Chapitre 2

55 11 52
                                    


Après l'aide de Mme Litman pour le ramassage de ma valise, nous montons. Heureusement pour moi, rien n'a semblé être cassé quand je l'ai ouverte.

Lorsqu'elle abaisse la poignée, la porte se met à grincer bruyamment, j'espère intérieurement que ce ne sera pas le cas à chaque ouverture. J'observe la chambre qui se tient face à moi, elle est divisée en deux parties, les deux lits sont à l'opposé l'un de l'autre. On pourrait croire qu'il s'agit de deux chambres manquant juste d'un mur pour réellement les diviser. La partie gauche de la pièce semble déjà aménagée, je suppose donc que j'occuperais la partie droite. J'aperçois un lit qui semble n'attendre que moi et j'ai tout de suite envie de m'affaler dessus mais je me retiens. Il a l'air d'être tout sauf confortable mais je suis le genre de personne à pouvoir dormir partout, le sommeil m'enveloppe n'importe où, c'est plutôt pas mal. C'est déjà mieux que le club des insomniaques, ne pas réussir à dormir doit être si dur. Ma mère était comme ça, les rares fois où je me réveillais en pleine nuit, je l'entendais, sûrement cherchant une occupation pour combler le manque de sommeil.

Je continue d'inspecter mon espace composé d'une armoire blanche et d'un petit bureau en bois.

- Voici ta chambre, j'espère qu'elle te conviendra, tu as le droit de décorer ton espace comme tu le souhaites sans forcément que tu nous l'informe excepté la peinture. Si tu veux peindre l'un de ces murs, parles nous en d'abord et nous en discuterons, d'accord ?

Savoir que j'ai le droit de décorer la chambre comme je le souhaite me réconforte un peu. J'ai déjà des idées mais il va falloir que je fasse les boutiques avant..

La directrice attend ma réponse d'un air bienveillant et les mains entremêlées , je pense que c'est une personne de confiance mais je me méfie quand même on ne sait jamais. Je hoche la tête et affiche un maigre sourire.

- Pas de problème madame.

- Fais comme chez toi même si je sais que c'est compliqué commence t-elle avec une mine plus sérieuse. Je le répète à chaque venue mais je suis consciente que c'est plus facile à dire qu'à faire alors prends ton temps et surtout si tu ne te sens pas à l'aise ou autre parles en à moi ou à un autre adulte, me dit-elle prête à quitter la pièce.

Soudain, elle s'arrête et se retourne face à moi, une émotion que je saurais décrire plus que n'importe laquelle, l'embarras.

C'est l'une des têtes qu'on m'a fait le plus ces dernières années et je sais ce que ça signifie alors je tente d'être dans le déni mais je n'arriverais pas à me cacher longtemps derrière.

- Je voulais te dire...

Non s'il te plaît, ne continue pas.

J'ai un pressentiment de ce qu'elle m'apprête à me dire mais je ne veux pas. Je n'accepte pas.

Ces derniers mois, j'avais réussi à y échapper en restant cloîtrée chez Tante Rosa, ce n'était sûrement pas la bonne solution. Je passais mes journées devant le canapé, j'étais au point de regarder les dessins animés en mangeant des Kinder, c'est à cause de ça que j'ai vu mon corps changer. Quand j'avais été face à un miroir, les larmes sont sorties, je ne me reconnaissais plus. En me morfondant, en ne bougeant plus, en ne faisant rien de mes journées pendant des mois, mon corps s'est détendu, il s'est lâché. Ma morphologie n'était plus la même, j'avais pris tellement de kilos que certaines choses qui étaient faciles à faire auparavant ne l'étaient plus. Lorsque je marchais simplement, j'étais beaucoup plus vite essoufflée qu'avant mais je ne voulais pas comprendre, c'était plus facile d'être dans le déni. Beaucoup plus facile.

Un jour j'ai arrêté d'y être et ça a été très dur à encaisser, je me suis réfugiée dans les bras de ma tante en lui suppliant de m'aider. Ce qu'elle a automatiquement fait, tous les matins nous allions courir de plus en plus longtemps. J'ai aussi pendant quelques temps fais attention à ma nourriture enfin c'est ce que je devais faire mais.. je n'ai pas arrêté. Enfin, grâce à elle j'ai vu l'amélioration, elle ne sait pas vu directement mais lorsque je me suis rendue des kilos que je perdais, j'ai pleuré de joie. J'étais si heureuse.

- Je..

Je déteste ces moments-là où on est face à moi et qu'on tente d'utiliser les mots qui passeront le mieux. Aucun de leur putains de mots passeront, chaque fois que ces mots sont évoqués, ça me fait d'une certaine façon replonger. Et replonger dans les souvenirs, dans le passé, c'est si douloureux.

Alors aujourd'hui, je prie de tout cœur qu'elle n'achève pas sa phrase. Mais cela se passe quand même, j'entends à nouveau ces mots qu'on m'a dit une centaine de fois.

- Toutes mes condoléances.

A l'entente de ces mots, je ressens comme un coup de couteau qui me transperce le cœur. 

Ça ne devrait plus rien me faire, ce n'est pas comme si c'était la première fois qu'on me les adressait mais je suis consciente que ce ne sera pas la dernière non plus. Entendre cela me fait très mal, ceux qui le disent pensent bien faire et je ne peux leur en vouloir. Mais moi, ça me fait me fait replonger dans cette souffrance, cette culpabilité, ces questionnements qui restent sans réponse car plus personne n'est présent pour me les donner. Et puis ce vide, ce vide qui s'est creusé en moi lorsqu'on m'a prononcé ces mots fatals. Ce jour-là, on m'a enlevé une partie de moi, on me l'a arraché. Ce vide qui ne pourra plus jamais être comblé. Car ce jour-là, une partie de moi s'est envolée avec eux, à jamais.

Face à la directrice je tente de faire bonne figure, je serre fort mes mains de sorte à ce que mes ongles puissent s'enfoncer dans ma peau. J'appuie le plus fort possible pour m'aider à me contrôler mais à surtout contrôler les larmes qui menacent de sortir. Je hoche la tête pour la énième fois de la journée, incapable de sortir un mot. 

Cette fois-ci, Litman part vraiment. La porte se ferme et mon cœur s'ouvre. Je m'effondre sur le lit et laisse mes larmes couler à défaut de pouvoir m'exprimer. Ma bouche contre l'oreiller, je m'exprime à ma manière, en silence. Seule. Seule avec ma souffrance.



--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------


Heyy, voici le deuxième chapitre comme je vous avais prévenu au début, certains chapitres comme celui-ci ne sont pas très joyeux. Mais je vous avoue que j'ai beaucoup aimé l'écrire en espérant que vous l'avez apprécié aussi. N'oubliez pas de mettre votre petite étoile si vous avez aimé et votre avis en commentaire.

A la semaine prochaine <3


Secret LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant