Un mois plus tard.
La chevalière d'Aphrodite au doigt, Magdalena faisait de son mieux pour que toutes les conditions permettant le bonheur de son peuple soient remplies. La tâche s'était avérée bien plus difficile que prévu, puisque la classe la plus aisée n'était plus la seule à devoir être canalisée. Commerçants, anciens travailleurs esclaves et ouvriers d'État avaient fini par se rebeller contre les lois édictées par la Kaiserin et les quatre membres de son conseil. Était-ce l'habitude de vivre sous le joug d'une autorité sévère et injuste ou simplement la crainte d'éventuelles représailles à venir qui les avait poussés à protester contre cette nouvelle forme de gouvernement ? La jeune femme n'avait pas eu le temps de se poser la question. Il avait fallu agir.
À présent, chaque jour, elle éprouvait le poids de cette décision. Sa santé déclinait et ses forces s'amenuisaient. Elle avait beau s'octroyer quelques pauses quotidiennes, son corps ne se remettait jamais assez à son goût. Malgré la présence de ses amis à ses côtés, elle devait bien admettre que le pouvoir devenait usant à la longue. En dehors des réceptions officielles, Garance se faisait discret, pour ne pas dire transparent. Il semblait se faire un devoir de ne jamais prendre part aux réunions du conseil, comme si le gouvernement du royaume ne le concernait pas. Magdalena avait accepté son refus de la soutenir, mais cette attitude désinvolte l'agaçait. L'existence oisive à laquelle il s'adonnait témoignait de son faible caractère et d'un sérieux manque de courage. Derrière sa beauté et la gentillesse qu'il arborait en toute occasion, il dissimulait en fin de compte un esprit peu enclin aux responsabilités. L'UPA n'était certes pas encore parfaite, mais elle méritait que ses deux dirigeants collaborent d'une manière ou d'une autre à son évolution. À bien y réfléchir, l'Impératrice commençait à se demander si un Kaiser absent était vraiment préférable à un fervent opposant. Au moins se serait-il battu pour ses idées et sa vision de leur royaume. Cela aurait été plus supportable que cette indifférence affichée.
Assise à la table de conférences, Magdalena laissait vagabonder son esprit, guère concentré sur les affaires du jour. Cela lui arrivait souvent ces derniers temps. Elle avait besoin de s'évader de ce quotidien trop sérieux. Sans les rares moments volés en compagnie de Christina, l'existence lui aurait paru bien morne. Hier encore, la jeune femme lui avait concocté un pique-nique dans la forêt de Chantilly. Une escapade des plus charmantes qui lui avait aéré la tête et donné des envies de penser un peu à elle. La Magicienne avait beau accepter de se cantonner au rôle d'amie fidèle, elle n'en essayait pas moins de la séduire. De regards langoureux en étreintes sensuelles, elle se faisait tantôt tendre tantôt pressante, déstabilisant Magdalena qui finissait par s'autoriser à franchir quelques limites. Durant leur tête-à-tête de la veille, elles avaient échangé un long baiser, teinté de désir et d'espérance. Ce seul souvenir éloigna encore l'Impératrice de la salle austère qui hébergeait la séance du conseil, et l'emmena par-delà les confins du devoir. Le pouvoir devenait un fardeau si lourd qu'elle s'imaginait l'abandonner. Pour l'instant, elle s'efforçait de tenir bon. Pour ses amis venus sans hésiter afin de l'épauler et pour son peuple qui méritait un dirigeant, soucieux de leur bien-être. Pourtant la lassitude la gagnait et chaque jour supplémentaire exigeait qu'elle repousse ses propres envies. Alors que ses responsabilités l'écrasaient, sa ténacité diminuait, elle le sentait. Bientôt, la chevalière viendrait à bout de sa résistance. Bientôt, ce contrôle que Christina jugeait déraisonnable cesserait une bonne fois pour toutes.
Depuis qu'elle portait cet artefact, sa vie était aspirée pour alimenter l'enchantement nécessaire à l'instauration des changements qui lui tenaient à cœur. La Magicienne n'avait pas manqué de le lui reprocher, arguant qu'une dirigeante affaiblie n'était d'aucune utilité à son royaume. Même si Magdalena savait qu'elle avait raison, elle ne pouvait ni se défaire de ce bijou ni diminuer son influence. Oma n'était pas revenue depuis le jour où elle le lui avait remis. La jeune femme avait eu beau la supplier de venir la trouver pour lui prodiguer conseils et paroles de réconfort, son aïeule était restée sourde à ses appels. Ce silence inexpliqué l'inquiétait et ne faisait qu'accroître le désarroi déjà profond de l'Impératrice. De toute son âme, elle espérait que cette situation cesserait le plus tôt possible.
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Au nom du pouvoir
AdventureAprès un long sommeil de quarante années, Magdalena s'éveille afin de prendre place à son tour sur le trône de l'UPA, l'Union des Peuples Ariens. Pourtant, contrairement à ses parents, elle n'a pas l'intention de suivre la voie déjà tracée qui donne...