III. Réveille

63 4 1
                                    


     La brise était fraîche, en tout cas assez pour se rafraîchir les idées. La petite Mailivia de six ans marcha vers les autres enfants pour aller jouer, mais tous refusèrent de jouer avec une non américaine, elle parlait peu leur langue, car cela faisait à peine un an qu'ils étaient à Las Vegas. Elle essayait tant bien que de mal à parler leurs langues, mais ça ne faisait rien, son accent français sonnait horrible à leurs oreilles. Alors elle décida de jouer les pirates en faisant croire qu'elle était muette, mais ça lui arrivait parfois qu'elle rentrait chez elle avec des bleus sur le corps. Seul un garçon à lunettes ne l'embêtait jamais, il était souvent silencieux et ne parlait à personne. Il jouait souvent au échec, Mailivia ne comprenait rien à ce jeu pour grande personne. Alors un jour, elle s'approcha de lui.

— Je m'appelle Mailivia ! Et toi, c'est quoi ?

Le garçon regarda autour pour s'assurer qu'il ne rêvait pas. Il plissa les yeux en attendant que la fille finisse par se moquer de lui.

— Si c'est pour te moquer, vas-y.

— Hein ?

— Tu comprends pas ?

— Tu parles trop vite... Je suis pas Américaine... Révéla la petite fille en laissant son accent dévoilé.

— C'est toi la pirate muette ?

— Tout le monde se moque de moi pour mon accent, alors j'ai arrêté de parler.

— Moi, je trouve ton accent joli, même s'il n'est pas très agréable.

— Merci... Euh ? Incita la petite fille à faire parler le petit garçon.

— Spencer, Spencer Reid.

— Mailivia... Juste Mailivia.

— Je préfère Mai... C'est plus facile à prononcer.

— Si tu le dis Spence.

— Ne m'appelle pas comme ça... S'il te plaît.

— C'est pas juste, tu as le droit à un surnom.

— Ma maman m'en donne souvent.

Mailivia haussa les épaules en se fichant éperdument des surnoms que pouvait donner la maman de son nouvel ami.

— Chess. Ton surnom, c'est Chess.

— Le nom du jeu que je joue ?

— Hm, oui, tu joues souvent à ce jeu pour grands, alors oui.

— Si tu veux, je te l'apprendrai.

— D'accord.

Mai ouvrit les yeux peu à peu. Ses yeux étaient aveuglés par le blanc immaculé du plafond. Elle regarda des deux côtés, il n'y avait personne qui était à son chevet. Harry avait raison personne n'allait la pleurer. Quelques secondes après, elle vit Ellie arriver puis repartir chercher un médecin en voyant qu'elle était réveillée. Ellie n'était pas inquiète pour elle, non, elle devait peut-être la surveiller ou se sentir coupable. Un médecin arriva pour l'ausculter. Elle termina son travail en retirant quelques trucs que les médecins sont capables de nommer, puis partit.

— Vous nous avez une belle frayeur. Dit Ellie avec un grand sourire.

— Harry Icebi ? Il est arrêté ?

— Oui, pour les meurtres que vous avez suspectés. C'est grâce à vos enregistrements qu'on a pu l'inculper.

— J'ai dormi combien de temps ?

— Pendant un jour entier.

Mai soupira en mettant ses mains sur ses yeux. Elle les retira pour sentir sa blessure qui l'a brûlé un peu.

— Ne vous inquiétez pas, ce n'est pas profond. Rassura Ellie

— Ça a été assez pour que je baigne dans mon propre sang. Expira Mai.

— Vous devriez changer d'appartement. Conseilla Ellie.

— Bonne idée. Je vais peut-être avoir prime pour avoir presque donné ma vie. Ricana Mai de mauvais goût.

— Certainement. Vous devriez vous reposer maintenant. Dit Ellie en s'apprêtant à sortir, mais fut arrêtée par Mai qui l'appela.

— Ellie ? Je peux vous poser une question ?

— Allez-y.

— Comment vous avez fait après vos agressions ? Vous ne vous êtes pas senti...

— Coupable d'avoir été faible ?

— Oui...

— Je me sens encore coupable et je n'ai personne à qui me confier. Je vois une psychologue... L'équipe ne va pas vous aider... Ils sont... Nous ne sommes pas une famille comme je le pensais.

— Putain. On est seule alors ?

— Oui.

— Soyons seules ensemble ? Enfin,... J'essaye de dire que si vous avez besoin de qui que ce soit pour parler, je serai là...

— Merci... J'ai écouté l'enregistrement... Mailivia est votre vrai prénom ?

— Malheureusement, oui... Je préfère que vous continuez à m'appeler Mai. Mailivia est quelqu'un d'autre que moi.

— Je comprends.

— Merci de m'avoir surveillé.

— Repose-toi.

Ellie part en lui laissant un seul sourire. Mai se sentait tellement stupide, mais elle savait maintenant qu'elle devait alors une psy et aussi apprendre à mieux se défendre. Elle n'avait pas hâte de sortir, sachant que personne n'allait l'attendre. Un animal de compagnie est mieux qu'un humain de toute façon. Mai s'apprêtait à se rendormir quand elle entendit toquer doucement. Elle souffla un simple entrer, puis elle vit enfin un visage rassurant, celui d'Alexander qui avait des fleurs à la main. C'était des iris blancs, ses préférés.

— Comment tu vas, ma douce ?

— Comme quelqu'un qui a été poignardé dans le ventre et pissé le sang... Sinon, nickel et toi ?

— Mai... Je suis sérieux.

— Ça va mieux, pose les fleurs sur la table. Dit Mai en voyant Alexander sans savoir quoi faire des fleurs.

Il posa les Iris sur la table à côté d'elle. Il prit une chaise et s'assit près de Mai. Sa peau mate se reflète par la pâleur de celle de Mai. Normalement, sa barbe était mal taillée comme à son habitude, mais là, elle était mieux coupée comme si Alexander voulait faire bonne figure.

— Tu vas bien ? S'enquit Mai.

— Ouais, ouais.

— Je ne suis pas morte et je vais bien.

— J'ai cru te perdre... Murmura Alexander avec des larmes dans ses yeux.

— Alexander Ravie si tu pleures, je vais me mettre à pleurer...

— Désolé, c'est l'émotion... Assura Alexander en essuyant les quelques larmes dans ses yeux.

— Je suis là... Et si un jour je ne le suis plus, c'est parce qu'on a fini par se lasser de l'un et de l'autre. Rassura Mai avec tant de mal.

— Si je pouvais tuer ce mec, je le ferai.

— Si tu fais ça, c'est moi qui vais te tuer.

— Oublie ton côté agent du FBI. T'as failli mourir.

— J'ai retrouvé Chess. Je m'en suis souvenue.

— Ne change pas de sujet, même si le prochain sujet est merveilleux.

Mai roula des yeux, elle se mit assise sur le lit avec difficulté, la douleur était vive comme un simple mal de ventre. Elle prit la main d'Alexander.

— Je suis vivant... J'ai juste vécu une sorte de bagarre. Dit-elle avec une voix douce et tendre.

— Ne te mets plus en danger... Et j'avais raison.

— Je sais comme toujours. Soupira Mai avec agacement.

Elle avait horreur d'avoir tort. Alexander reprit un sourire.

— Parle-moi de Chess.

— Je l'ai vu en rêve. J'ai rêvé de notre première rencontre. Il n'est pas perdu, il est tout près.

— Tu as son nom ? Parce que chercher Chess, c'est pas... C'est pas très intuitif.

— Spencer.

— Spencer comme ton collègue ? Genre le médecin qui a des problèmes de sociabilité ?

— Tout le monde a des problèmes de sociabilité.

— Pas moi.

Mai lâcha la main d'Alexander avec agacement. Il était vraiment qu'un con, mais il restait son ami.

— Et donc ? Tu vas lui expliquer comment s'il ne se souvient pas de toi ?

— Techniquement, il se souvient de tout... Il ne m'a juste pas reconnu.

— C'est vrai que ça change d'une boutonneuse.

— Eh, je t'emmerde. J'étais belle quand j'étais petite.

— Et tu l'es encore.

— Bof quoi, on dirait juste qu'un éléphant s'est chié dessus.

— Mai. Dit Alexander sévèrement.

— Je vais aller voir un psy.

— Je pense aussi que ça te fera du bien de parler à quelqu'un d'autre.

— Sans doute, mais je sais pas... Je me confie rarement à toi, alors si c'est pour me confier à une inconnue.

— Tu blablates pire qu'une de mes grand-mères. Je suis sûr que tu pourras parler de tes nombreux traumas.

— Touché.

Un médecin toqua et ouvrit la porte sans avoir la peine de regarder Mai.

— Vous pourrez sortir ce soir. Dit-il avant de repartir.

— Euh ? Je vais aller demander à un médecin si tu peux réellement sortir ce soir, je ne voudrais pas prendre le risque. Annonça Alexander.

Mai hocha la tête pour affirmer un oui, puis son ami s'en alla pour revenir cinq minutes après. Il resta debout devant la porte.

— Tu sors bien ce soir. Je viendrais te chercher après la fermeture de la bibliothèque.

— D'accord.

Cette fois-ci, il s'en alla pour ne pas revenir pendant un certain temps. Mai était de nouveau seule, elle ne s'attendait pas à un silence de mort, même si elle entendait quelques voix à l'extérieur de sa chambre. Elle s'affala sur le lit en espérant que la douleur s'en aille. Elle ne voulait pas dormir, elle avait trop peur de se souvenir de son attaque et de revoir le visage de son agresseur. Elle voulait aussi pleurer, mais aucune larme ne voulait descendre, étant bloquée par la colère. Elle se sentait en colère contre tout le monde parce que personne n'avait daigné la croire, après tout, ses théories avaient peu de sens...

***

     Elle n'avait pas de T-shirt propre, alors elle se retrouvait avec celui ensanglanté. Elle avait exactement les mêmes vêtements lors de son agression. Elle attendit Alexander dehors, même s'il commençait à faire froid. Il arriva seulement quelques minutes après. Il n'était pas en retard, mais pas à l'avance non plus. Alexander l'invita à rentrer, ce qu'elle fit. Sur la route, seule la radio tournée, personne n'osa discuter, puis ils s'arrêtèrent à un feu rouge. Alexander décida que c'était le bon moment.

— Tu veux rentrer chez toi ou venir chez moi ? Je ne veux pas que tu dormes seule en toute franchise.

— Faut que je récupère des vêtements chez moi, alors on passe chez moi et puis on va chez toi.

— Ça va aller pour y aller ? Tu sai-

— Je ne suis pas un enfant. Ça va aller.

— D'accord, mais si tu as besoin, je suis juste en bas.

Le feu rouge se transforma en vert.

***

     Mai était dans son appartement, sa vie de trois ans avait été déballée entièrement par les policiers et le FBI. Elle espérait simplement que certain secret n'avait pas été vu et entendu. Elle regarda la tache de sang sur le parquet, elle allait devoir mieux nettoyer avant de rendre l'appartement. Elle contourna la tâche et alla dans sa chambre récupérer une valise et mettre des vêtements. Elle espérait trouver un appartement rapidement, même si elle allait devenir paranoïaque pendant un certain temps. Elle ne savait plus en qui avoir confiance, un homme avait réussi à lui la prendre. C'est là qu'elle se mit à sangloter, c'était si dur à supporter cette situation. Elle ne savait même plus comment réagir. Elle se sentait dégoûtante et ridicule de pleurer ainsi, mais elle ne pouvait pas contrôler ses émotions, même si elle faisait tous les efforts possibles. Elle voulait juste que cette douleur physique et psychologique s'en aille...

Alexander, inquiet, ouvrit la porte pour découvrir Mai à terre en train d'essayer d'étouffer ses sanglots. Il ne réfléchit pas une seule seconde pour la serrer dans ses bras. Il était si en colère contre l'agresseur. Il voulait le tuer pour avoir fait du mal à la seule femme qu'il aimait de tout son cœur. Mai se sépara finalement de son ami pour respirer, même si quelques larmes l'empêchaient de respirer correctement.

— Tu vas devoir assister au procès. Je ne peux pas t'empêcher d'y aller.

— Je sais... J'irai témoigner.

— Je ne serai pas là.

— C'est à huis clos ?

— Oui.

— Et si mon témoignage est mauvais ?

— Aucun témoignage ne peut être mauvais.

Mai ne répondit pas, seule, son regard vide se baladait sur le sol.

— Sortons de l'enfer. Dit Alexander en aidant Mai à se relever.








.

𝐌𝐚𝐬𝐭𝐞𝐫𝐦𝐢𝐧𝐝 - 𝙎𝙥𝙚𝙣𝙘𝙚𝙧 𝙍𝙚𝙞𝙙 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant