ACTE I

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Scène 1

ALIX

2020, aux abords d'un port de commerce en Bretagne.

Le jour se lève tranquillement.

Un léger fourmillement signale que le service des ouvriers portuaires a déjà commencé.

Quelques caisses de marchandises sont posées ici et là.

Alix s'avance, contemplant les caisses.

ALIX. - C'est toujours la même histoire... Je cherche à rentrer chez moi après une soirée chiante à mourir et je termine ici. Je devrais peut-être dormir ici, au final, c'est un peu chez moi.

Alix s'assoit sur une caisse.

ALIX. - Bon, il me reste une clope, de quoi m'acheter une baguette de pain dans une supérette, mes clés et ma dignité. Où est-ce foutu pélican quand on a besoin de lui... C'est marrant un pélican. Ça passe son temps à gober des poissons, ça a un bec qui peut contenir autant de flotte que ce que mon oncle descend en liqueur aux repas de famille. Mais au moins c'est libre un pélican. Et ça doit pas répondre à des questions débiles. Alors Alix, quand est-ce que tu trouves quelqu'un ? Alors Alix toujours au chomedu ? Alors Alix toujours une espèce de restant de crachat qu'on retrouve sur la porcelaine des chiottes après s'être raclé la gorge un lendemain de cuite ? ALORS TA GUEULE. Bordel. J'en ai marre de ces questions. J'en ai marre qu'on résume ma vie à un boulot de col blanc ou bleu, à des marmots dans les pattes, une voiture cinq places, et un pavillon avec jardin. Pourquoi ça file la trique à tout le monde ce genre de vie rangée. Si je veux passer ma vie dans un 9m² à écrire des bouquins que je publierais jamais, pourquoi ça devrait déranger quelqu'un d'autre que moi ? Il est où ce putain de pélican ? Il est où mon putain de symbole d'espoir.

Scène 2

ALIX, DEBARDE

Débarde entre en tenant une caisse et en jaugeant Alix avec mépris.

DEBARDE. - C'est pas vrai... Eh, c'est un lieu interdit au public, pas une aire pour décuver.

ALIX. - Je suis sobre.

DEBARDE. - C'est pas non plus un coin pour se piquer, sniffer, ou fumer.

ALIX. - Je prends rien. Franchement, c'est le premier truc qui vous vient à l'esprit ?

DEBARDE. - Je sais pas d'où tu sors, mais on est sur un port de commerce. On traîne pas ici pour la beauté du paysage, ni pour la pureté de l'air marin. Les seuls ahuris qui viennent ici sans raison valable, c'est souvent pour s'envoyer en l'air avec le premier truc qu'ils auront ramassé sur la jetée.

ALIX. - Et vous voyez souvent du monde ?

DEBARDE. - Bof. Des types qui sont pleins, oui. Des gens qui veulent se piquer, parfois. Des mélancoliques qui veulent se donner en offrande à la mer, rarement. Des ahuris comme vous qui se baladent, z'êtes le premier.

ALIX. - Vous vous appelez comment ?

Un temps.

DEBARDE. - Débarde.

ALIX. - C'est votre vrai prénom ?

DEBARDE. - A votre avis ? J'aime pas la sonorité de mon blaze, alors je l'adapte là où je vais.

ALIX. - Ah. Et vous faîtes quoi ?

DEBARDE. - Je débarde.

ALIX. - Ah.

Je vais tabasser ce pélicanWhere stories live. Discover now