Chapitre 4A - Kiera -

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 Je me rapproche de la voiture de mon second, et m'accoude contre la portière.

— Je monte avec ton frère.

— Es-tu sûre ? Vous n'allez pas vous écharper ?

— Ça va aller, nous nous retrouvons chez toi.

Il hoche la tête avant de démarrer. Je recule, puis file jusqu'à la berline de Cristobal. Je m'installe à ses côtés sans un mot, puis nous nous mettons en route. Le silence remplit l'habitacle. Mes doigts jouent avec le médaillon qui m'a aidé à ouvrir le coffret. Je l'ai depuis que je suis adolescente, je l'ai trouvé lorsque nous jouions dans les ruines avec Nelli et Cris. Je me souviens être tombée et m'être coupée sur l'un des rebords. J'ai même gardé une petite marque. Il m'a tout de suite interpellé, je le trouvais beau avec l'aigle dessiné dessus. Je savais que c'était lié aux anciens dieux et je n'ai pas pu m'en défaire.

Je soupire en lâchant le pendentif avant de me décider à ouvrir la bouche. Je ne suis pas à l'aise avec l'expression de mes sentiments, mais je ne peux pas rester sans comprendre.

— Tout à l'heure, commencé-je.

— Tu veux vraiment lancer ce sujet ?

— Parce que je ne devrais pas réagir ?

Un nouveau blanc entre nous, je dirai même qu'un ange passe. Je vois que cela ne servait à rien de monter avec lui. Il m'énerve lorsqu'il agit ainsi ! Et Cris a parfaitement conscience que cela m'agace. J'ai envie de le baffer, mais ce serait nous tuer. Je n'ai pas envie de mourir, alors je ne bouge pas. Je ronge mon frein une nouvelle fois.

Nous arrivons chez Itiota dans un silence de plomb. Je sors et claque la portière, il sourit.

Saleté de mec !

Je secoue la tête, puis retrouve la famille Collazo à l'intérieur. C'est un vrai brouhaha, je vais avoir besoin de quelques minutes pour que mes oreilles s'accoutument à l'ambiance. Je suis tellement habituée au silence que c'est toujours un peu déroutant la première soirée.

— Kiera ! s'exclame Ignacio en me serrant dans ses bras.

Je n'ai pas eu le temps de réagir que je me retrouve prise en sandwich entre les deux autres hommes de la famille Collazo. Si je suis tendue au départ, cela change vite. Jacobo et Ignacio sont deux grands nounours. Leurs cheveux bruns et leurs iris noirs sont un peu effrayants quand on ne les connaît pas, mais ils sont adorables. Ignacio est avec une petite brune Maria, quant à Jacobo sa compagne est blonde. Il me la présente, je crois qu'elle s'appelle Nine, mais je n'en suis pas certaine.

Les copines des Collazo ne m'ont jamais aimé, alors je ne me formalise pas lorsqu'elles me jettent des regards hostiles. Si ça ne marche pas, elles disparaîtront du paysage comme si elles n'avaient jamais existé, mais pas moi. Je suis une Collazo de cœur.

— Alors ces fouilles ? demande Ignacio.

— Il paraît que ça a déjà mal commencé, ricane Jacobo.

— Oui, c'est ça, moquez-vous !

Je grimace en repensant à ce mercenaire.

— Je vais devoir embaucher des mecs supplémentaires.

— Pourquoi ? questionne Jacobo avec intérêt.

— Le mec qui était présent.

— Jace Eaton, reprend Nelli en riant. Il n'a pas percuté que Kiera comprenait parfaitement ce qu'il disait. Cris a dû l'empêcher de poignarder le gars qui a proposé de nous exécuter.

Ignacio blêmit.

— Quoi ! Il a menacé de vous tuer ?

— Ils se parlaient en javanais et pensaient que nous ne comprenions pas.

— Ce qui est le cas, confirme Nelli, enfin pour Cris et moi.

L'intéressé hoche la tête, mais ne prononce toujours pas un mot. Ignacio, lui fulmine, il sort son téléphone, puis se met à passer des coups de fil. Je reste interdite parce qu'il pète littéralement un plomb. Je le montre du doigt à Nelli qui soulève les épaules comme si je ne devais pas y prêter attention, mais ça va être difficile. Surtout quand je l'entends demander à plusieurs de ses interlocuteurs de venir armés jusqu'aux dents.

Ça prend des proportions beaucoup trop grandes !

J'essaie de le calmer, mais il ne veut rien entendre. Nous mettons la table et mangeons tous ensemble. Bien entendu, Ignacio n'a pas démordu, selon lui ce n'était pas à prendre à la légère. C'est comme ça que je me retrouve avec deux HK 9mm dans les mains. Je n'en reviens pas qu'il dramatise autant.

— Ignacio...

— Tu fais ce que nous te disons. Ici, tu es sous notre protection.

Je lui souris sans ajouter un seul mot. Je le connais depuis suffisamment longtemps pour savoir que cela ne sert à rien. J'apprécie qu'il s'inquiète, ça me réchauffe le coeur, mais c'est excessif.

Le repas continue, Cris me jette des coups d'œil, mais il ne m'adresse pas la parole. J'essaie quant à moi de faire abstraction de son existence.

Je sens la fatigue pointer le bout de son nez.

— Dès demain, tu ne sors pas sans eux, reprend Ignacio d'une voix sans appel. Et tu ne sors pas sans escorte !

— Quoi !

— C'est non négociable ! Ou je peux t'assurer que tu ne trouveras plus d'ouvriers dans la région.

La stupeur s'inscrit sur mes traits, ma bouche s'ouvre en grand. Il sait parfaitement que mes recherches sont tout ce qu'il y a de plus important pour moi et il s'en sert. Je grommelle des insanités avant d'accepter.

De toute façon, je n'ai pas le choix !

Je remercie Itiota de son accueil et souhaite une agréable nuit à tout le monde. Je file dans ma chambre qui est au fond. Une bonne douche me fera le plus grand bien. J'ai besoin de me laver et de m'apaiser. Cela est efficace jusqu'à ce que je trouve Cristobal assis sur le bout de mon lit. Ma serviette est bien autour de mon corps me cachant à sa vue.

— Qu'est-ce que tu fous ici ? questionné-je en croisant les bras sur ma poitrine.

Il ne prononce pas un son, puis se lève et s'approche. Je ne peux pas reculer, le mur derrière moi m'en empêche. Ses iris me scrutent avec une intensité incroyable, puis contre toute logique sa bouche capture la mienne. Ce baiser est tendre tout en étant passionné. Je tente de résister, jusqu'à ce que mes bras l'enlacent. Il rompt notre étreinte, il est à bout de souffle. Sa déglutition est difficile, quant à moi, mon coeur bat à tout rompre dans ma poitrine. Je n'avais jamais envisagé qu'il puisse effectuer un tel geste un jour.

Sans attendre, il quitte ma chambre, me laissant comme une idiote sans comprendre ce qui vient d'arriver. 

Le coeur de Téotl - Romance Interactive -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant