PROLOGUE - KETMIE

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Ketmie se tenait, petite et vulnérable, entre ses deux frères, Léon et Jairius, devant le trou béant où les cercueils de leurs parents descendaient lentement dans la terre. Le vent glacial s'infiltrait sous son manteau noir, mais ce n'était rien comparé au froid qui enveloppait son cœur.

Les larmes coulaient sur ses joues sans qu'elle puisse les retenir, traçant des sillons brillants sur sa peau de velours. Autour d'eux, les murmures des adultes et les prières murmurées créaient une atmosphère lourde, presque oppressante.

Léon, son grand frère de sept ans, était à sa droite. Immobile, il fixait un point invisible dans l'espace, ses yeux absents, comme perdus dans un monde lointain où personne ne pouvait le rejoindre. Léon avait toujours été différent, vivant dans une réalité qui échappait à Ketmie, mais aujourd'hui, cette distance semblait encore plus grande.

Son visage était impassible, et il ne semblait pas percevoir ce qui se passait autour de lui. Ketmie le regardait parfois du coin de l'œil, espérant une réaction, un signe, mais il n'y avait rien. Son silence était plus glaçant que le vent.

À gauche de Ketmie, Jairius, ou Jay comme elle l'appelait tendrement, observait la scène avec un calme déroutant. À seulement trois ans, il n'avait pas versé une seule larme. Ses grands yeux sombres regardaient fixement les cercueils, sans la moindre émotion.

Ce détachement troublait profondément ceux qui les entouraient. Jairius ne semblait pas comprendre la gravité de l'instant, ou peut-être s'en fichait-il simplement. Les adultes chuchotaient entre eux, jetant des regards furtifs et inquiets vers le petit garçon. Ils le trouvaient bizarre, différent, et cela leur faisait peur. Ce n'était pas normal pour un enfant de cet âge d'être si... détaché.

Le roi Nazario, qui veillait sur eux depuis la mort de leurs parents, se tenait en retrait, observant avec une inquiétude qu'il ne parvenait pas à dissimuler. Bien qu'il fût un homme fort et respecté, l'attitude de Jairius le déconcertait.

Il savait que l'enfant avait toujours été silencieux, mais ce jour-là, cette froideur, cette absence totale de réaction, étaient presque terrifiantes. Nazario avait déjà vu beaucoup de choses dans sa vie, mais il n'avait jamais rencontré un enfant aussi jeune avec une aura si troublante.

Ketmie, elle, ne comprenait pas entièrement ce qui se passait, mais elle sentait cette peur, cette inquiétude que Jairius provoquait chez les autres. Elle ne comprenait pas pourquoi son petit frère ne pleurait pas. Pourquoi il ne disait rien ? Pourquoi il ne montrait aucun signe de tristesse ? Et cela l'effrayait.

Même elle, qui aimait Jay plus que tout, ne pouvait s'empêcher de ressentir un frisson d'inquiétude en voyant cette indifférence. Le Jay qu'elle connaissait, qu'elle serrait dans ses bras quand il avait peur, semblait loin, très loin, comme si quelque chose l'avait emporté dans un endroit où elle ne pouvait pas le rejoindre.

La cérémonie continuait, les prières se mélangeaient aux pleurs étouffés, mais pour Ketmie, le monde était devenu flou. Elle avait peur. Peur de ne plus se souvenir de ses parents, peur de ce que l'avenir leur réservait, peur de perdre ce petit frère qui, malgré sa froideur, était tout ce qu'il lui restait de sa famille.

Elle serra la main de Léon, cherchant à se rassurer, mais il ne répondit pas, perdu dans ses pensées insondables. Jairius, lui, restait figé, comme une statue, son regard sombre fixant l'abîme où disparaissaient les cercueils.

Ketmie ne pouvait s'empêcher de se demander ce qui se passait dans la tête de Jairius. Était-il simplement trop jeune pour comprendre, ou y avait-il quelque chose de plus sombre, de plus profond, qu'elle ne pouvait pas saisir ?

AETHERIA - ONE NIGHT [T3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant