Chapitre 3

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    Le désavantage avec l'armée, c'est qu'on a droit à de barbants cours de théorie, qui, c'est un fait, sont extrêmement soporifiques. Pour une fois que je ne suis pas là seule à m'endormir en classe...

    Le professeur Harlington -notre professeur de théorie- doit parler sans arrêt depuis près d'une heure et demie, tandis que nous luttons contre le sommeil. J'observe mes camarades : Ils sont tous plus âgés et plus musclés que moi, c'est presque effrayant lorsqu'on les observe plus attentivement.

    C'est à ce moment là que Harlington pose enfin une question intéressante, selon moi. Pensez-vous qu'on peut prédire l'endroit d'une bataille qui ne s'est pas encore passée ?

     Mon père, avant qu'il nous trahisse et parte je ne sais où, m'avait expliqué cela.
Je lève la main et des cris de surprise s'élèvent des élèves et Harlington, surpris, me donne aussitôt la parole.

     «Il y a plusieurs conditions pour pouvoir le savoir : Savoir si cette bataille aura lieu et quand. Dans ce cas là, on peut facilement le deviner grâce à la position de l'ennemi, ses tendances (C'est à dire s'ils attaquent plutôt pour nous mettre en difficulté où pour se mettre en facilité) et sa manière de combattre. À partir de ces informations, on peut aisément prévoir et même expliquer le lieu d'une bataille.»

     Des applaudissements résonnent dans la salle de classe, je suis visiblement la seule à connaître la réponse. Sans crier gare, les applaudissements cessent, je tourne la tête d'un côté à l'autre, m'efforçant de trouver la source de ce subit évênement lorsque je la vois, le visage emprunt de rage. Ma mère.

     C'est trop tard pour revenir en arrière, elle s'avance vers moi, ses talons claquant sur le parquet grinçant. Elle m'attrappe d'une poigne serrée, ses ongles s'enfonçant dans ma peau et me tire hors du bâtiment, me conduit jusqu'au palais et ne me lâche qu'une fois assise à son trône. Elle me scrute tandis que je l'observe, contenant la douleur que m'ont causé ses ongles.

     «Je comptais sur toi, Nyx. Tu m'as déçue à un point duquel je ne sais plus que faire de toi, lança-t-elle d'un ton calme mais ferme.
-Je...
-Non seulement tu as intégré les guerriers, me coupe-t-elle, mais en plus, tu as révélé l'existence de notre Royaume à une princesse opposante.»
J'écarquille les yeux et lui jette un regard que j'éspère suppliant. Comment sait-elle tout cela ?
«Les informations tournent vite, fait-elle comme si elle lisait dans mes pensées. Je l'ai su ce matin, tu étais déjà partie pour ton petit entraînement. J'ai demandé à ton amie, May, je crois, où je pouvais te trouver. Elle m'a immédiatement répondu que tu étais à l'armée.
-May n'aurait jamais fait ça, tu mens !
-Et pourtant si, elle t'as trahi, ma fille ! Et maintenant je me dois de te punir pour ce que tes paroles vont causer à notre peuple ! Tu es bannie à vie, un soldat te trouvant sur nos terres aura pour ordre de t'achever.»

    Je soupire, elle cache très mal son jeu. Elle tient à moi, sinon elle m'aurait condamné à mort. Mais, sa conscience lui a dit de me punir sans pour autant me tuer. Je pars malgré tout vers ma chambre, pour préparer mes affaires.

    Pendant ma marche dans les couloirs si familiers de ma maison, je réfléchis, que vais-je faire ? Je n'ai pas le choix, je dois évidemment quitter la forêt d'ici deux jours. Mais après ?

     J'ouvre la porte de ma suite et y entre prudemment, une once de peur se cachant dans mon être, consciente que ce n'est plus chez moi. Je prépare mes affaires, ne prenant pas la peine de m'encombrer des robes de velours de ma garde-robe. Je prends juste avec moi un sac à dos contenant les vêtements que je mettais à l'armée ainsi qu'un paquet d'allumettes et une pince pour mes cheveux.

                            👑👑👑

      Je marche dans l'immense forêt qui entoure notre village tout en me demandant comment Gwenn avait pu arriver jusqu'ici à pied. Elle n'avait pas l'air de marcher depuis des jours.

      Je continue mon chemin, ennuyée par l'absence de gens à qui parler, moi qui ai d'habitude toujours envie d'être seule, la présence de quelque être vivant me manque cruellement. Je poursuis ma route, évitant les ronciers, effrayant les rongeurs qui grignotent gaiement au pied des chênes.

     Un bruit inopiné plonge la forêt dans le silence, on dirait le cri de quelqu'un. Encore ? Je pense, nan... ce ne serait pas...

     Je vois Gwenn surgir des fougères et laisse échapper un soupir las.

    «Encore toi ? N'es-tu pas revenue chez toi avec tes robes de soie et tes couronnes de diamant ? Fais-je dégoulinante de sarcasme.
-J'ai bien essayé, mais dommage ! On m'a banni !
-Et pourquoi ça ? Tu as mal fait ton maquillage au bal d'hier soir ? Je rajoute dans le but de l'énerver.
-À cause de toi ! On ne m'a pas cru, à l'assemblée, quand j'ai affirmé votre existence, à toi et à ton Royaume de sadiques !
-Oh c'est drôle, j'ajoute, je pourrai en dire la même chose de toi. Figure-toi que dès que ma mère a appris que je t'avais rencontré, j'ai été bannie comme par magie !»  

     Elle me regarde, je la regarde, et nous comprenons que nous somme dans la même situation désespérée. J'ai du mal à l'admettre, mais nous allons devoir nous entraider, travailler ensemble.

     «On fait quoi, maintenant, dit-elle.
-On survit.»

     Ces paroles marquent la fin de notre discussion un peu lugubre, et nous nous sommes mises à marcher, comme je le faisais avant mais cette fois-ci j'étais seule, désormais je suis aux côtés de cette princesse présomptueuse.

       «Sinon, heuu... tu as... des amis, chez toi ? Dit Gwenn pour combler le blanc.
-Oui, enfin... je réfléchis, oui j'ai une amie. Peux-tu en dire autant ?
-Évidemment ! J'en ai des dizaines, et, si on considère mes fans comme mes amis, alors j'en ai des centaines !
-Okay, je réponds d'une voix tremblante.»

                           👑👑👑

    Quelques heures de marche et deux crises de nerfs de Gwenn plus tard, nous nous arrêtons dans une clairière. L'air frais de la nuit commence à transpercer nos fins vêtements -même si les miens restent plus adéquats que ceux de Gwenn-. Nous nous asseyons sur un tapis de mousse trempée et je tente d'allumer un feu grâce à mes allumettes. J'échoue pendant un moment, mais je n'abandonne pas, après tout je n'ai rien d'autre à faire. Après des dizaines de minutes à tenter d'embraser le bois sur une durée supérieure à dix secondes, j'y parviens enfin, et le feu grandit.

    Gwenn frissonne tandis que j'essaie de ne pas faire paraître ma souffrance face aux orteils gelés, aux plaques de bleus qui tapissent mon corps à cause des entraînements et à mes bottes que j'ai dix fois trop serrées.

      Je jette un regard vers Gwenn, elle s'est endormie, allongée les mains sous la tête. Je me résous à faire de même, utilisant comme berceuse sa respiration régulière et le crépitement du feu.

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⏰ Dernière mise à jour : 2 days ago ⏰

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