Le tout dernier été

Chapitre quatrième : Comme se retirent les vagues

En apercevant Charlotte descendre vers la plage et partir vers la droite, elle sut que c'était une des traditionnelles soirées de jeux de sociétés et que faute d'avoir trop réagit un fois, lorsqu'ils avaient 12 ans, elle n'était plus invitée.

Au fond d'elle, Élisabeth s'en fichait royalement, mais elle aimait faire semblant d'être offusquée lorsque les garçons planifiaient ce genre de soirée sans elle.

De toute manière, les jeux de sociétés n'étaient pas vraiment son genre de soirée. Non, Élisabeth, elle, aimait surtout se balader en solo sur la jetée, observant de loin les couples mignons et les bandes de garçons qui jouait aux arcades.

Ce soir, les averses avaient cessé, alors elle enfila un jean moulant, un petit top mignon, peaufina son maquillage et sortit sans même avertir sa mère (elle était toujours fâchée contre celle-ci à propos de la vente de la maison).

Elle passa une bonne demi-heure sur la jetée, mais elle s'ennuyait à mourir. Elle s'assit sur un banc face à l'océan et se demanda ce qu'elle pourrait faire à la place. Les options déboulèrent dans sa tête : elle pouvait aller faire une surprise aux joueurs de jeux de sociétés et s'immiscer pour les regarder jouer, mais elle savait qu'elle finirait aussi par s'ennuyer.

Alors, elle se leva pour se diriger vers chez elle, mais croisa Jé et Dave sur son chemin.

- Les gars? Qu'est-ce que vous faites ici? C'est pas la soirée jeux ce soir ?

Les garçons se regardèrent et se demandèrent comment elle aurait pu être au courant, mais ne lui firent pas la remarque, car au fond, ils s'en fichaient un peu.

- Ouais, mais ta merveilleuse amie était si mauvaise qu'elle nous a empêché de bien jouer, alors nous sommes partis, répondit Jé , en se dirigeant vers une machine à arcade.

- Donc, la soirée est terminée?, demanda Élisabeth avec un petit peu trop d'enthousiasme.

- En gros, oui, mais Charlie est restée, ajouta Dave

Élisabeth soupira et tourna les talons pour reprendre son chemin jusqu'à la maison. Elle aurait voulu courir rejoindre sa meilleure amie et passer le reste de la soirée à se faire les ongles ou bien simplement pour parler.

En marchant tête baissée vers sa maison, Éli fronça dans quelque chose de dur et tomba dans le sable, sonnée.

Elle leva les yeux vers la main tendue vers elle et y découvrit des tatouages qu'elle connaissait que trop bien.

- Oh, hey Dylan

Dylan ne répondit pas et se contenta de l'aider à se relever avant de lui tourner le dos et de s'en aller.

Elle courut un peu sur le sable pour l'arrêter.

- Hey, Dylan! Attends!

Il s'arrêta, sans toutefois daigné de la regarder. Elle s'avança vers lui.

- Dylan, ça va ?

- Comme d'hab', je peux y aller maintenant ?

Il tenta de recommencer à marcher, mais elle l'en empêcha.

- Dylan! Pourquoi agis-tu de la sorte ? Je t'ai fait quelque chose ?

- Non... Je, écoute, si c'est pour me parler de moi et Charlie...

- Toi et Charlie? Quoi, toi et Charlie?

Les pensées d'Élisabeth tournoyaient dans son esprit à tout vitesse. Elle essayait de comprendre de quoi Dylan lui parlait, mais plus elle y pensait, plus cela l'apeurait.

- Merde. Écoute c'est vraiment pas à moi de te parler de ça, je pensais que Charlie t'en aurais parlé? Laisse tomber, ok?

- Non! Dylan, explique bon sang !

Il la regarda profondément, scrutant chaque trait sur son visage et il abandonna. Il ne voulait pas lui mentir, il était incapable de mentir, maintenant. Il serra les dents et l'emmena par le bras.

Plus loin sur la plage, sous le regard intrigué d'Éli, il fit un feu rapide et lui demanda, un peu durement, de s'assoir près de lui. Élisabeth l'écouta.

- Il y a deux étés, tu te rappelles, tu n'étais pas venue à Connor Beach, eh bien, Charlotte et moi avons un peu, tu sais, sortit ensemble ?

Il termina sa phrase doucement, essayant de deviner l'émotion sur le visage d'Élisabeth, mais ne décela rien.

Élisabeth était passée maître dans l'art de cacher ses sentiments, surtout ceux qu'elle éprouvait pour Dylan depuis quasiment toujours. La déclaration qu'il venait de lui faire donnait l'impression d'avoir reçu un poignard dans le dos, une épée dans la poitrine. Pourtant, ce qui lui faisait le plus mal c'était que sa meilleure amie ait osé lui faire un coup pareil et qu'elle n'ait jamais daignée lui en glisser ne serait-ce qu'un mot.

Elle regarda le visage torturé de Dylan et sans dire un mot, elle se leva, doucement, enleva le sable de sur ses fesses et partit. Dylan n'essaya même pas de la retenir et cela détruit Éli encore plus.

Elle ne pleura pas. Elle ne pleurera pas, elle refusait d'être ce genre de personne. Elle était forte, elle n'allait pas se laisser abattre pour ça.

Arrivée devant chez elle, Élisabeth hésita, puis prit le chemin de la maison de Charlotte.

Elle entra par la porte arrière et après avoir salué les parents de Charlie, elle monta directement dans la chambre de celle-ci et attendit.

Quelques instants plus tard, une Charlotte aux joues rosies entra dans la chambre et se laissa tomber sur son lit.

- Oh, Éliiiiiii, je crois que... Je crois bien que je trippe un peu sur...

- Sur Math? Ou sur Dylan, comme il y a deux ans?

Le visage de son amie changea d'émotion et elle baissa piteusement la tête. S'assoyant doucement face à Élisabeth sur son lit.

- Oh, Éli, s'il te plaît, ne m'en veux pas, j'aurais voulu te le dire avant, mais c'est rien, je te jure, je n'ai jamais vraiment eu quelque chose pour Dylan et...

- J'en reviens juste pas, Charlie, que tu aies pu me faire ça ! On est censée être amies non?

Charlotte recula doucement et tenta de s'excuser des dizaines de fois. Élisabeth ne voulut rien savoir. Charlotte s'enflamma.

- TU N'AS PAS DROIT D'ÊTRE FÂCHÉE, TU NE M'AS JAMAIS DIT QUE TU AVAIS QUELQUE CHOSE POUR DYLAN.

Élisabeth regretta soudainement de s'être tant fâchée contre son amie, car c'est vrai qu'elle n'avait jamais dit à personne qu'elle voyait Dylan dans sa soupe, mais son orgueil la rattrapa juste avant qu'elle ne quitte la chambre de son amie.

- EH BIEN, TU SAURAS CHARLOTTE, QUE C'ÉTAIT ÉCRIT DANS LE CIEL.

Elle claqua la porte et descendit furieusement les escaliers et courut se réfugier sur la plage.

Arrivée sur la plage, elle vu quelqu'un d'autre assis à son endroit préféré. Elle s'approcha pour mieux reconnaître Mathieu.

Elle s'assit à ses côtés et concocta sa vengeance contre sa «meilleure amie».

 Elle hésitait toute fois à lui faire du mal, mais Charlotte ne s'était pas gênée pour sortir avec Dylan, alors elle mériterait ce qu'Élisabeth prévoyait comme vengeance. Tu as voulu sortir avec Dylan, alors tu auras droit à la même médecine, se dit-elle en regardant Mathieu de plus près.