regarde plus loin

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Jordan quitta la chambre, le cœur battant, la panique déformant son visage. Il repéra le médecin en pleine discussion avec une infirmière et se précipita vers lui, incapable de retenir son angoisse.

- Où est-il ? lança-t-il, d’une voix tremblante.

Le médecin le dévisagea, surpris, tandis que Jordan s’efforçait de contenir son émotion.

- Pardon ? demanda le médecin, perplexe.
- Gabriel ! Où est M. Attal ? répéta Jordan, la voix nouée, l’inquiétude perçant à travers son ton tendu.

Le médecin échangea un regard incertain avec une jeune infirmière qui semblait soudain très mal à l’aise.

- Eloïse, où se trouve le patient Attal ? lui demanda-t-il, son ton calme cherchant à tempérer la nervosité de Jordan.

La jeune infirmière détourna brièvement les yeux avant de répondre d'une voix hésitante :

- Euh…et bien…euh…comment dire…et bien il est sorti de sa chambre il y a environ une demi-heure. Il m’a dit qu’il allait prendre l’air et qu’il reviendrait dans dix minutes, mais j’ai été appelée pour une urgence, alors… je n’ai pas vérifié, balbutia-t-elle, visiblement consciente de l'ampleur de l'erreur.

Le regard de Jordan se fit perçant, une rage glacée se mêlant à sa panique.

- Attendez… vous êtes en train de me dire que vous avez laissé filer un patient suicidaire ? Vous réalisez à quel point c’est irresponsable ?! siffla-t-il entre ses dents, les poings serrés. S’il lui est arrivé quelque chose, je vous jure que je porterai plainte.…
- Du calme, Monsieur Bardella, nous allons le retrouver, tenta de rassurer le médecin en levant une main apaisante. Je vais déclencher un code jaune pour verrouiller les sorties, et nous allons partir à sa recherche. Eloïse, par où est-il parti ?
- Euh… Je… je crois qu’il a pris la cage d’escalier de secours, répondit la jeune femme, les larmes commençant à couler sur ses joues
- Tu crois ou tu en es sûre ? rugit Jordan, son regard perçant cloué sur elle.
- J’en suis sûre, vraiment désolée…, balbutia-t-elle, les larmes roulants maintenant librement sur ses joues.

Jordan se détourna brusquement, laissant la jeune infirmière derrière lui, et s'élança vers les escaliers avec le médecin. La panique le submergeait alors qu’il descendait les marches deux à deux, criant le nom de Gabriel, ses mots se répercutant dans les couloirs déserts, semblant s’évanouir dans le silence.

Il ouvrait chaque porte avec une urgence frénétique, fouillant les coins sombres, ses yeux balayant l’espace à la recherche de Gabriel. À chaque porte vide, l’angoisse grandissait. De son côté, le médecin montait les étages, appelant lui aussi, tandis que le silence de la cage d’escalier amplifiait leur inquiétude.

Puis, soudain, Jordan l’aperçut, à quelques étages en dessous, agrippé à la rambarde de la terrasse, ses épaules affaissées par la fatigue. Gabriel semblait sur le point de glisser, ses mains crispées sur la rambarde comme si elles tenaient à peine le poids de son corps. Jordan se précipita vers lui, son cœur battant à tout rompre, partagé entre le soulagement et une colère sourde.

- Gabriel ! s’exclama-t-il, retenant à peine son émotion. Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu devrais être dans ta chambre, tu viens à peine de sortir du coma…

Gabriel tourna lentement la tête vers lui, ses yeux reflétant un mélange de douleur et de défi.

- JUSTEMENT ! cracha-t-il, la voix brisée. J’ai déjà perdu assez de temps ici…Je veux sortir, maintenant.
- Mais t’es sérieux, Gabriel ? s’indigna Jordan, le regard intense. Tu comptes juste partir, et après ? Dis-moi, qu’est-ce que tu vas faire en sortant de cet hôpital sans rien changer ? Tu penses que tout va s'arranger comme ça ?

Jordan attendit une réponse, mais Gabriel restait muré dans un silence obstiné, ses yeux évitant ceux de Jordan. Il semblait emprisonné dans ses propres souffrances, se refermant comme une coquille, incapable d’affronter ce qui le rongeait vraiment. Jordan le fixa, le cœur serré, comprenant peu à peu que Gabriel refusait de laisser quiconque approcher ses failles, par peur d’être encore trahi ou déçu.

Il soupira, puis reprit d'une voix plus douce, mais empreinte d’une détermination inébranlable.

- Tu sais pas, hein ? Ben moi je sais. Si tu sors maintenant, tu vas te retrouver seul, face aux journalistes, face à tout ce que tu fuis. Et qu’est-ce qui va se passer ensuite, hein ? Tu retournes au boulot, tu continues tes traitements, et au moindre coup dur, tu t’effondres à nouveau. Jusqu’à ce que… jusqu’à ce que…

Gabriel détourna le regard, mais Jordan vit une lueur de défi se mêler à une profonde résignation.

- Et alors ? C’est ce que tu veux, non ? Si je meurs, il n’y a plus de rivalité, plus de concurrence… Alors pourquoi tu t’obstines à vouloir me sauver ? répliqua Gabriel, une lueur de défi et de résignation dans les yeux.

La remarque, cinglante, coupa Jordan net. Il resta silencieux un instant, la mâchoire serrée, luttant contre l’amertume qui montait en lui. Puis, dans un souffle, il répondit, plus doucement cette fois :

- Gabriel… la vie ne se résume pas à la politique. Tu crois vraiment que tout le monde te voit comme un rival ? Tu as des gens qui tiennent à toi, qui… qui ne te considèrent pas seulement comme un pion dans un jeu. Tu as pensé à ta famille ? À tes amis ? À tous ceux que tu laisserais derrière toi ?

À ce moment-là, le médecin arriva en courant et, ensemble, ils soutinrent Gabriel pour le remonter dans sa chambre. Alors qu’ils le ramenaient, Jordan sentit une vague de tristesse l’envahir. Il savait que Gabriel cachait des blessures profondes, mais en cet instant, il ne voyait qu’un homme épuisé, brisé, tentant de s’accrocher à une lueur d’espoir qui semblait si loin.

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