L'Académie de l'Egide d'Avalon

Chapitre 3

Après une semaine à marcher dans les couloirs et annexes du château, notre jeune prodige avait eu le temps de repérer une multitude de coins calmes et apaisants. Ce matin-là, avant de commencer les cours, Ewen était assis à une petite table de bois usée, dans un coin reculé de la bibliothèque, un endroit qu'il avait découvert en suivant une vague piste inscrite dans son carnet. Le silence des lieux était presque palpable, seulement rompu par le froissement des pages et le craquement de la vieille chaise sur laquelle il s'était installé. Il feuilletait son carnet avec attention, lisant à voix basse des mots qu'il avait griffonnés à la hâte durant ses premiers jours à l'Académie.

« Les Héritiers... » murmura-t-il en plissant les yeux, la main glissant sur une note mal écrite. « Descendants directs des chevaliers de la Table Ronde... Le Clan des Héritiers domine tout.»

Il s'était vite rendu compte, dès ses premiers jours à l'Académie de l'Égide d'Avalon, que l'équilibre du pouvoir ne reposait pas uniquement sur les compétences magiques. Derrière les murs majestueux du château, dissimulés dans la forêt de Brocéliande, des dynamiques bien plus anciennes, bien plus enracinées, dictaient les relations entre les étudiants. Et Ewen, avec son histoire modeste et son don mystérieux, luttait pour trouver sa place.

« Pourquoi est-ce que ça doit être toujours comme ça ? » soupira-t-il en passant une main dans ses cheveux. Son pouvoir ne semblait pas suffisant aux yeux des autres. Même avec sa capacité rare à entrer en résonance avec les objets et les lieux, il ne venait pas d'une lignée prestigieuse. Il n'avait pas de blason, pas de récits glorieux tissés autour de son nom.

Soudain, Mathis entra dans la bibliothèque en souriant, comme à son habitude. « Ah, je savais que je te trouverais ici ! » lança-t-il en s'approchant. « Toujours en train de plancher sur ton carnet, hein ? »

Ewen haussa les épaules sans lever les yeux de sa lecture. « Ouais... j'essaye juste de comprendre comment fonctionne ce château. Il y a trop de secrets ici, et je ne me sens pas à ma place. »

Mathis, toujours avec son attitude désinvolte, jeta un coup d'œil au carnet. « Des secrets, c'est sûr. Mais tu sais, certains ne sont pas destinés à être découverts. »

« Peut-être, » répondit Ewen en refermant son carnet. « Mais regarde ça. » Il ouvrit de nouveau le carnet à une page précise, tapotant du doigt une ligne griffonnée à la hâte. « J'ai trouvé une mention d'un lieu caché, un passage secret sous la tour sud. Si j'en crois ce qui est écrit ici, il pourrait contenir des informations sur... sur les rivalités entre les Héritiers et ceux qu'ils appellent les "sans lignage". »

Mathis fronça les sourcils, ses traits habituellement détendus se plissant d'inquiétude. « Les Héritiers, hein ? » Il se laissa tomber sur la chaise en face d'Ewen, l'air soudainement sérieux. « Fais attention avec eux, Ewen. Ce ne sont pas que des étudiants arrogants. Ils ont un pouvoir bien réel, et leur influence dépasse largement celle des autres. »

Ewen hocha la tête. Il avait déjà remarqué la façon dont les Héritiers se comportaient. Ils se déplaçaient en groupes, toujours sûrs d'eux, toujours conscients de leur place dans l'histoire de l'Académie. Gabriel de Caradoc, avec ses pouvoirs élémentaires redoutables, en était un exemple frappant. Mais ce n'était pas juste leurs pouvoirs qui intimidaient, c'était leur héritage.

Dans une autre note, Ewen avait inscrit : « Les Héritiers ne respectent pas ceux sans lignage. Ils contrôlent le conseil étudiant, influencent les professeurs, et dirigent les compétitions magiques. » Il avait observé ces dynamiques dans les classes et les rassemblements. Les élèves comme lui, sans grande lignée derrière eux, étaient traités avec condescendance, voire mépris.

« Regarde cette note, » dit-il en montrant une autre page à Mathis. « "Les non-lignés, les 'sans lignage', sont ignorés ou utilisés comme pions par les Héritiers. Ceux qui s'opposent à eux finissent par disparaître des compétitions, voire de l'Académie." Tu penses que c'est vrai ? »