Chapitre 6

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Aujourd'hui encore, je ne pourrai absolument pas expliquer ma réaction. Je pense que lorsqu'il est confronté à quelque chose qu'il ne comprend pas, l'esprit humain essaie de se raccrocher du mieux qu'il peut au rationnel. Il tente de trouver une logique là où il n'y en a pas. 

J'étais angoissé. Mais je pense, à ce moment-là, que j'ai du me dire que la panne de courant et le générateur auxiliaire avaient du faire paniquer quelques appareils électroménagers. Je savais pourtant qu'un four ne pouvait pas s'allumer tout seul, mais j'étais obligé de me raccrocher à cette idée pour ne pas devenir totalement fou. 

Revenu dans le couloir, je rallumais de nouveau la lumière et marchais avec la lenteur d'un mort. La plante de mes pieds frottait le sol, veillant bien à n'émettre aucun bruit, aucun son. Et lorsque je descendais les escaliers menant au couloir de l'entrée, je m'immobilisais chaque fois que j'entendais le bois craquer. 

Cette fois, je ne m'étais même pas encombré de la lampe-torche, laissée dans la Salle de Commandement. Le simple fait d'imaginer apercevoir une présence humaine, qui n'aurait pas du être là, suffisait à me glacer d'effroi. 

Arrivé au bas des escaliers, j'aperçus une lumière chaude diffusée depuis la cuisine. Chouquette n'était pas là. Où était mon bouledogue ? Où était ma mémère ? Mon détecteur d'intrus ? Les lèvres sèches, je suivis la lumière pour pénétrer dans la cuisine. 

Le four ronronnait doucement et dégageait une agréable chaleur. Seule source de lumière de la cuisine, il ressemblait à un feu de camp qu'on aurait allumé dans la forêt. Il ne manquait que le ukulélé et j'aurai pu m'assoir à côté de lui pour le reste de la nuit. Mais je n'y prêtais pas attention.

Mon regard était entièrement absorbé par le bloc de couteaux qui trônait au milieu de la table centrale de la cuisine. Un détail m'avait tout de suite sauté aux yeux : il manquait un couteau, le plus gros.

***

- Simon, tu dors ?

- Je joue.

- Tu peux me donner le numéro de Pierre ? Je veux lui demander d'arrêter tout de suite ses conneries.

- Quelles conneries ?

- Il rode autour de la maison depuis tout à l'heure. Je pense même qu'il est rentré. C'est pas cool. Il cherche à me faire peur.

- Gros, il est chez moi là...

- Quoi ?

- On devait aller au cinoche. Mais il pleuvait des cordes. On est passé par chez lui puis on est parti squatter chez moi.

- Mec, j'ai trop peur. Y'a quelqu'un dans la maison.

- Files-moi l'adresse et tu te planques ! Tu fais pas de bruit ! J'appelle ta mère, ton père et les flics ! Planques-toi, ne fais pas le con ! 

***

Une alarme s'était déclenchée, celle-ci dissimulée au plus profond de mon crâne. Je ne pris pas la peine d'éteindre le four et pivotait sur mes talons. Cette fois, j'en étais plus que sûr, c'était une question de vie ou de mort. La personne qui s'était infiltrée chez Monsieur Johnson n'était pas un voleur. C'était bien pire que cela.

Ayden / Une nuit chez Monsieur JohnsonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant