Chapitre 1

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LUNA



J'allais rentrer en 3ème de fac en septembre. Autrement dit... dans 1 semaine. Ce que je pouvais vous dire c'est que j'avais hâte de commencer pour que l'année se termine le plus rapidement possible. Je n'étais pas du genre sociable, à donner ma confiance et à faire confiance aux autres. Mais j'aimais encore moins me retrouver seule dans des espaces publics, ouverts aux regards de tous. Je me sentais... vulnérable, comme si mes vêtements étaient transparents et que les personnes autour de moi me jugeaient. Je pouvais presque les entendre rire. Au fur et à mesure des années j'ai appris à ne plus y accorder d'importance. Ou du moins à faire semblant, en essayant de laisser rentrer le moins de pensées intrusives et psychotiques dans ma tête. Je savais que je n'étais pas le centre du monde, qu'ils ne se souciaient pas réellement de moi et de ma solitude. Mais c'était plus fort que moi... je ré entendais ces voix à chaque fois. Elles me paralysaient et me chuchotaient à l'oreille, en attendant que je craque.

Alors oui je n'étais pas du genre sociable, à vouloir faire la discussion ou écouter les autres me raconter leurs histoires. Mais il le fallait. Je devais me forcer. Il fallait que j'ai un entourage, pour me protéger, pour qu'ils puissent créer ma barrière de sécurité. Ils ne le savaient pas bien sûr. Je savais qu'ils me tourneraient le dos sinon, que personne ne voudrait me parler. Alors chaque personne qui venait vers moi, je les accueillais, du mieux que je pouvais. Je collais un grand sourire sur mon visage, que je ne quittait que très rarement quand le moment s'y prêtait. Et j'écoutais, je parlais, j'essayais de faire comme si cela m'intéressait, de poser des questions. Je voyais bien que des fois on me regardait bizarrement, comme s' ils se posaient se demander ce à quoi je pensais ou s'ils cherchaient à connaître mes réelles intentions. Je sais que je n'étais pas une très bonne comédienne... Mais je faisais ce que je pouvais et ça marchait. Je n'avais pas un très grand entourage, mais suffisamment conséquent pour que je ne me retrouve pas seule, en dehors de chez moi.

Mon chez moi... J'habite seule, depuis maintenant 2 ans. Et j'entame ma troisième année. Je remercie le ciel d'avoir pu trouver une fac qui n'était pas dans la même ville que ma mère et qui me permit d'avoir un petit studio, rien qu'à moi.

Avant cela, je vivais chez ma mère, avec ma sœur. Je me suis toujours plutôt bien entendu avec ma mère. Enfin, ce qu'il faut pour entretenir une bonne relation. Mais dès l'adolescence je m'y suis sentie... mal à l'aise. Non pas que cela vienne d'une mésentente entre nous, mais je pense plutôt que j'ai simplement commencé à ressentir ce besoin d'être seule, comme si j'étouffais. Et avec ma sœur en troisième colocataire... ça faisait beaucoup. Avec ma sœur ça a toujours été compliqué. Elle est plus petite, de 2 ans de moins, elle s'appelle Suzy. Je ne sais pas pourquoi mais d'aussi loin que je me souvienne, on s'est toujours disputées. Les phases où on pouvait s'entendre et correctement cohabiter étaient courtes et irrégulières. Rien à voir avec les sentiments. Oui quand j'étais plus petite j'ai pu être jalouse, extrêmement.

C'est mon parfait opposé. Elle a plein d'amis, les personnes autour d'elle l'aiment sincèrement. Elle va facilement vers les autres et je l'enviais pour ça. Pour donner sa confiance, si facilement, sans avoir peur qu'ils la lui brisent. Alors oui quand j'étais plus jeune c'était de la jalousie et de la colère que je ressentais. Avec le temps et l'âge j'ai compris que je l'enviais et que je l'admirais. Mais il était trop tard pour réparer toutes ces années de colère et de jalousie. Alors j'appris à simplement l'ignorer, en espérant qu'elle ne remarque pas dans mes yeux et le ton de ma voix la culpabilité et la peine que je pouvais ressentir de ne pas avoir su être comme elle. Et je ne me sentais pas capable de changer cela, j'ai été trop... détruite. Je ne pouvais pas aussi changer cela, ça m'est interdit. 
Mais je l'aime du plus profond de mon cœur et ça j'espérais qu'elle le voit, qu'elle le ressente, sans que je n'ai à lui dire. Devoir l'exprimer à voix haute avec des mots était trop dure.

Quoi qu'il en soit, j'ai maintenant mon chez moi. Il m'arrive bien entendu de retourner chez ma mère de temps en temps. Mais ce n'est pas régulier. Les semaines de fac sont chargées et je suis tous les jours coincée dans des lieux publics. Ironique non ? Coincée... dans des endroits avec une porte de sortie constamment ouverte ou mieux... des endroits sans porte, ni mur. Mais coincée. Coincée par ces regards, ces chuchotements, ces rires. Je n'arrivais jamais à discerner aucunes paroles mais c'était sûr pour moi, elles me visaient. Car elles sonnaient la même tonalité que leurs voix.
Alors les week-ends c'était les moments où je pouvais de nouveau respirer, reprendre des énergies, pleurer les larmes que j'avais pu retenir la semaine. Les week-ends me permettaient d'être seule, laissant mes pensées accaparer tout mon esprit, laissant mon imaginaire choisir quelle vie j'aurais pu avoir. Trouver un autre corps, une autre personne pour remplacer la personne que je suis. Je me détestais. Et ne pas être à la vue de tous me permettait de gérer ma propre haine sans penser à celle que les autres pouvait avoir à mon égard.

- - - - - - -

Comme je reprends les cours dans une semaine, il faut que je reprenne contact avec mes « amis » de la fac. Alors je devais accepter l'invitation de Marie à sortir ce soir... en boîte. Ah les boîtes de nuit... Elles portaient bien leur nom... boîte. Un espace fermé, de tous les côtés. Emprisonnant des centaines de personnes, tellement nombreuses qu'on devait se coller les uns aux autres. Je frissonnais de dégoût rien qu'en y pensant.

Marie c'est le genre de fille un peu populaire qui arrive à bien s'entendre avec tout le monde. Elle sait faire la discussion et sait tout de suite quoi dire avec les personnes en face d'elle. Je ne me sens pas mal à l'aise avec Marie, elle a toujours su faire la discussion et se contentait d'une ou deux phrases de ma part pour alimenter son discours.

<< - Juste pour être sûr que je ne parle pas à un mur. Toi aussi, t'aimes bien les citrons ?

- Mmhh j'aime bien quand c'est à faible dose dans un plat ou un dessert. Mais n'essaie même pas de m'en faire manger un tout seul. Lui répondis-je avec un petit sourire au coin des lèvres.

- Je suis sûr que si je te proposais un tequila paf tu ne diras pas non. Ria Marie. >>


Je n'ai pas non plus besoin de forcer un sourire ou un rire sur mon visage. De toute façon elle le remarquera immédiatement. Elle a très rapidement cerné comment je fonctionnais et l'a accepté. Ça lui arrive de poser des questions pour savoir pourquoi je suis comme ça mais je n'y réponds jamais. Alors elle reprend une nouvelle discussion.

J'étais réellement contente d'avoir pu croiser son chemin à la rentrée en première année de fac. Elle s'est mise à côté de moi à l'amphithéâtre et s'est tout de suite mise à me parler. Un vrai moulin à paroles.

Je ne lui faisais bien évidemment pas confiance mais je suis heureuse de sa présence à mes côtés.

Elle m'avait d'ailleurs tané tout l'été pour que je sorte avec elle et son groupe. Chose que j'ai accepté une fois parce que c'était une sortie à la plage et que je rêvais de mettre mes pieds  dans l'eau froide et salée et de bronzer sur le sable. J'avais d'ailleurs réussi à me mettre entre plusieurs personnes du groupe de telle sorte que je sois « protégée » du regard des autres.

Pour le reste de l'été elle venait chez moi ou inversement. Mais seulement quand on était toutes les deux ou avec Anaïs.

Anaïs avait rejoint notre petit duo 2 semaines après le début des cours. On devait faire des groupes de trois en TD d'histoire et Marie accourut vers Anaïs qui était seule.

Pour ce soir, ça faisait deux jours que Marie me harcelait.

<< - Alleeeez faut vraiment que tu viennes meuf !!! Cria-t-elle dans mes oreilles.

- Oui oui. Je vais voir. Lui répétais-je pour la septième fois de la journée.

- À la rentrée sinon tout le monde t'aura oublié. Dit-elle d'un ton un peu trop joyeux à mon goût.

"Oublié"... ils vont m'oublier. Je n'aurai plus personne. Je vais être seule.

- ... C'est bon t'as gagné je viens ! Mettant un air dramatique dans ma voix. >>

Amour tueurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant