Cathodi-monotonie

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quand les lendemains ne paraissent qu'une rediffusion, j'aimerai mettre la pause. pour regarder dehors. ou au moins, ailleurs. la pluie tombe à verse. ou alors le soleil tape. ou peut-être que le ciel est couvert de son dras gris. quand chaque matin, mon corps se mue d'une muette torpeur et d'une faim rassasiée aussitôt sortie du lit, il n'y a que l'envie de retourner dormir. le programme se répète. les heures s'écoulent en jours puis semaine, jusqu'à la coupure pub. un instant pour se lever, et manger, boire et bouger. un instant pour regarder ailleurs. peut-être le ciel, ou cette tâche au plafond. était elle toujours là ? depuis quand, je n'ai pas fait une pause ? le temps s'écoule et le monde s'écroule. le monde coincé dans un cube, gris et austère. cathodique catatonie. rien n'empêche de ne plus suivre le programme si ce n'est la peur rater quelque chose. voir tout. même si au fond, coincé derrière les mêmes mots et images, je ne vois plus vraiment. tout se ressemble. les gens et les jours, les angoisses du matin et la fatigue des soirs. pour encore une fois, se paumer dans ce cycle qui ne semble jamais s'arrêter. changer de chaîne, ce n'est qu'une curiosité, une passion temporaire. tout retombera sous le même signe de la monotonie. je regarde la tâche, elle finit par devenir trop grande pour l'ignorer. peut-être que je peux rater un peu, le temps de l'arrêter. le temps de l'observer. et quelle ne finisse pas par dévorer mon plafond, mon parapluie géant. j'entends la pluie. ce n'est que l'évier, mal fermé. j'entends le vent, c'est juste la clime. j'entends la télé, c'est toujours pareil. j'ouvre la fenêtre, pour trouver l'heure. du bleu, du gris, du orange et du rose, il y a tant. une nouvelle journée. le soleil se lève. aujourd'hui, je regarderai la course du temps. une pause, pour moi. mais pas pour le reste. la télé peut bien tourner et me laisser hébété. la tâche peut bien grandir. le monde peut bien tourner. c'est ma journée. et elle deviendra ma semaine, mon mois, mon année, ma vie. j'entends les émissions, les rires en boites, les mauvaises nouvelles, les musiques dramatiques, mon robinet couler. mais j'entends aussi les oiseaux chanter et mon cœur battre.

Petit Recueil de MotsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant