Chapitre 1

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Elife se réveilla avec un mal de crâne écrasant.

Il lui fallut plusieurs minutes pour rassembler ses esprits et se rappeler où elle était.

Dans la villa de Jessica et Eduardo Pierce. Et à en juger par la douleur qui lui vrillait les tempes, elle avait bu plus que de raison à la soirée de la veille. Elle qui, d'ordinaire était si réservée, avait accepté de rejoindre ses collègues pour l'ultime soirée de leur périple. Et elle devait bien avouer qu'elle avait passé une excellente soirée. Enfin, du moins de ce qu'elle s'en rappelait. Étrangement, elle n'avait aucun souvenir de la fin de soirée, ni d'être retournée dans sa chambre. Cela ne lui ressemblait pas. Elle n'avait pas pour habitude de boire à outrance. Encore moins jusqu'à l'inconscience. C'était peut-être ce qui lui avait joué des tours...


La jeune fille regarda le réveil. Neuf heures. Il était encore tôt, elle avait le temps. Pourtant, elle se frotta les yeux et s'étira avant de s'extirper du lit. Jetant négligemment un Doliprane dans son verre d'eau, elle se dirigea vers les immenses fenêtres. En tant normal, elle adorait la vue que lui donnait sa chambre qui dominait l'immense jardin du domaine. On pouvait y voir gambader des lapins, voler une multitude d'oiseaux. Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui, c'était la tempête. Le ciel était menaçant, la pluie battait contre les carreaux et les rafales de vent éparpillaient les feuilles dans toutes les directions. Elle grimaça. Les conditions n'étaient vraiment pas optimales pour voler. Elle était pourtant persuadée que le bulletin météo de la veille annonçait des conditions climatiques idéales... Ce n'était pas pour l'arranger. Elle, qui détestait prendre l'avion, allait devoir se gaver de somnifères pour pouvoir supporter les turbulences. Elle espérait que les milliers de kilomètres qui la séparaient de Paris allaient être vite engloutis.


Elife se rendit dans la salle attenante à sa chambre et se fit couler un bain. Rien de tel pour la détendre et la remettre en forme. Le corps immergé sous les bulles, elle soupira d'aise. Cette maison allait tout de même lui manquer. Pourtant, elle avait longuement hésité à suivre ses collègues. Après le " conflit " qui l'avait opposée à Jessica, sa patronne, cette dernière lui avait offert une place aux côtés de son équipe, pour l'événement le plus important du monde de la mode : la Fashion Week. Non seulement Elife avait toujours rêvé d'assister à un tel événement, mais le fait qu'il ait lieu cette année à Los Angeles, avait achevé de la convaincre. Quelques soient ses griefs avec Jessica, une telle occasion ne se refusait pas, une jeune avocate comme elle ne se verrait pas proposer une telle opportunité deux fois dans sa carrière.

La première semaine s'était déroulée dans une frénésie totale : logés au Hollywood Roosevelt, ils n'avaient malheureusement pas eu une minute pour profiter de l'hôtel le plus luxueux de la ville ! Et pour cause, toute l'équipe était affairée à préparer le défilé : elle gardait le nez dans les centaines de contrats, tandis que les mannequins travaillaient leurs enchaînements, que les couturières faisaient les dernières retouches et que les maquilleuses peaufinaient leur art. Comme à son habitude, Jessica orchestrait tout cela d'une main de maître.

Jessica Pierce était l'une des femmes les plus influentes du monde de la mode. On racontait qu'elle avait débarqué en France deux décennies plus tôt, inconnue de tous, et qu'elle avait bâti son empire à partir de rien. A coup de détermination, de talent, et de charisme, elle était devenue la femme métisse la plus influente du vieux contient.

Aussi exigeante envers elle-même qu'envers ses salariés, Jessica ne s'entourait que des meilleurs. Dure et exigeante, elle attendait d'eux un travail colossal, mais leur offrait en échange une réputation de travail inégalable, tant en France que sur la scène internationale.

C'était ce qui avait décidé Elife à obtenir son stage de dernière année dans sa société. Elle avait travaillé d'arrache-pied des mois durant, sans compter ses heures ni même se ménager de pauses. Elle avait énormément appris aux côtés de Jessica, si bien qu'elle n'avait pas eu de difficultés à y décrocher ensuite son premier emploi.


Sans grande surprise, le défilé avait été un franc succès. Les médias avaient encensé le talent de Jessica, et le travail colossal de toute son équipe. La liesse avait été totale, la pression était retombée d'un coup... Enfin pas pour tout le monde. En tant qu'avocate de la société, le vrai travail d'Elife avait commencé dès la fin de la cérémonie : elle devait maintenant proposer et rédiger tous les contrats que leur avait attirés leur réussite.

Cela lui aurait valu plusieurs nuits blanches d'affilée, si Jessica n'avait pas proposé à son équipe de venir passer quelques jours dans sa villa de l'Ohio. D'abord réticente, elle ne s'était pas totalement remise de son dernier conflit avec sa patronne, Elife avait fini par céder face à l'allégresse générale de son équipe. Après tout, à leurs côtés, elle ne craignait pas grand-chose.

C'est ainsi qu'elle avait passé cette dernière semaine entourée de collègues qu'elle ne connaissait pas quinze jours auparavant. Elle qui avait toujours pris soin de cloisonner travail et vie privée, avait fini par tisser des liens avec la plupart des personnes présentes. Principalement des mannequins et des couturières, bien loin du milieu des affaires qu'elle avait coutume de côtoyer. Si elle avait passé les premiers jours à travailler dans sa chambre ou dans l'immense parc qui entourait la demeure, elle avait rapidement fini par céder à l'appel de ses nouveaux collègues et de toutes les distractions qu'offrait le lieu. Cinéma, salle de sport, sauna, hammam, terrain de golf et de tennis, elle ne comptait plus les heures qu'elle y avait passé, et l'amusement qu'elle en avait retiré.

Elife devait bien l'admettre, un étrange sentiment de nostalgie commençait déjà à l'envahir. Pourtant, il lui faudrait bien retrouver son morne quotidien parisien, puisque le jet privé de Jessica décollait cet après-midi pour les ramener chez eux...


Sentant ses dernières nausées s'évaporer, Elife sortit enfin du bain. Elle coiffa ses longs cheveux roux en une simple queue de cheval, enfila un débardeur blanc et une jupe bleu turquoise en lin avant de descendre rejoindre ses collègues à la cuisine.

Entre leurs mainsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant