La pluie fine qui tombait sur la ville donnait à l'air un goût métallique, amplifiant l'atmosphère morose qui régnait sur la journée. Léa marchait sous son parapluie, absorbée dans ses pensées. Depuis sa dernière rencontre avec Gabriel, une obsession naissait en elle. Ce n'était pas simplement de la curiosité, mais un besoin presque irrationnel de comprendre cet homme si froid, si fermé. Il y avait quelque chose en lui, une douleur qu'elle reconnaissait, même si elle ne pouvait pas encore la nommer.
Camille, qui la rejoignit au bureau avec sa joie de vivre habituelle, ne semblait pas remarquer l'agitation intérieure de son amie. Elle continuait de discuter de leurs dossiers en cours, de clients exigeants et de la pression des échéances. Mais Léa ne l'écoutait que d'une oreille distraite.
Ce n'est qu'en fin de journée, alors qu'elle rangeait ses affaires pour partir, qu'un détail attira son attention. Sur son bureau, un dossier qui ne lui appartenait pas avait été déposé. L'étiquette indiquait un nom qu'elle ne connaissait pas : "Dossier Rénard". Curieuse, elle l'ouvrit. À l'intérieur, des pages couvertes de notes manuscrites, des articles de journaux, et plusieurs photos en noir et blanc. L'une d'elles montrait Gabriel, plus jeune, en compagnie d'un homme plus âgé, à l'air sévère.
Léa feuilleta rapidement les documents, son cœur battant à tout rompre. Mais avant qu'elle ne puisse comprendre de quoi il s'agissait, Camille apparut à l'entrée de son bureau, interrompant ses pensées.
« Tu viens ? » demanda-t-elle avec un sourire. « On a encore un tas de choses à discuter pour le cas Dupont. »
Léa ferma précipitamment le dossier et le glissa dans son sac. « Oui, j'arrive. » Elle savait qu'elle devait enquêter plus tard, quand elle serait seule. Pour l'instant, elle ne voulait pas alarmer Camille avec ses suspicions.
La soirée s'écoula lentement. Camille parlait des affaires en cours, mais Léa restait distraitement silencieuse, ses pensées tournant autour de Gabriel et de ce mystérieux dossier. Quand elle rentra chez elle, elle ne pouvait plus résister à l'envie de percer le mystère.
Elle s'assit à son bureau, les mains légèrement tremblantes, et ouvrit à nouveau le dossier. Les articles de journaux semblaient liés à des enquêtes complexes, des affaires de fraude et de détournement de fonds, mais rien ne mentionnait explicitement Gabriel. L'homme sur la photo, cependant, ressemblait à un certain Jean Rénard, un nom qui revenait souvent dans les documents.
Mais alors que Léa étudiait les papiers, une idée la frappa. Gabriel avait mentionné qu'il travaillait souvent la nuit, mais n'avait jamais précisé quel type de travail il faisait. Si cet homme, Jean Rénard, avait un lien avec lui, cela pourrait expliquer le secret entourant son métier. Elle décida de suivre sa piste, aussi incertaine soit-elle.
Le lendemain matin, Léa fit une recherche rapide sur Jean Rénard. Il s'avéra être un ancien juge, maintenant à la retraite, qui avait eu des démêlés avec la justice pour des affaires de corruption. Ses liens avec le monde de la finance et du pouvoir étaient bien connus, mais sa chute avait été brutale, et il avait disparu des radars après un scandale majeur.
Au fur et à mesure que Léa découvrait ces informations, son inquiétude grandissait. Elle devait parler à Gabriel, mais cette fois, elle ne se contenterait pas de réponses évasives.
Après une journée de travail interminable, Léa décida de rendre une nouvelle visite à Gabriel. Le temps avait changé, la pluie du matin s'était transformée en un orage violent. Le tonnerre grondait au loin tandis qu'elle se dirigeait vers son appartement.
Quand elle arriva à destination, elle hésita un moment avant de frapper à la porte. Après plusieurs secondes, Gabriel ouvrit, ses traits encore plus fermés que d'habitude.
« Léa, qu'est-ce que tu fais ici ? » demanda-t-il, sa voix calme mais teintée d'une pointe d'agacement.
« Je dois te parler, » dit-elle, résolue. « C'est important. »
Gabriel la regarda longuement, avant de s'écarter pour la laisser entrer. L'intérieur de l'appartement était plongé dans une pénombre presque totale, seulement éclairée par les éclairs à travers les rideaux.
« Qu'est-ce que tu veux savoir ? » demanda-t-il en croisant les bras, son regard sombre fixé sur elle.
Léa prit une grande inspiration et sortit le dossier de son sac. « Qui est Jean Rénard ? Et quel lien as-tu avec lui ? »
Gabriel resta silencieux, son visage ne trahissant aucune émotion. Après un long moment, il répondit enfin, d'une voix froide et mesurée. « Jean Rénard était un juge, et un homme que j'ai connu il y a longtemps. Mais cela n'a rien à voir avec toi, Léa. Tu n'aurais jamais dû fouiller dans ces affaires. »
Léa sentit la colère monter en elle. « Rien à voir avec moi ? Gabriel, je me soucie de toi, et je ne peux pas simplement fermer les yeux sur ce que je découvre. Tu sembles tellement seul, tellement perdu... »
Gabriel détourna le regard, les mâchoires serrées. « Il y a des choses que tu ne peux pas comprendre. Des choses que je ne veux pas que tu comprennes. »
« Alors explique-moi, » insista-t-elle, ne reculant pas devant la froideur de son ton. « Laisse-moi t'aider. »
Il se passa une main dans les cheveux, frustré. « Tu ne peux pas m'aider, Léa. Ce que j'ai vécu, ce que je suis... tu ne pourrais jamais l'accepter. »
Elle allait répondre quand une troisième voix se fit entendre depuis le couloir. Une silhouette apparut, se dessinant dans l'ombre. C'était un homme d'une trentaine d'années, grand, aux traits sévères et aux cheveux noirs.
« Gabriel, je t'avais dit de ne laisser personne entrer, » dit-il, son ton sec laissant peu de place à la discussion.
Gabriel se retourna vers lui, son expression encore plus fermée qu'auparavant. « Léa, je te présente Alexandre. C'est un... collègue. »
Léa observa l'homme, sentant une tension palpable entre eux. Alexandre avait un regard perçant, presque intimidant, et son attitude n'avait rien de bienveillant. Il sembla jauger Léa d'un simple coup d'œil, avant de reporter son attention sur Gabriel.
« On a du travail à faire, » dit-il d'une voix tranchante, ignorant délibérément Léa.
Gabriel acquiesça brièvement, puis se tourna vers Léa. « Tu devrais partir. C'est mieux pour toi. »
Léa sentait qu'elle perdait le peu de contrôle qu'elle avait sur la situation. « Gabriel, je veux comprendre. »
« Il n'y a rien à comprendre, » répliqua Alexandre avec une froideur coupante. « Gabriel fait ce qu'il doit faire. Accepte-le et passe à autre chose. »
Léa, déstabilisée par ce nouvel acteur dans le mystère de Gabriel, comprit que ce n'était ni le moment ni l'endroit pour insister. Mais elle savait qu'elle n'en avait pas fini. « Je reviendrai, Gabriel. Je ne peux pas simplement te laisser comme ça. »
Gabriel ne répondit pas, son regard glacial se fixant sur elle tandis qu'elle quittait l'appartement, le cœur lourd. À l'extérieur, l'orage faisait rage, comme si le ciel lui-même pressentait le chaos qui couvait. Mais malgré la peur et l'incertitude, Léa savait une chose : elle devait découvrir la vérité, quel qu'en soit le prix.
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Le Piège du Désir
RomanceDans un tourbillon d'émotions intenses, Léa rencontre Gabriel, un homme mystérieux dont le charme envoûtant dissimule des ténèbres profondes. Alors qu'elle tente de reconstruire sa vie après une série d'échecs personnels, Léa est irrésistiblement at...