I/ Quitter sa plus proche amie.

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« Du calme Scoedie, on les laisse passer. »

Alors, la légionnaire et l'auxiliaire s'abaissent. Elles se terrent dans les ombres qu'elles ont appris à craindre depuis désormais trois semaines.

Surtout lorsque, de l'autre côté de la palissade où Scoedie s'est recroquevillée, il y a une dizaine de dryades prêtes à en découdre et bien pis. Ce n'est pas une patrouille d'auxiliaires, non. Plutôt une petite foule de meurtrières en puissance, qui se cherchent une victime pour la soirée. Elles discutent, ricanent alors que d'un pas à l'autre, c'est le tintement du métal contre le métal. La lueur des torches les a annoncées, mais c'est leur atmosphère mauvaise qui les présente : elles ne supportent que leurs congénères, et encore.

Il y a trois semaines, Scoedie n'aurait pas eu peur de croiser le fer avec elles. Même une simple préposée au ravitaillement dans la légion doit savoir se battre.

Aujourd'hui ? Aujourd'hui Scoedie n'est plus légionnaire, mais simplement humaine. Être humain dans cette ville n'est pas une qualité. C'est même motif à être réduit en esclavage, si on a de la chance, sinon, à mourir dans d'atroces souffrances. Les dryades sont tombées à court de compassion lorsque la colonie d'Aïgaï a brûlé et depuis, elles incendient les humains.

Scoedie attend un long moment avant de se hasarder à découvert : la rue est vide. Elle émerge de sa cachette.

« Dendra ?

-Je suis là, annonce sa camarade en quittant le dessous d'un chariot. Continuons de marcher, avant qu'une autre patrouille n'arrive. »

Dendra marche en tête et Scoedie surveille leurs arrières.

Fût un temps où les rues de la cité étaient sûres la nuit. Avec une dague et un flambeau, on pouvait circuler sans trop d'ennuis. Maintenant, Scoedie n'attend qu'une chose : braver la campagne et les loups.

Elle ne devrait pas, elle est familière de la ville qui l'entoure : Selicia est la capitale de la province, c'était là que séjournait la légion en garnison... sa garnison. Comme toute cité d'importance, le centre-ville est constitué d'appartements en béton d'argile : des bâtiments d'environ quatre étages, avec un magasin au rez-de-chaussée et des logements par-dessus l'échoppe. Ils ont une bonne mine d'ordinaire : le béton d'argile blanchit au soleil et avec l'air marin, il adopte une teinte presque rosée, parfois ocre.

Aujourd'hui, il suffit de voir les taches rouges et sentir l'odeur infecte qui en émane pour comprendre le changement d'ambiance. Le béton est un matériel poreux qui a absorbé des fluides qu'il n'aurait jamais dû.

Il y a un silence de mort qui règne dans les rues. Certaines fenêtres ont été barricadées et plus rares sont celles qui dévoilent la vie à l'intérieur : la lueur d'une bougie est de trop par ces temps troubles.

Il n'y a bien que les dryades qui s'éclairent à la nuit tombée : elles ne craignent rien, c'est devenu leur quartier.

C'est peut-être pour cela que Dendra marche avec confiance : c'est aussi le sien. C'est une dryade.

« Il ne devrait pas y avoir de patrouille, mais au cas où, reste sur tes gardes Scoedie.

-Je le suis, je n'ai jamais été aussi attentive de toute ma vie.

-Je ne voudrais pas que tu me confondes avec une insomniaque du cru. »

Cela ne risque pas d'arriver non.

Elles se connaissent depuis des années. Dendra est... était centurion parmi les auxiliaires, elle gérait la cohorte de dryades. Elles travaillaient ensemble pour que ses soldats ne manquent jamais de verdure, ni de viande.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 31 ⏰

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