𝟓. 𝐔𝐧 𝐜𝐡𝐚𝐮𝐟𝐟𝐞𝐮𝐫 𝐩𝐚𝐮𝐫 𝐂𝐞𝐧𝐝𝐫𝐢𝐥𝐥𝐚𝐧

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𝓛é𝓪𝓱.

Je n'arrive pas à y croire.

Moi, Léah Valcan, 29 ans et des poussières, célibataire sans enfants ni animaux de compagnie – exception faite de « Poisse », le chat noir en peluche que je trimballe depuis ma naissance –, sans travail, dont l'unique projet d'avenir proche est l'éventuel achat d'une machine à café – elles sont en promo à partir de la semaine prochaine –, parce que j'en ai ma claque du soluble et que, moi aussi, je mérite un bon café à défaut d'un George Clooney, je me retrouve à l'avant d'une berline de luxe, moulée dans une robe de luxe, des chaussures de luxe aux pieds, un maquillage digne d'une star Hollywoodienne, une coiffure impeccable pour la première fois de ma vie et un homme ultra canon, aussi serviable que mystérieux, qui n'a pas encore pris ses jambes à son cou devant tant de mésaventures. Je cherche encore où tout a basculé.

Soit je suis en pleine chimère et le réveil va être très, très brutal, soit tout cela est bien réel et il va falloir se préparer à un tremblement de terre de magnitude 10 sur l'échelle de Richter avant le lever du soleil. Autant de prospérité dans ma vie ne saurait s'épanouir sans se répercuter jusqu'à l'autre bout du globe. Mais en attendant que la fin du monde soit officiellement annoncée, je compte bien en profiter !

— Où allons-nous, Cendrillon ?

Les chenilles dévoreuses d'estomac se transforment en papillons au simple son de sa voix, vibrante et sensuelle. Et ça, par contre, ça craint. Je ne m'attendais pas à ce que ce surnom déclenche en moi tout un tas de trucs aussi troublants les uns que les autres : un sourire idiot, piloté par mon cerveau libérant un peu trop de dopamine et auquel il n'est manifestement pas habitué ; une chaleur intense qui se répand sur mes joues, mon nez, mes oreilles, ma nuque, dévale ma colonne vertébrale pour se perdre quelque part entre mes reins ; l'affolement manifeste de mon rythme cardiaque, si véhément que j'ai peur qu'il soit capable de le distinguer au travers de ce silence lourd, profond, trop long.

Allo, la terre ? Il t'a posé une question !

— Au Château la Chèze, m'entends-je articuler, comme étrangère à la conversation.

— Oh ! Très bon choix !

Visiblement plus enthousiaste que moi sur notre destination, il s'engage dans la circulation dense sans prendre le temps de régler son GPS. Piquée au vif, ma curiosité soudaine me reconnecte entièrement à l'instant T, et j'en profite pour tenter d'en apprendre davantage sur mon chevalier servant. Après tout, je n'aurai peut-être pas d'autres occasions.

— Vous connaissez ? m'enquiers-je d'un ton qui se veut le plus détaché possible.

— Bien sûr ! J'ai grandi ici. C'est un lieu incontournable. Somptueux. Romantique...

Il sourit légèrement, laissant sa phrase en suspens et moi, en attente de la suite. Je pourrais l'écouter durant des heures, et pas seulement parce que je me sens redevable. Non. Il a un timbre qui apaise. Qui réchauffe. Qui enveloppe confortablement, comme un plaid en pilou-pilou au coin du feu, un soir d'hiver.

Sa mine s'assombrit quand, à la place du GPS, l'écran affiche un appel entrant d'une certaine « Andrea ». S'il s'agit de sa petite amie, au vu du voile sombre qui vient de recouvrir son visage si lumineux, il y a clairement quelque chose qui ne va pas entre eux !

Basile appuie sur un bouton, mettant fin à l'appel entrant. Feignant l'indifférence, les phalanges enroulées autour du volant, j'aperçois sa peau blanchir sous la pression qu'exercent ses doigts sur le cuir. Colère ? Déception ? Peur ? Je meurs d'envie de lui poser des questions, mais je me retiens. Après tout, nous ne sommes pas assez proches pour aborder ce genre de sujets trop personnels.

𝐒𝐔𝐌𝐌𝐄𝐑 𝐑𝐀𝐈𝐍 - 𝐂𝐚𝐧𝐝𝐲 𝐀𝐝𝐥𝐞𝐲Où les histoires vivent. Découvrez maintenant