Marnie

Wanderlust

On est tous assis en cercle sur le sol. C'est le début de l'été, les couleurs de la forêt m'agressent presque les yeux. J'aime assez le décors. La discussion va de bon train, on parle de tout et de rien. Je me contente majoritairement d'observer Céleste, sans gène.
Elle n'est pas très grande, peut-être dans les 1m60-65, et n'a pas l'air de peser bien lourd. Ses cheveux lui arrivent à la taille, et sont d'un gris qui me laisse admirative. Ses yeux le sont tout autant, à la fois voilés et brillants, mais puissants. Sa peau est plus rosée que la plupart d'entre-nous, ce qui m'étonne pour une fille habitant en Angleterre. Ses sourcils sont droits, ses lèvres rose pâle. Elle ne sourit pas énormément et ne semble pas excessivement à l'aise. Elle est belle. Je peux sans sourciller dire qu'elle et Alex sont les deux plus belles personnes que j'ai rencontré à ce jour.
Mon ventre gargouille et me brûle, je regarde mon portable, 12h.
Max sort un sandwich qui me semble être au chorizo et au fromage, ce qui me file un haut le coeur.

« - Okay, time to eat ! » Lance June tout en sortant un sandwich que je pense être poulet mayonnaise. Omg j'ai pas de chance ou quoi ? Y'en a sérieusement aucun qui a pris une salade ? Aaron fouille dans son sac. S'il vous plaît, au moins un morceau de tomate je sais pas quoiii.

Jambon beurre, je vais mourir.
June m'observe tout en croquant à pleine dents dans son sandwich.

« - Bah tu manches pas ? » Me demande-t-elle la bouche pleine.

« - Et bien si une certaine rousse m'avait mise au courant que l'on allait pique-niquer, j'aurai pris de quoi me nourrir. » Je raille.

Elle a soudainement un air coupable, et avale avec difficulté son bout de bouffe.

« - Mince ! Je suis vraiment désolée, j'ai complètement zappé de te le dire, je crains de fou putain ... »

Elle a vraiment l'air mal, alors je ris pour calmer l'ambiance, tout les regards posés sur moi.

« - T'en fais pas miss, j'peux survivre sans manger un midi ! »

Je me tourne et aperçois Céleste dessiner. Elle sourit.
Je bloque, et l'observe. Okay miss, t'es belle de partout. Il faut que je la dessine, c'est décider.
June suit mon regard et l'interpelle. Je m'approche pour voir, putain elle est douée. Ca me pète les yeux. On est tous présent dessus. Les expressions m'impressionnent. Le trait est précis, et je réalise qu'elle a exactement cerné toutes les personnes présentent, comme si elle avait lu en eux. La naiveté quelque peut exaspérante de Wendy, la gentillesse d'Aaron, l'audace de Max et le naturel de June. Etrangement, on dirait qu'elle a eu du mal à me refaire. Mon expression est quelque peu perdue dans le vague. Comment ça se fait ? Je ris intérieurement. Elle n'aurait pas réussit à me cerner ? Interressant. Nous sommes donc dans la même perplexité Céleste.
En tout cas, elles aime dessiner, et ça se voit. Ce qui nous fait donc un point commun.
« -Tu sais, j'pense qu'à partir du moment où tu aimes faire quelque chose, les autres le sentent. On sent que tu aimes dessiner, ton dessin stimule l'imagination. » Je sors sans m'en rendre compte. Elle lève ses yeux étoilés vers moi, un éclair de surprise apparaît et repart immédiatement.
Puis j'ai pas compris, Wendy a fait une tête bizarre, et s'est barrée puis tête argentée s'est levée et puis la suivit.
Je commence à partir pour les suivre mais Aaron m'arrête d'une main sur l'épaule.
« - Laisse, n'y va pas. »
Eeeeeuh. Je crois pas non. 1) On ne me donne pas d'ordre, 2) On ne me touche pas.
Je me dégage un peu trop violemment je crois.
« - J'aime tout ce m'est interdis, dommage. » Je coupe sèche, tout en suivant les filles discrètement.
Wendy est en train balbutier un truc du genre « j'ai aucun talent » ou des conneries dans le genre, oula, les gamins qui braillent, c'pas mon délire. Je recule et grimace un peu. Je suis pas sans coeur, ça me dérange de la voir pleurer, bien sur. Mais ça me met tellement mal à l'aise de voir les gens dans cet état. Faible est le seul mot qui me vient, et je me hais pour ça. Je crois que j'aimais aider les gens avant. Je suis plus sûre.
Céleste a l'air d'avoir la situation en main.

« - C'est ridicule. Pourquoi tu veux sans arrêt faire mieux que les autres ? Tu décides pas de faire quelque chose dans le but d'attirer l'attention des autres et d'être douée comme tu dis. Tu décides de faire quelque chose parce que tu en as envie, parce que ça te plait et tu sens que ça apportes quelque chose à ta vie. Pas parce que tu veux une pseudo-célébrité et des amis en cartons. T'as pas besoin de ça, je suis sûre que t'as d'autres atouts. » Lui lance-t-elle soudainement d'une froideur à geler la mer.

Wendy est perplexe, et j'ai une forte envie de me jeter sur Céleste pour qu'on fasse un high-five parce que c'était putain de classe et qu'elle me plaît de plus en plus.
Wendy lui sort un truc :
« - Un jour je serai aussi cool que toi Cécé ! »
Avec une pose bien kawaii-desu-chan ridicule et je hurle de rire intérieurement. Ridiculement adorable.

Céleste sourit, tandis que l'autre naive court rejoindre Aaron.
L'étoile nous rejoins et nous demande si on est pret à voir un truc qui va changer nous vies, avant de se mettre à courir comme une folle.
Je soupire, sérieux ?
On est tous là, à la suivre, les branches nous frappent, on manque de se ramasser la gueule à chaque pas.
Je débouche après tous les autres au bord d'une falaise, offrant la bouche pour dire à Céleste ce que je pense de me faire courir, moi, sans que j'ai eu un minimum de préparation. Le paysage me marquera à jamais je pense. Un mélange de orange, rose, violet, bleu et noir me saute aux yeux, m'aspirant. Autant de pastel que de flash, je me sens perdue.
Et puis Max lâche pour la première fois son joint, pour gueuler un :
« PUTAIN C'EST BEAU ! » Parlant pour tous.
Wendy, pourtant si discrète, hurle :
« - JE SUIS UNE PLEURNICHADE ET JE L'ASSUME ! »
La situation est plutôt gênante, mais à ce point on en a tous rien à battre. Alors on se met tous à gueuler des trucs qui finissent par devenir incompréhensibles. Ma gorge me brûle mais je m'en fou, bordel, vie.
La lune prend place, et on se regarde tous, dans les dernières lumières du jour.
La faiblarde pleure, pas nouveau, elle sort un truc du genre « Je suis tellement heureuse d'avoir des amis comme vous ». J'écarquille les yeux, en me rendant compte que, ouais, ce sont mes amis.
On s'observe tous, et je croise le regard de Céleste. Ses lèvres s'étirent. Elle se tient devant moi, la Lune s'installant derrière elle. Elle brille d'une aura mystérieuse. Elle a l'air heureuse pour la première fois.
Alors je souris, et puis je ris. Tout ceci est mystérieusement beau. Et je me sens bien, pour la première fois, sans être avec Alex. Cette fille n'est donc pas un bloc de glace, et ces gens ne sont pas des enculés.
Putain, ça fait du bien.
On va vivre des putains de trucs tout les six. J'en suis aussi certaine que les sirènes existent.