Chapitre 1 | Yuna et les émotions

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Une femme éteignait le contact de sa voiture. Elle sortit du véhicule et claqua la portière derrière elle. D'une démarche maladroite, à un rythme lent, elle traversa la route une fois que le feu passa au rouge. La femme se dirigeait vers un immeuble, identique à tous ceux que l'on pouvait voir à Paris. Le style Haussmannien. Cinq étages, façade en pierre de taille et style rustique, loin de la modernité de New York ou bien Tokyo. Les pas de la jeune femme devenaient de plus en plus pressés lorsqu'elle arrivait devant le bâtiment. Elle poussa la grande porte vitrée et sortit un trousseau de son sac à main. Elle prit la plus petite des clés en allant vers les rangées de boîtes aux lettres. Finalement, elle l'inséra dans la boîte où il était inscrit sur une étiquette « Yuna Yasashi ». A l'intérieur il n'y avait qu'un tas de prospectus colorés. Yuna nota deux nouveaux magazines aujourd'hui. Mais elle referma la boîte sans y jeter un coup d'œil, les laissant moisir ici.

Yuna ressortit alors la petite clef et en prit une deuxième, plus grosse. Promptement, elle monta les marches de l'escalier en colimaçon jusqu'au troisième étage. En arrivant au bout, elle ne put s'empêcher d'émettre un soupir avant de se plaindre à voix haute.

— Pff... Pas besoin d'aller à la salle de gym !

Enfin, elle tourna deux fois la clef dans la serrure avant que la porte ne s'ouvre pour laisser entrer Yuna dans son appartement. C'était un deux pièces. La petite salle de bain avait fusionné avec les toilettes et le salon comportait une petite cuisine, un canapé lit et un petit ordinateur posé sur une table basse. Pas de bureau, pas de chambre, pas de placards. Le strict minimum. Il y avait bien un balcon, mais Yuna s'en était servie pour y mettre toutes les affaires qu'elle n'avait pas la motivation d'aller jeter, rendant l'endroit infranchissable.

Epuisée, Yuna referma la porte à clef et laissa le trousseau dans la serrure. Elle jeta son sac à main par terre et enleva ses grosses bottines noires à plateforme avec les pieds sans prendre la peine de défaire ses lacets, comme on aurait fait avec des chaussons. Rapidement, elle enleva aussi son cardigan en tricots jaune canari, ne lui laissant plus que sa longue robe bordeau. Yuna aurait bien voulu s'affaler directement dans le canapé-lit, mais elle avait bien trop soif. Elle s'avança vers la cuisine pour se servir une tasse de thé. Elle la posa sur la table basse à côté de l'ordinateur portable, attendant patiemment que sa boisson refroidisse un peu. En attendant, elle se mit dans le canapé et démarra l'ordinateur. Il prit un temps fou à s'allumer mais finit par y arriver tant bien que mal avec un petit son, comme si la vieille machine se félicitait d'avoir réussi cet exploit.

Avec précipitation, Yuna lança un moteur de recherche et tapa sans regarder son clavier « feelsworld.org ». En réalité, dès qu'elle avait tapé la lettre « f », le logiciel avait déjà écrit le reste.

Le site internet était en fait une sorte de blog tout à fait banal. En première page, les visiteurs avaient le droit à un article qui semblait être une anecdote de l'auteur du site à propos de son travail de bureau.

Si Yuna allait sur ce blog, ce n'était pas pour lire la vie de cette personne, mais bien parce qu'elle était l'auteur de ce site. Après avoir relue une énième fois son nouvel article, elle cliqua sur une icône d'enveloppe en haut à droite de son écran. Par dessus l'enveloppe, un « 2 » s'affichait en rouge. Le premier message n'était qu'un ramassis d'insultes en tout genre qui formait quelques phrases, expliquant que Feelizz, son pseudonyme, n'était qu'une illuminée qui se prenait pour une héroïne. Yuna n'y prêta pas attention. En revanche, le deuxième était bien plus agréable.

Bonjour Feelizz. Un ami m'a parlé de vos aptitudes. Je n'y croyais absolument pas mais il était en proie à de grosses crises d'angoisses quand on reparlait de certains sujets. Depuis qu'il a pris rendez-vous sur votre blog, il repense joyeusement à ces événements et a pris du recul. Coïncidence, science ou magie je ne chercherais pas à comprendre, mais si vous pouvez régler quelques problèmes dans ma vie, je ne dirais pas non. Pourrions-nous en parler ?

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