Pour me connecter à ton cœur

Chapitre 3

Le manager, qui avait retiré sa cravate et déboutonné les premiers boutons de sa chemise, avait brusquement ouvert la porte de l'open si bien qu'elle se referma directement sur les autres membres de l'équipe. Ceux-là le suivait tel des petits canards derrière leur maman. Il semblait même que Jun se soit pris la porte dans le visage à en juger par sa main qui s'attrapait le nez.

"Gab ! Pour qui te prends-tu ? Je me lève tous les jours en faisant mon maximum pour que nous fassions un travail efficace et voilà ce que fais ? Tu crois que la directrice Yoon est à ton niveau ? Je te le redemande: Pour qui te prends-tu ? Aigo... On me donne une équipe de paresseux à qui je dois constamment mettre des coups de pied aux fesses pour qu'ils fassent leur travail mais maintenant, en plus d'être paresseux, ils se permettent de me créer des problèmes avec la direction. Yi-Seok ! Donne moi un mouchoir." 

Le plus petit des employés se mit à l'action et lui donna un mouchoir propre que le manager tapota contre son visage transpirant et son crâne dégarni. Sa respiration était forte et le mouchoir fût si vite trempé que le petit Yi-Seok lui en donna plusieurs. Kang s'assit sur sa chaise mais cette infime pause lui permit de repartir plus fort encore. 

"Après tout ce que j'ai fait pour toi Gab ? Voila comment tu me remercie ? Tu n'avais pas diplômes mais je t'ai quand même fait confiance !" Toutes ces phrases étaient bien sûr ponctuées de jurons que le manager n'arrivait pas à retenir.

Le manager continuait son monologue pendant que Gab serrait le poing. Lui, paresseux ? Alors qu'il n'avait jamais compté ses heures supplémentaires et qu'il ne rechignait jamais à effectuer les tâches que personne ne voulait faire ? Et quelle est cette histoire de confiance ? Gab avait été recruté car J.T venait de développer une branche internationale avec des employés qui parlaient anglais. Ces derniers étaient bien contents d'avoir quelqu'un qui sache répondre aux demandes sans avoir à leur demander de répéter plusieurs fois. De plus, dès le premier jour, Kang s'était moqué de Gab en lui disant qu'il ne tiendrait pas très longtemps avec sa tête de premier de la classe. Finalement, et toujours avec une voix extrêmement forte, il indiqua au jeune informaticien de prendre ses affaires et de rentrer chez lui en attendant sa sanction. Le jeune homme prit donc son sac et ne put s'empêcher de croiser le regard triste de Julia. Il lui répondit avec un petit sourire forcé et se mit à s'en vouloir d'avoir voulu éviter sa formation. En jetant un coup d'œil rapide à l'open space, il se rendit compte que tout le monde était retourné à son poste et faisait mine de n'avoir rien vu. Gab sortit donc du plateau, la tête baissée, et commença à marcher dans les couloirs pour rejoindre la sortie.

Comme le service informatique était situé au rez-de-chaussée, il arriva rapidement devant le bureau de l'accueil où Ha-Yoon était assise, son badge posé près du clavier de l'ordinateur. Sa queue-de-cheval et sa paire de lunettes rondes étaient connues de tous les employés. Bien plus connues que son nom d'ailleurs.

Malgré sa concentration, la jeune femme remarqua tout de même l'arrivée de Gab et lui fit un signe de la main.

"Hello l'American boy ! T'as pas l'air dans ton assiette..."

Ha-Yoon était la seule avec qui Gab allait déjeuner de temps en temps. Ils étaient arrivés le même jour, les deux parlaient anglais et s'étaient retrouvés confrontés plus ou moins aux mêmes problématiques. Quand un problème avait lieu sur l'ordinateur, on courrait voir Gab et quand un problème survenait dans le bâtiment, on courrait voir Ha-Yoon. Lumière qui clignote, robinet qui fuit ou badge retrouvé à la machine à café, c'était son quotidien. Le courant était donc passé plutôt vite et c'est pourquoi Gab se força à s'arrêter et à lever la tête.

"-Hello Ha-Yoon... Oui, ce n'est pas forcément le meilleur jour de ma vie je t'avoue.

-Oh je vois... Profite-en pour regarder la série dont je t'ai parlé la dernière fois, on pourra en discuter autour du déjeuner quand tu reviendra. Lui répondit la jeune femme avec un clin d'œil si bien réussi que Gab crû entendre une petite musique.