Décembre 1805
Mr Hunter McAdam peinait à fermer les yeux et à s'endormir à cause des bruits intempestifs qui régnaient en bas. Que faisaient donc ces esclaves à minuit passée?!
En colère Mr McAdam décida d'aller voir ce qu'il s'y tramait et de mettre un terme au boucan qui faisait presque vibrer les murs. Les Nègres avaient de la chance, son père, Bruce McAdam, le propriétaire de la plantation, n'était pas là. Il était en sorti ces derniers temps avec sa femme, Ludmila. Sûrement pour acheter de nouveaux esclaves, car dans sa grande plantation au Mississippi il manquait de main-d'oeuvre. Si son père avait été là, il les aurait probablement fouetté jusqu'au sang et les aurait privé de nourriture pendant deux jours consécutifs. Mais Hunter n'était ni comme son père, ni comme sa mère et ni comme ses frères. Il était le dernier d'une fratrie de quatorze enfants. Tous avait été éduqués à voir les Noirs d'une mauvaise manière et à les mépriser. Lui n'était pas comme ça. Il n'était pas de ces personnes qui jugeaient sur un statu social, une couleur de peau, une religion. Les différences importaient peu pour lui. Ce qui comptait c'étaient l'âme et le coeur de la personne. Malheureusement ses pensées étaient trop progressistes pour l'instant, et s'il venait à les exprimer au grand jour, il serait probablement banni de sa famille. Quel honte pour les McAdam ! Eux qui étaient si respectés dans les contrées du Sud et qui étaient connus comme les plus gros exploiteurs d'esclaves...
Le jeune Hunter se leva péniblement de son lit. Il était épuisé de sa journée, il avait fini de traiter tous les papiers de comptabilité de son père avant son retour, comme il le lui avait exigé. Après cela il avait dû faire le recencement de tous les esclaves de la plantation, pour la énième fois. Par chance il n'en manquait aucun. Le jeune brun détestait faire cela. Il se sentait indirectement responsable de leur sort. Il est vrai après tout. Il aurait très bien pu leur donner leur liberté,là, sur le champ, profitant de l'absence de ses parents. Mais il ne fit rien, comme d'habitude. Pourquoi ? Il ne savait point. Peut-être à cause de la peur d'être rejeté de tous. Chaque jour il se détestait davantage de ne pas agir. Qu'il pouvait être faible par moment ! Il détestait voir ces esclaves le regarder avec haine, avec peur, ou voir les femmes le supplier de les faire partir avec leurs progénitures. Les yeux des enfants étaient encore emplis d'espoir et d'amour, mais comme tous les autres ils finiraient par sombrer et devenir l'ombre d'eux-mêmes.
Après sa longue journée, Hunter s'était enfin autorisé quelques heures de répit. Accompagné de son acolyte Steven, ils étaient partis faire une tournée des bars de la ville. Il avait entre temps flirter, danser avec de nombreuses dames de compagnie. Alcoolisé il avait sûrement dû passer la moitié de la nuit avec l'une d'entre elles. Heureusement, Steven l'avait retrouvé décoiffé, à moité déshabillé et avec de la salive sur le coin de la bouche et l'avait ramené de force dans sa demeure. Ce comportement de libertin était l'opposé de ce que les McAdam considéraient comme convenable. Mais pour Hunter c'était une manière d'exister par lui-même et de s'adonner aux plaisirs et à la jouissance de la jeunesse qui lui étaient restreints.
En se levant, Hunter remarqua que malgré le repos, son mal de crâne dû à l'alcool persistait. Sa tête tournait encore et il avait l'étrange sensation de tituber à nouveau. Le bruit que faisaient les esclaves avaient augmenté d'un cran. On en entendait fouiller dans les placards, d'autres parler fort, mais il ne comprenait pas ce qu'il se disait.
Hunter enfila son peignoir beige et glissa ses pieds frigorifiés dans ses chaussons. Une chandelle à la main, il descendit les escaliers.
Non loin de là, près de la cuisine, un groupe de Nègres :hommes, femmes et enfants étaient agglutinés autour de quelque chose ou plutôt de quelqu'un. De là, il entendait une personne geindre au milieu de tous les autres. Tant bien que mal, il tentait de la repérer sous cette masse d'esclaves. Ils devaient être une bonne vingtaine dans cette maison mais aucun ne se retourna vers lui, ils devaient être réellement occupés pour ne pas l'avoir entendu. Mais malheureusement, il ne la trouva pas. Où pouvait-elle bien être ? En général elle ne ratait aucune occasion pour le voir, se glisser sous son lit et passer du temps avec lui. Mais récemment elle n'était même pas venue à sa rencontre. Elle ne l'avait même pas demandé. Avait-elle rencontré un autre homme ? Un homme de son statut avec qui vivre l'amour et concevoir des enfants ne sera pas interdit. Cette pensée à peine rentrée dans sa tête commençait déjà à s'emparer de son esprit, à l'envahir. Cette idée, l'idée que celle qu'il aime plus que tout au monde en aime un autre le répugnait. Un haut-le-coeur vint subitement. Sa tête recommençait à lui faire mal. Comme si des millions de tambours venaient y jouer un concert. Il sentait que s'il restait encore longtemps debout, l'alcool aurait raison de lui : il finirait par s'évanouir. Mais il devait impérativement s'occuper du problème nommé esclave.
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Under the Arizona Sun
Historical Fiction" J'étais battu, j'étais utilisé comme une bête sauvage. On m'appelait Sheitan. Ni Blanc ni Noir, un pauvre mulâtre selon les autres" Esclave métis vendu à une riche famille blanche au Mississippi, Konan est arraché au bras de sa mère, car un mulâtr...