Langage des fleurs

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𝓹𝓮𝓻𝓬𝓮-𝓷𝓮𝓲𝓰𝓮

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Felix était assis sur le même tabouret que la fois précédente, à observer avec le même intérêt les gestes précis de son ami. Il était arrivé une dizaine de minutes plus tôt et Jeongin venait à peine de commencer son dessin. Il s'agissait encore d'une fleur. Le brun n'en connaissait toujours pas le nom et pensa qu'il était peut-être temps qu'il s'intéresse à ce sujet. 

Il se leva le plus discrètement possible pour ne pas attirer l'attention du plus jeune, qui ne leva même pas les yeux vers lui, et se dirigea vers le fond de la pièce où était entassé une quantité importante de dessins et peintures. Certaines étaient à peine commencé tandis que d'autres ne laissaient plus voir un seul centimètre de la toile. Felix prit les œuvres entre ses mains, une à une. Il les trouvait magnifiques et même celles qui étaient tout au fond, et qui devaient dater de plusieurs années, avait un charme unique. Il tourna la tête pour détailler le visage concentré du blond. Il était fier d'avoir un ami aussi talentueux. Il reposa ses yeux sur les créations et un détail attira son attention. La grande majorité d'entre elles représentait des fleurs. Il reconnut avec peine des pétunias mais les autres fleurs lui étaient inconnues. Il reposa chaque peinture et dessin à sa place et retourna auprès de Jeongin.

Felix tapota l'épaule de son ami qui ne réagit qu'après avoir fini la feuille qu'il était en train de tracer. Il posa son crayon à côté de lui et se tourna vers le brun. Ce dernier se pinça les lèvres pour ne pas parler. Il s'était lancé le défi de ne discuter qu'en langue des signes lorsqu'il le pouvait. Il chercha donc au fin fond de ses souvenirs les gestes qui pourraient exprimer sa pensée.

Il finit par trouver et un grand sourire se dessina sur son visage. Il plaqua son index contre sa tempe puis plaça sa main devant sa bouche, ses doigts joints vers le haut qu'il ouvrit. Jeongin le regarda plusieurs secondes, une moue dubitative sur le visage. Felix pointa donc son dessin, en espérant clarifier la situation. Le visage du plus jeune s'illumina lorsqu'il comprit mais bien vite, ses oreilles se teintèrent de rouge, tout comme ses joues, et il se mordit la lèvre. Le brun pouffa de rire face à cette réaction et se mit en tête de comprendre pourquoi son ami dessinait toujours des fleurs.

Il s'installa sur le tabouret et sortit son téléphone. Dans la barre de recherche, il essaya plusieurs mots clé qui l'amenèrent vers des sites de botanique ou de jardinerie. Malgré ses tentatives infructueuses, il n'abandonna pas, convaincu que ces dessins avaient un sens. Jeongin lui jetait parfois quelques regards curieux puis retournait à son activité. Ce fut lorsqu'il nota "langage des fleurs" qu'il eut enfin un résultat intéressant. Plusieurs dizaines d'articles apparaissaient sous ses yeux et lorsqu'il descendait la page, de nouvelles propositions s'affichaient. Il n'avait jamais entendu parler de ce langage avant, pourtant cela semblait être assez répandu.

Il se plongea donc dans ses recherches. Il s'intéressa d'abord au pétunia, seule fleur qu'il avait reconnue. La signification qu'il lut le prit au dépourvu. Cette fleur qui décorait son jardin et qui était représentée sur plusieurs toiles dans la chambre de son ami exprimait la colère. Il se demanda si Jeongin connaissait cette signification lorsqu'il a peint ces plantes. La question passa la barrière de ses lèvres sans même qu'il ne s'en rende compte. De toute façon, il n'aurait pas su la formuler en langue des signes.

En entendant l'interrogation de Felix, le peintre baissa la tête et une moue coupable se forma sur ses lèvres. Il tritura ses doigts quelques instants avant de prendre une grande inspiration et de plonger son regard dans celui de son interlocuteur. Il forma un cercle avec son pouce et son index et détourna le regard en baissant sa main.

Il se leva et Felix crut qu'il allait quitter la pièce. Il se reprocha d'avoir envahi l'intimité de ce garçon qu'il connaissait encore depuis trop peu de temps. Mais en voyant Jeongin attraper une feuille entre ses mains, ses remords se dissipèrent. Le plus jeune s'approcha de lui et le brun reconnut sans difficulté la fleur qu'il avait dessiné le jour où ils sont devenus amis. Jeongin posa l'œuvre sur son bureau, saisit un crayon et écrivit en lettres cursives le nom de la fleur : bégonia. Après avoir signé un rapide remerciement, Felix se précipita sur son téléphone pour déterminer la signification de cette fleur que Jeongin a choisi de lui montrer. Sans savoir pourquoi, il trouvait cela grisant. Depuis qu'il avait rencontré Jeongin, il avait appris tant de nouvelles façons de partager ses pensées. En premier, il avait appris la langue des signes puis, sans même s'en apercevoir, il avait su communiquer à travers l'art. Désormais, il apprenait le langage des fleurs. Il avait l'impression de créer un lien unique avec son nouvel ami. Ils inventaient un langage composé de tout ce qu'ils connaissaient et qui composaient leur monde, un langage qu'eux seuls pouvaient comprendre.

Lorsqu'il trouva la signification de la bégonia, il leva le visage vers Jeongin et lui offrit un sourire lumineux. Cette fleur représentait l'amitié sincère. Felix enfouit son téléphone dans sa poche, attrapa un crayon et une feuille vierge et griffonna l'esquisse d'une bégonia qu'il tendit à son ami, les yeux brillants de fierté. Jeongin pouffa de rire en détaillant les traits grossiers couchés sur ce papier fin mais son regard ne trompait pas ; il était touché. Il accueillit le dessin entre ses mains et l'observa attentivement, mordant sa lèvre pour retenir son sourire attendri.

Ils s'échangèrent un regard, les joues rosies et les sourires larges, puis chacun retourna à son occupation. Jeongin laissait son crayon glisser contre le papier au rythme de son inspiration et Felix l'observait avec un intérêt sincère. Parfois, il demandait le nom d'une fleur peinte et le plus jeune l'écrivait dans le coin d'une feuille.

Après une trentaine de minutes, le brun avait découvert une partie intégrante du monde de son ami. Ses états-d 'âme retranscrits à travers des pétales d'aquarelle lui avaient été dévoilées. Felix ne pensait pas que son ami pouvait être si mélancolique. Beaucoup de peintures et dessins représentaient une acanthe, signifiant l'amour de l'art. Mais entre ses nombreuses fleurs dédiées à sa passion se trouvaient le basilic, le chardon et l'ancolie qui expriment des sentiments négatifs que Felix ne lui connaissait pas. Pendant ses recherches, le blond gardait ses yeux rivés ses yeux vers le dessin, n'osant même pas les relever lorsqu'un nom de fleur lui était demandé. Il acceptait que Felix découvre cette facette de lui mais appréhendait malgré tout de perdre un ami qui lui était si cher. Son seul ami.

Jeongin balaya ses inquiétudes d'un revers de main. Il se pencha vers lui pour observer la fleur qu'il venait de finir de dessiner. Il s'agissait d'un perce-neige, le jeune artiste l'avait noté sur le haut de la page, se doutant que son ami le lui demanderait. Felix lui offrit un sourire timide avant de chercher la signification de cette dernière fleur. Celle qui représentait l'état d'esprit actuel de ce garçon qui avait pris une place si importante dans sa vie en quelques semaines à peine. Sans savoir pourquoi, le plus âgé se sentait stressé. Il redoutait que la fleur ait une connotation négative, que son ami se sente mal à l'aise en sa présence.

Après une inspiration ample, il valida sa recherche et le premier mot que son œil capta fut "renouveau". Il leva la tête vers Jeongin dont les pupilles tremblaient d'appréhension. Le jeune garçon redoutait une réaction négative. Depuis le début, il se mettait à nu devant son aîné et lui avouait, dans ce langage qui leur était propre, qu'il voyait en Felix un tournant important dans sa vie. Le brun décida donc de faire un effort à son tour, de répondre à cette demande silencieuse. Il s'approcha de Jeongin et le prit entre ses bras, plongeant son visage dans le creux de son cou. Jeongin se crispa à cause de la surprise, puis se détendit et répondit à ce geste d'affection. Il noua ses mains dans le dos de son ami et laissa sa tempe reposer contre le crâne de ce dernier. Leur étreinte n'était pas parfaite : un peu maladroite, pas très confortable. Ils s'en fichaient car elle signifiait bien plus. Elle scellait la promesse d'un avenir meilleur, à deux.

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À la semaine prochaine !

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