L'obscure vérité

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Les murs de la salle à manger étaient ornés de riches tapisseries représentant des scènes mythologiques, leurs couleurs vibrantes atténuées par le temps. Les lourdes draperies de velours encadraient les fenêtres, empêchant les derniers rayons du soleil de pénétrer. Une grande table de chêne massif trônait au centre, parée d'une nappe brodée d'or. Eddie entra dans la pièce, une pointe de dégoût dans le regard. Ce dîner, comme tous les autres, était un calvaire pour lui.

Ses parents étaient déjà installés, sa mère, la reine Helena, affichant son sourire poli habituel tandis que le roi, son père, observait l'assemblée avec un air de supériorité. Eddie serra les poings, sentant une vague de haine monter en lui. La séparation forcée avec Buck, orchestrée par son père, le remplissait de rage. Il avait envie de lui enfoncer son poing dans le visage, de le forcer à annuler ce mariage absurde. Cette haine brûlante le consumait, nourrie par l'injustice de voir leur amour sacrifié sur l'autel des alliances politiques.

La seule représentante de la famille Buckley présente était la princesse Maddie.

Elle portait une robe de soie bleu ciel, élégante mais sans ostentation. Ses cheveux châtains étaient relevés en un chignon simple, laissant entrevoir un visage serein mais empreint d'une certaine mélancolie.

Eddie la salua d'un signe de tête avant de prendre place en face d'elle.

En la regardant, il ne ressentait rien de particulier. Ses traits, bien que gracieux, n'évoquaient en lui aucune émotion. Il la trouvait quelconque, loin de l'image idéalisée de la princesse parfaite. Ses yeux, pourtant doux, ne suscitaient en lui ni admiration ni désir.

Les pensées d'Eddie dérivèrent inévitablement vers Buck, dont le souvenir allégeait le poids de ces rencontres familiales obligatoires.

Un homme.

Il aimait un homme.

L'idée lui paraissait à la fois étrange et terriblement évidente. Avec Buck, tout était différent. Ce n'était pas simplement question d'une attirance physique ou d'une complicité superficielle. C'était une connexion profonde, un lien qui semblait s'étendre au-delà des mots et des gestes.

Buck était tout ce qu'il désirait.

Son sourire espiègle, ses yeux pétillants de malice, et cette chaleur sincère qu'il dégageait à chaque instant. Il aimait la façon dont Buck le faisait se sentir vivant, dont il réveillait en lui des émotions qu'il pensait avoir perdues.

C'était avec cet homme-là qu'il voulait être, et personne d'autre.

À côté de lui, tout le reste semblait terne et sans importance. Un sourire furtif apparut sur ses lèvres à cette pensée, mais il le réprima rapidement, conscient des regards qui pouvaient l'observer. Mais, même alors qu'il s'efforçait de dissimuler ses émotions, il ne pouvait nier la vérité : son cœur appartenait à Buck, et rien ni personne ne pourrait changer cela.

Bobby, le chef en personne, fit son entrée avec une soupière en argent.

Eddie fut immédiatement surpris, car il était inhabituel que Bobby fasse le service lui-même. Généralement, il était trop occupé en cuisine, laissant cette tâche aux serveurs. Bobby ne venait que rarement dans la salle à manger, sauf pour superviser les repas importants ou pour s'assurer personnellement que le petit déjeuner de Christopher était parfait.

Avec des gestes mécaniques, Bobby commença à servir le potage, ses mouvements précis et contrôlés, mais son visage trahissant une autre histoire. Il évitait soigneusement de lever les yeux, son regard restant fixé sur le contenu de la soupière. C'est alors qu'Eddie remarqua les yeux rougis du chef, un détail qui ne lui échappa pas. L'inquiétude s'installa instantanément dans son esprit, une lourde sensation dans la poitrine. Les yeux rougis de Bobby étaient un signe évident de larmes récentes, une trace de chagrin qu'il ne pouvait cacher malgré ses efforts pour paraître professionnel.

9-1-1 - Pour l'amour d'un prince (AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant