux. La fumée aussi. Elle s'imprègne dans mes poumons et me fait tousser. Beaucoup d'individus sont encore à terre. Des personnes mortes sous les balles, d'autres coincées parmi les débris. D'un côté, mon jumeau est au sol et une poutre lui bloque la jambe. De l'autre, Iris, qui vient de perdre connaissance. Un instant, j'hésite. Je ne sais pas quoi faire. Je veux être juste, mais mes sentiments l'emportent. Je fonce vers Iris pendant que Ben part aider mon frère. Je tente de la réveiller, mais elle ne bouge plus. Son pouls est très lent. Et quand je constate cela, c'est mon cœur qui se met à arrêter de battre en même temps que le sien. Je déteste la sensation que je ressens. Je ne peux pas perdre encore une personne à qui je tiens. J'angoisse et j'étouffe. Si je ne sors pas maintenant, je vais m'évanouir ici, sous les débris enflammés, mais je ne peux pas me résigner à la laisser là. Je la serre contre moi. Un tourbillon d'émotions m'envahit et me noue l'estomac. Je la prends dans mes bras et je me relève, à l'instant où un homme se place devant moi. Le cou en sang. Celui que j'ai tué, il y a quelques minutes. Il me bloque le passage. Il veut se venger. Alors, il braque à nouveau son arme vers moi, mais opte pour le corps d'Iris. J'aimerais me retourner pour la protéger, mais c'est trop tard. Le coup part.

Je me redresse dans un sursaut, le torse nu, en sueur. Je halète, ma poitrine se soulève douloureusement. Les muscles de mon dos me font souffrir, ma nuque est raide. Assis au milieu de mon lit, la couverture retombe sur mes jambes. Je tremble encore. Mon cerveau met quelques minutes à assimiler que ce n'était qu'un cauchemar. Un parmi tant d'autres. Depuis trois mois, je ne cesse de faire le même cauchemar. L'homme que j'ai tué me hante et chaque fois, c'est Iris qu'il attaque plutôt que moi. Mais il n'y a plus la guerre. L'Afghanistan a quitté mes sombres songes. Depuis quelques mois, elle a disparu de mes cauchemars. J'essaie de me persuader que le temps est en train de me guérir, mais je pense que cette psychologue parvient à diminuer mes traumatismes.

Je n'étais pas à l'aise avec le concept, au départ. Je ne voulais pas que quelqu'un d'inconnu entre dans ma tête et se mette à fouiller et à tout retourner. Mais un soir, tard dans la nuit, j'ai reçu un appel d'Iris. Comme souvent, je ne dormais pas et elle s'en doutait visiblement. Son sommeil l'avait déserté depuis quelques heures alors, témoin de nos insomnies, nous avons parlé de longues heures. Elle m'a conseillé de voir quelqu'un, dans le but de ne pas être tout seul, tous les jours. Et j'ai finalement cédé.

Depuis cet appel, je ne suis jamais parvenu à avoir un autre contact avec Iris. Elles les filtrent, me renvoyant chaque fois sur messagerie. Certaines nuits, j'aurais aimé l'avoir dans mes bras pour me réconforter d'un cauchemar, j'aurais eu besoin d'entendre sa voix. Alors, je me suis contenté de laisser de nombreux vocaux, auxquels elle n'a jamais répondu. Les lettres que je lui ai envoyées me revenaient toutes.

Iris n'a pas accepté mon départ et elle veut me le faire payer. Je culpabilise d'être parti, d'avoir pour la première fois abandonné un combat. Je la comprends. J'ai disparu du jour au lendemain en lui laissant simplement un mot. Ce dernier m'a procuré une seule et unique larme, qui m'a prouvé que je pouvais encore ressentir des choses, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Mais, je n'ai pas eu le choix. Warren a, de nouveau, menacé d'arrêter les soins qu'il paie à ma mère. Sauf que, cette fois, il était sérieux. Alors, même si Iris compte plus que tout pour moi, personne ne rivalise avec celle qui m'a élevée.

Ma mère que je n'ai pas vue depuis ma dernière visite, avant que je parte. Je l'ai seulement au téléphone dès que c'est possible. Ça ne me suffit plus. Ça me fait ressasser que son pronostic vital est engagé. J'ai besoin de la voir au risque de le regretter.

Private security T.2 [En Auto-édition avec BOD]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant