EVERYTHING I WANTED

Chapitre 3

Malgré le fait que ma première heure de cours du lundi soit avec les mêmes secondes contre qui je me suis énervé intérieurement en corrigeant leurs copies ce week-end, ils n'ont pas ruiné ma bonne humeur du début de semaine. Heureusement pour eux, j'estime que j'ai déjà été trop gentil avec eux ce matin en leur laissant une seconde chance.

Bien que je sois de bonne humeur, quelque chose me ronge intérieurement, je sais que cette journée va marquer un nouveau tournant pour elle, si j'arrive à la faire parler un peu plus que les autres fois.

J'ai cours avec la classe de Lacy en début d'après-midi pendant deux heures, je compte bien ne pas la laisser s'échapper de ma salle de classe aussi facilement que d'habitude.

Cette fois-ci tant pis si elle me déteste.

A moins qu'elle me déteste déjà ?

Peu importe, mon but n'est pas d'être apprécié, sa vie est plus importante qu'une histoire d'ego.

Il me reste quelques minutes avant le début des cours de l'après-midi. Alors que je marche en direction de la salle de repos pour imprimer quelques copies pour la classe de Lacy, je percute quelqu'un. Une jeune femme au cheveux de jais.

Vanessa.

- Tu sais Gabriel si tu veux mon attention il y a d'autres moyens pour faire passer le message.
Mais je ne t'en veux pas, après notre session de covoiturage vendredi je peux comprendre que tu veux être plus brusque...

Avant qu'elle ne puisse finir sa phrase je l'entraine dans la salle de repos, heureusement pour nous aucun collègue n'est encore dedans, étonnant vu l'heure, généralement c'est un peu comme l'heure de pointe à cette heure ci. Je sais que ce calme ne va pas durer je dois saisir le moment pour lui parler.

Avant que je puisse lui exprimer mon ressenti face à sa réplique, et Vanessa faire une quelconque allusion sur la situation, un collègue de français entre, Mr Clark. D'une certaine façon je suis content qu'il soit arrivé pile à ce moment là mais j'aurai aimé qu'on discute avec Vanessa, nous en avons besoin.

- Vanessa, on aura une vraie conversation un autre jour.

- Une conversation comme dans le bon vieux temps ?

Elle avait susurré à mon oreille cette dernière phrase pour que Mr Clark n'entende pas, à vrai dire elle aurait pu la dire à voix haute car vu son âge avancé son audition défaille.

Pardon Mr Clark pour cette pensée, je vous adore.

- A plus tard, Vanessa.

J'avais insisté sur cette phrase.

Si personne n'était présent dans la salle elle se serait permise de faire une scène, je l'ai aperçu dans ses iris foncées, personne ne veut connaître une jeune femme comme elle en colère.

Si ses yeux avaient été des mitraillettes, mon cerveau aurait déjà giclé sur le mur derrière moi depuis de bonnes minutes.

J'adore Vanessa, et une part de moi l'admire car c'est une jeune femme déterminée qui ne se laisse pas marcher dessus mais elle a un caractère bien trempé, dur à supporter.

Plusieurs autres enseignants débarquent dans la salle, sans savoir qu'ils ont évité une tragédie.

Vanessa part en trombe de la salle de repos, plusieurs regards interrogateurs se tournent vers moi, comme seule réponse je hausse les épaules. Ils n'ont pas besoin de savoir notre ancienne vie privée entre elle et moi.

Je plains les élèves qui vont l'avoir dans quelques minutes en cours, elle risque d'être désagréable avec le ou la première qui fait quelque chose qu'elle ne supporte pas.

Il y a quelques mois je l'aurai raisonné pour qu'elle ne soit pas infâme avec les élèves, désormais ce n'est plus mon problème, puis elle ne m'écoutera pas, je n'ai plus une place importante dans sa vie.

Je ne suis plus son petit ami.

˚₊‧꒰ა ☆ ໒꒱ ‧₊˚

- Avant que vous ne partiez comme des sauvages de ma salle de cours je vais vous demander de finir les exercices que nous avons commencé en cours pour demain. Passez une bonne fin de journée et à demain.

Elle a pris le temps de noter les devoirs. Elle n'est donc pas la première à sortir.

Les astres doivent être alignés.

En attendant qu'elle finisse de ranger son agenda et sa trousse, je range mon bureau. Pourquoi je le range alors qu'il est déjà organisé parfaitement ? Je stresse.

- Lacy, j'ai besoin de te parler, s'il te plaît.

Je ne lui laisse pas le temps de me raconter un mensonge que j'enchaîne.

-Je sais que tu n'as pas cours après moi alors je vais te demander quelque chose, je ne te laisse pas le choix. Écris une lettre où tu expliques ce qui ne va pas. Tu as jusqu'à la fin des cours pour le faire et la donner à un adulte en qui tu as confiance. Si jamais je suis cet adulte de confiance, je t'attendrai dans ma salle, jusqu'à la fin.

Je lui ai tendu mon auriculaire pour une promesse, elle a scellé notre promesse en récitant :

- Croix de bois, croix de fer, si je mens, je vais en enfer.

J'ai dû sourire comme un idiot face à sa réplique, je ne m'attendais pas à ce qu'elle me suive dans cette promesse, du moins pas aussi facilement.

Les astres sont définitivement alignés.

- Allez file écrire.

Elle ne s'est pas fait prier plus longtemps pour partir. J'ai vu ses longues boucles brunes et définies virevolter dans les airs, s'éloignant de moi.

Pourquoi ma vision s'est-elle brouillée ? J'ai du mal à percevoir correctement sa silhouette.

Ce n'est rien de grave.

Effectivement ce n'était rien de grave, ma vision est revenue à la normale. Sûrement une poussière. 

Enfin, je lui fais confiance, je suis persuadé qu'elle écrira cette lettre et qu'elle l'a donnera. Quelque chose me dit que l'adulte vers qui elle va se tourner n'est d'autre que moi.

Mon intuition me dit que je ne me trompe pas, j'ai peur, peur de découvrir la vérité, peur qu'il soit trop tard.

Et si je n'arrive pas à la sauver ?

Je dois chasser cette pensée et rester optimiste.

Je me suis mis a faire les cents pas dans ma salle de cours pour essayer de calmer mes angoisses, j'ai définitivement besoin de Flynn.

Il faut que je trouve une occupation le temps que Lacy revienne, si c'est moi qu'elle a choisi.

J'espère avoir fait les choses biens et que je vais continuer à les faire. J'espère aussi de pas l'avoir trop brusquée, mais je devais la faire réagir d'une manière ou d'une autre, le plus vite possible.

J'ai choisi de la faire écrire car j'ai remarqué qu'elle souffrait d'une certaine forme de mutisme pour son mal être, comme beaucoup trop d'enfants.

Depuis toute à l'heure je pense qu'elle me choisira mais au fond je me suis préparé à l'éventualité qu'elle se confie plutôt à une collègue femme, je comprends totalement ce choix et je ne lui en voudrais pas.

Une partie de moi sera jaloux de ne pas pouvoir l'aider.

Je n'ai pas vu qu'une heure était déjà passée, j'ai passé l'heure à ruminer et à faire les cents pas.

On toque à ma porte.

On dirait que quelqu'un a eu pitié de moi et est venu à mon secours pour que je ne ressasse pas toutes les options possibles et inimaginables de la situation de Lacy.

En ouvrant la porte pour découvrir qui se cache derrière cette dernière, je suis accueilli par une tête baissée et des bras qui me tendent une feuille de papier.

Je reconnaîtrai ces boucles brunes parmi des centaines.

Elle est revenue.

                            Tic. Tac. Tic. Tac.