Les plumes de l'utopie

Douceur caramélisée

Il n'avait plus d'autres choix maintenant. Il devait se morfondre dans sa solitude. Rien que de lever les yeux vers son reflet dans le miroir était une torture. C'était impossible de se relever après une perte pareil. Il venait de perdre celui qu'il aimait, avant même avoir eu le temps d'apprendre à lui donner son amour.

"Ness t'es vraiment qu'un enfoiré bordel."

C'était si douloureux pour Kaiser. Mais la douleur, au final, c'était tout ce qu'il avait jamais connu.

Un soir il se rendit à la plage, cette même plage où il avait failli le perdre. La plage qui l'avait brûlé puis tenté de le noyer, quelle ironie. Cette stupide plage où ça avait commencé à grandir en lui, ces sentiments vains. Pauvre Kaiser, contempler ce paysage désert était douloureux. Son âme se déchirait en lui. La seule douceur qui lui restait était cette plume. Cette simple et frêle plume. Toujours aussi douce et réconfortante que l'était le sourire de Ness.

Il ne savait même plus ce qu'il était censé faire. Pleurer ? Il n'en avait pas la force. Passer à autre chose ? Plutôt partir en fumée lui aussi. Être en colère ? C'est déjà ce qui l'animait en permanence.

Pourquoi ?

Pourquoi ne lui avait-il pas dit dès le début ? Pourquoi lui cacher qu'il partirait en fumée s'il tombait amoureux de lui ? Pourquoi il ne l'a pas prévenu des lois de son monde à lui. Quel égoïste que tu es Ness.

S'allongeant dans le sable, qui ne brûlait même plus pour lui, il respirait. Tentant de ne pas pleurer. De ne pas y penser. De ne plus souffrir. Pourtant, c'est ce qu'il était venu chercher en venant à cette plage, de la souffrance. Pour oublier Ness. Mais rien que d'y penser, ça lui glaçait le sang. Comment oublier cet être si majestueux ? Impossible.

Va t'en !

C'était de trop pour lui. Il ne pouvait plus revenir à la plage. Maudite plage. Si seulement elle pouvait disparaître, elle aussi.

La nuit était maintenant tombée. Il n'avait pas envie de rentrer, le silence de son foyer était trop écrasant. Une traînée de joie l'appelait au loin, un son sucré et coloré.

"C'est vraiment ma journée, fait chier"

Il se dirigea malgré lui vers cette dernière. C'est comme si elle l'appelait et le suppliait de le rejoindre. Il était maintenant au milieu d'une foule d'enfants avec du sucre plein les dents.

La fête foraine !

La lueur de tout ces sourires réfléchissait le teint pâle du blond. Sa tristesse se noyait sous toute cette joie animée. Que faisait-il là ? Lui-même ne le savait pas. Mais son cœur le savait lui. Être perdu dans cette joie c'était comme être avec Ness. Dans son âme. Cet endroit appartenait à Ness, et personne d'autre. En parlant de Ness, il y a quelque chose qui le lui rappelait le plus.

Croque !

Il marcha d'un pas lent et hésitant vers ce fameux stand. C'était le stand de Ness. Il lui appartenait depuis le jour où son sourire avait émergé grâce à ce dernier.

"Je vais vous prendre une pomme d'amour, s'il vous plaît."

Le vendeur se retourna, fixant Kaiser d'un beau sourire angélique. Kaiser lui frissonnait. Était-il depuis tout ce temps en train de rêver ? Avait-il brûlé avec Ness ? Non. Impossible. Il était bel et bien vivant. Alors pourquoi ce vendeur de pommes d'amour avait un visage si familier ?

"Je vous donne ça tout de suite monsieur !"

Son sourire était aussi étincelant que celui de Ness. Son Ness. Il lui tendit le fruit caramélisé. Kaiser le prit, son tatouage se faisant remarquer.

"Si je peux me permettre, j'aime beaucoup votre tatouage ! Moi aussi j'en ai un d'ailleurs.
-Merci.
-Ah mais le mien est sur mon dos ! Ce sont des ailes d'anges que j'ai !"

Ça y est !

"Excusez moi, on pourrait se parler quand vous aurez fini avec votre stand ?
-Pas de problème oui monsieur..?
-Kaiser. Seulement Kaiser.
-Ness, enchanté Kaiser."