mais ou est gaby?

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Jordan était assis dans la voiture, son front appuyé contre la vitre froide, tentant de se réchauffer tant bien que mal. Dehors, le paysage défilait dans une obscurité seulement brisée par la lumière pâle des lampadaires. Le ciel, parsemé d’étoiles, semblait distant, inatteignable, tout comme les réponses qu’il cherchait au fond de lui. Il se sentait étrangement apaisé, comme si le poids des dernières heures s’était temporairement envolé. Pourtant, une pensée tenace refusait de le laisser tranquille : Gabriel.

Ce même Gabriel qui l’avait si violemment rejeté lorsqu’il avait tenté de lui tendre la main. Lui, pour qui il s’inquiétait comme si un lien invisible les unissait depuis toujours. Une amitié, il en rêvait, même si au fond de lui, il savait que Gabriel n’en voulait pas. Et pourtant, il ne pouvait s’empêcher de se demander si lui-même comprenait vraiment ce qu’il ressentait. Ces sentiments, aussi imprévus que déroutants, étaient là, profondément ancrés, et rien ne pourrait les effacer. Jordan laissa échapper un léger soupir, sa tête contre la vitre embuée par la chaleur de sa respiration, tandis que ses pensées dérivaient vers une question qui lui serrait le cœur : et si Gabriel ne récupérait jamais l’ouïe ?


L’angoisse de cette possibilité le rongeait, mais l’épuisement finit par prendre le dessus. Il s’endormit, son esprit agité s’apaisant lentement, bien que les questions demeurent. Il savait qu’il lui faudrait bientôt affronter Gabriel, mais pour l’instant, le sommeil offrait un répit bienvenu.

Plusieurs heures passèrent, et pendant ce temps, Marine et Tanguy se relayaient au volant, laissant Jordan récupérer. Ils savaient qu’il en avait besoin. Lorsqu’ils arrivèrent enfin à Paris, Marine déposa Jordan chez lui avant de repartir travailler. Il descendit de la voiture, l’esprit encore engourdi par le sommeil, mais toujours assailli par ces pensées qui ne le lâchaient pas.

- Jordan, attends, l’appela sa mentore depuis la voiture.

Il se retourna, le visage fatigué, mais curieux.

- Je sais que tu veux bien faire, mais pense à toi aussi. Prends soin de toi, d’accord ? dit-elle d’un ton doux, presque maternel
.

Jordan lui répondit par un sourire fatigué, avant de rentrer chez lui. Le silence de son salon lui pesait, accentuant ce vide intérieur qu'il ressentait. Incapable de calmer ses pensées, il se dirigea instinctivement vers la douche. L’eau chaude ruissela sur son corps, tentant de laver non seulement la fatigue physique mais aussi les tourments de son esprit. Il enfila un sweat noir, un jean, et quitta rapidement la maison.

Les écouteurs enfoncés dans ses oreilles, la capuche rabattue sur la tête, il marchait vers sa voiture d’un pas décidé. La musique résonnait faiblement en arrière-plan, mais ses pensées, elles, se bousculaient dans sa tête.  Que dirait-il à Gabriel ? Comment l’aborder après tout ce qui s’était passé ? La douche avait apaisé une partie de sa confusion, mais pas ses inquiétudes, ni ses émotions. Son cœur battait la chamade rien qu’à l’idée de le revoir.

Il arriva rapidement à l’hôpital, traversant à nouveau la horde de journalistes massée à l’entrée. Leurs caméras et leurs micros tendus vers lui, espérant capter la moindre information, mais Jordan les ignora. Il avait bien trop en tête pour se soucier des médias en ce moment. Une fois à l’intérieur, le médecin de Gabriel l’interpella.


- Monsieur Bardella, vous tombez à pic. Gabriel a retrouvé l’ouïe. J’allais justement lui annoncer qu’il pouvait sortir, dit le médecin, un sourire satisfait aux lèvres.

Jordan resta figé un instant, choqué par l’annonce.

- Déjà ? Mais vous êtes sérieux ? Vous savez très bien qu’il ne va pas bien ! Il a déjà tenté de se suicider cinq fois… Vous pensez vraiment qu’il ne va pas recommencer ? s’emporta Jordan, la voix tremblante de colère et d’inquiétude.

Le médecin soupira, visiblement habitué à ces réactions.

- Je comprends vos inquiétudes, Monsieur Bardella. Mais nous ne pouvons pas le garder plus longtemps. Sa sortie se fera sous condition stricte, bien entendu, répondit-il d’un ton calme, comme s’il expliquait la situation pour la énième fois.

Jordan souffla bruyamment, exaspéré par ce qu’il percevait comme de la négligence face à la gravité des événements des dernières semaines. Il suivit le médecin jusqu’à la chambre de Gabriel, la colère et l’inquiétude se mélangeant en lui.


Arrivé devant la porte, Jordan posa sa main sur la poignée. Il hésita un instant, un flot d’émotions le submergeant. Il savait que ce moment serait difficile, mais il n’avait pas imaginé à quel point. Finalement, il prit une profonde inspiration et poussa la porte.
La chambre était plongée dans l’obscurité. Seules les lumières des appareils médicaux créaient une faible lueur bleutée. Il distingua la silhouette d’un corps allongé sous les draps.

- Gabriel ? Je sais que tu n’as pas envie de me voir, mais on a une bonne nouvelle à t’annoncer, dit Jordan d’une voix douce, tentant d’apaiser l’atmosphère lourde.

Aucune réponse. Le silence dans la pièce était presque palpable, étouffant.

- Gabriel ? répéta-t-il, sa voix légèrement plus forte, teintée d’une pointe de panique.

Toujours rien. Un frisson parcourut l’échine de Jordan. Il fit le tour du lit, ses pas résonnant légèrement sur le sol carrelé, et souleva doucement la couette… pour ne trouver que des oreillers soigneusement disposés à la place du corps de Gabriel.
Le souffle coupé, Jordan scruta la chambre. Les armoires étaient vides, tout signe de la présence de Gabriel avait disparu. Un vide angoissant s’installa en lui.
Gabriel avait disparu.

Est-ce si dur d aimer Où les histoires vivent. Découvrez maintenant