Pour qui ?

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Pour qui ?

Ça va.

C’est une question plus facile.

Ou plus complexe ?

Je ne sais pas.

Je suis fatiguée.

Et triste.

Normal.

J’ai pleuré.

Pour toi.

Et pour tous les autres aussi.

J’ai pleuré.

Ragé.

Hurlé.

Crié.

Silencieusement.

En chuchotant.

Étrange paradoxe, n’est-ce pas ?

Et pourtant...

J’ai pleuré.

Contre les injustices.

Toute la misère du monde.

Les guerres.

La famine.

La pauvreté.

Et bien plus encore.

J’ai 14 ans.

Est-ce normal pour une ado de 14 ans d’avoir ce poids sur ses épaules ?

D’avoir l’impression de porter le monde entier sur son dos ?

Je ne crois pas.

Vous me direz :

Ne t’en fais pas.

Ça va s’arranger.

Ou encore :

Ne te préoccupe pas de ça.

Laisse les adultes gérer !

On va y arriver !

Profite plutôt de la vie !

Ce genre de choses que vous répétez tout le temps.

Sans effet.

Évidemment.

Ces phrases ne sont pas là pour ça.

Eh non.

Elle sont là pour endormir le monde.

Pour éviter de regarder la vérité en face.

Le déni.

Vous êtes plongés dedans en permanence, vous.

Les adultes.

C’est si confortable que vous ne voulez plus en sortir.

Vous n’avez plus la force de le faire.

Vous vous êtes noyés tous seuls.

Tel est pris qui croyait prendre.

Sauf que si vous ne sortez pas de cet état.

Le déni.

Ce sera à nous de porter ce poids.

À votre place.

D’assumer.

À votre place.

De payer la dette incommensurable que vous nous laissez.

À votre place.

Pourquoi devrions-nous payer à votre place ?

Je suis partie de "Pour qui ?" et je reviens au "Pourquoi ?".

Je vous l’ai dis.

Un cercle vicieux.

Mais comment voulez-vous qu'on en profite, de notre vie ?

Vous ne voyez pas les urgences de ce monde ?

Toujours plus pressantes.

Nous, les enfants et adolescents, on se prend tout en pleine figure.

Alors qu’on avait rien demandé.

Voilà.

Voilà pourquoi !

Voilà pourquoi je pleure !

Je pleure pour tout ça.

Et tellement plus encore.

Je pleure pour notre génération.

Qui souffre.

Au quotidien.

Mais attention.

Ce ne sont pas des pleurs gnangnan.

Mes larmes.

Sont des larmes de rage.

De colère.

D’indignation.

Ce sont ces larmes qui me poussent à aller de l'avant.

Ce sont ces larmes qui me poussent à agir.

Pour tous.

Recueil De Textes Et De PoèmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant