Les Dieux Cerfs

Entente compliquée

Quelques semaines ont passé depuis l'arrivée des gens de la ville et les choses avaient un peu changées au village. Pas forcément de façon drastique puisque chacun gardait sa petite routine. Mais des choses avaient évolué.

Il était courant maintenant de voir des soldats Croisés faire des rondes dans les rues, arrachant et détruisant tout ce qui n'était pas lié au christianisme. Dame Sera et Emily faisaient souvent des discours sur la Bonne Parole, essayant de convertir les villageois... mais malgré les Croisés et les discours des Dames, les gens continuaient à vénérer les Trois Cerfs. Tous les dimanches, les villageois étaient forcés à l'Église pour écouter les sermons du prêtre, les récits des Croisés ou les discours de Dame Sera. Mais la plupart des habitants ignoraient les bavardages des gens de la ville.

Notamment Niffty!

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Fredonnant, la petite femme de ménage passe innocemment dans les couloirs avec deux rats fraîchement tués dans les mains. Les domestiques l'ignorent, habitués à ce genre de scène, mais les soldats la dévisagent, se demandant bien ce qu'elle fait. Mais soudain...

« Que de peine, ma chère amie! » entend-t-elle dire la voix de Dame Rosie.

Aussitôt la petite servante se rend discrètement vers l'entrée de la pièce où elle a entendu la voix et, trouvant la porte fermée, elle pose ses rats au sol avant de coller son oreille contre le bois pour écouter.

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À l'intérieur, Dame Rosie accompagnée de Dame Carmilla et ses filles sont en train de broder. Alors que la veuve au teint aussi blanc que le Cerf Blanc aide la native du village à réaliser une nouvelle tapisserie, les deux damoiselles s'occupent de leurs trousseaux.

« Des tapisseries somptueuses, faites par nos ancêtres depuis des temps anciens, déchirées et jetées par ces soldats comme si elles n'étaient que de vulgaires torchons! » s'indigne la Seigneur auprès de la Dame avant de pousser un profond soupir d'exaspération. « Tout ça parce qu'ils nous croient indigne parce que nous vénérons les Cerfs?!? » s'agace-t-elle, attirant l'attention des deux jeunes filles. « Je voudrais bien les voir, moi! Le jour où les conquérants et les envahisseurs débarquèrent, nos ancêtres ont prié Dieu pour leur venir en aide et tout à coup, l'ennemi s'en va en fuite devant un monstre qu'ils ne peuvent affronter! Ou quand il y avait une propagation de maladie et qu'on priait Dieu de sauver son prochain et qu'une créature divine vous accorde sa bénédiction! Ces Cerfs sont tout aussi une réponse de Dieu à nos prières que n'importe lequel de ces miracles! Ce village ne serait plus en train de tenir debout si ce n'était pour eux! »

Clara et Odette se regardent, se demandant si des cerfs étaient vraiment capables de ça, alors que leur mère sourit à la Seigneur.

« Les gens de la ville ont des pensées étriquées. J'en ai fait l'amer expérience de par mon teint trop blanc et les yeux trop rouge. » dit-elle en posant son ouvrage.

« L'humanité est vraiment imparfaite... » soupire Rosie avant de se ressaisir. « C'est décidé! Dorénavant, cette pièce sera fermée à clef! Je ne vais pas me laisser dicter ma conduite par cette Dame Údarásdiaga et sa troupe de soldats! Je vous le dis, très chère! Je n'ai pas survécu à mes nombreux maris pour me faire marcher dessus par une dame de la ville et des mâles en armures! »

Carmilla ne peut s'empêcher de rire à ces mots. Dame Rosie avait un fort caractère pour une femme dans un monde d'hommes. Mais cela la changeait des épouses bien sous tout rapport qui la fréquentaient lorsqu'elle était encore l'épouse d'un riche marchand et donc une femme d'influence.