Chapitre 53

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Quoi ?

Je crois que mon cœur vient littéralement de s'arrêter de battre. Ce n'est pas possible, mon père ne vient pas de dire ce que je crois qu'il vient de dire, n'est-ce pas ?

À ma gauche, ma mère s'exclame avec joie :

— Oh, c'est merveilleux !

Elle est imitée par la mère de Dylan. Quant à ce dernier, il me lance un sourire victorieux qui m'indique que je n'ai pas été victime d'une hallucination auditive, mon père vient bien de lâcher cette bombe.

Si l'implication de ce qu'il vient de dire n'était pas aussi dramatique, je pourrais ricaner de la démarche de Dylan. Est-il vraiment allé trouver mon père pour demander l'autorisation de me "faire la cour" ? A-t-il utilisé, mot pour mot, cette expression ? Non parce que, soyons honnêtes, cela implique un niveau de raffinement qui lui est totalement inconnu.

Donc oui, dans un autre contexte, associer Dylan a une démarche aussi chevaleresque me ferait mourir de rire. Mais en l'état, cela me donne juste envie d'éclater en sanglots.

Le désespoir s'abat sur moi comme une chape de plomb, me coupant le souffle. Toute la nourriture que je viens d'ingérer menace de prendre le sens inverse. Ma tête tourne et mon cœur pompe comme un malade dans ma poitrine, comme pour m'empêcher de succomber au coup que je viens de recevoir. Mes larmes sont sur le point de faire leur apparition et je doute d'être suffisamment forte pour les retenir.

Soudain, je croise le regard menaçant de mon père qui m'intime silencieusement l'ordre de garder le sourire et de donner le change.

— Fais honneur à la famille.

Sa remarque résonne dans ma tête et prend alors tout son sens.

Il savait qu'il allait faire cette annonce durant le dîner et non seulement il ne m'a pas prévenue, mais en plus, il avait conscience que la nouvelle allait m'anéantir. Pourtant, cela ne l'a pas stoppé.

Cette vérité douloureuse me frappe de plein fouet : mon père sait que je n'ai aucune attirance pour Dylan, malgré tout il a donné son accord à cet enfoiré.

Cette fois, mon estomac se rebelle pour de bon et je suis à deux doigts de faire un malaise. Avant de totalement me ridiculiser, je lance un pauvre :

— Excusez-moi.

Puis, je me lève et prends la fuite pour aller me réfugier dans la salle de bain la plus proche.

Fuck l'honneur familial !

Heureusement, je connais bien les lieux, je me dirige donc sans encombre vers ma destination. Il faut dire que ce n'est pas la première fois que je mets les pieds ici.

Et c'est loin d'être la dernière !

Cette pensée est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. La corde vient de rompre, je ne maîtrise plus rien.

Je me précipite sur la porte qui est maintenant à ma vue. Je referme derrière moi et vais me positionner au-dessus des toilettes. Dans la seconde qui suit, je rends une partie de mon repas.

Mes yeux sont noyés de larmes et mes crampes d'estomac peinent à s'estomper. Je reste dans cette position durant plusieurs minutes, jusqu'à ce que le plus gros de la crise passe.

Quand je suis enfin certaine que je ne cours pas le risque d'être une nouvelle fois malade, je me redresse et m'approche du meuble de salle de bain. J'ouvre l'un des robinets et me passe de l'eau fraîche sur le visage pour tenter d'effacer les traces de ma crise de panique.

Je relève la tête et observe les dégâts dans le miroir.

La fille qui me fait face est une totale inconnue. Ses yeux sont rouges et bouffis. Son teint est blafard et son regard vide. Des larmes ont tracé des sillons sur ses joues. Elle est l'image même de la tristesse et du désespoir.

C'est horrible. Chaque fois que je retrouve un peu de mes capacités cognitives, les implications de ce que vient d'annoncer mon père m'explosent au visage et m'anéantissent un peu plus.

J'ai vaguement conscience que je ne peux pas rester ici indéfiniment, même si cette option est plus que tentante, car je risque de me ridiculiser un peu plus. Je termine donc de gommer les traces physiques de ma crise.

Lorsque j'ai regagné un semblant de contrôle, j'ouvre la porte, j'ai la désagréable surprise de me retrouver face à ce qui constitue désormais mon pire cauchemar : Dylan.

Cet enfoiré jubile du coup qu'il vient de me porter, je le vois à son sourire victorieux. Je n'ai jamais eu autant envie de le frapper !

— Alors, ne t'avais-je pas dit que ce repas serait sensationnel ?

Après la soirée étudiante, je pensais que le dégoût et la haine qu'il m'inspire ne pourraient pas être plus grands. Je me suis trompée ! Ce que j'ai ressenti l'autre soir n'est rien à côté de maintenant.

Dylan abandonne son air enjoué et me donne le coup de grâce en ajoutant d'un air menaçant :

— Tu as jusqu'à la fin du weekend pour mettre un terme à ton histoire ridicule avec ce chien galeux. C'est compris ?

Cet ordre me donne aussitôt envie de me rebiffer. Pour qui se prend-il ? Il n'a aucun droit sur moi.

J'ai envie de répondre : Sinon quoi ? Mais ma voix s'est fait la malle. Je suis incapable de parler. De toute façon, c'est inutile, puisque Dylan ajoute, mauvais :

— Sinon, je serai obligé d'en parler à nos pères et crois-moi, ni ce voyou ni toi n'aimerez ça. Surtout lui, à vrai dire. Je suis certain qu'en fouillant bien, son petit commerce n'est pas si clean que ça. De toute façon, des preuves, cela se fabrique.

Mon sang se glace dans mes veines quand je comprends ce qu'il sous-entend. Je retrouve alors soudain l'usage de la voix et crache :

— Si tu fais une chose pareille, je ne te le pardonnerai jamais !

Dylan ricane de ma menace, preuve de l'importance qu'il lui accorde. Cependant, je peux voir qu'il n'apprécie pas que je prenne ainsi la défense de Marlon.

— Tu crois vraiment que j'y accorde la moindre importance ?

Il s'approche, jusqu'à ce qu'un souffle nous sépare l'un de l'autre. J'aimerais pouvoir remettre de la distance entre nous, mais je suis prise au piège entre le mur et Dylan.

— Ton cœur ne m'intéresse pas du tout, bébé, ajoute-t-il.

Il se recule et tourne les talons.


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