Je sors du lycée, exténuée par cette journée de Mars. Enfin le week-end. En descendant du bus, il pleut des cordes. J'avance et je trébuche sur une petite pierre qui se trouve sur mon chemin. Je tombe de fatigue, mon sac semble peser plus lourd que du plomb. Je me relève, et je cours en larmes jusqu'à chez moi. Je rentre dans le salon, trempée des pieds à la tête, d'eau et de larmes. Je suis épuisée. C'est encore une fois cet éclair qui me traverse. Mon dos me fait incroyablement mal.
Je prends une douche bien chaude, j'en ai besoin. La fatigue et le froid accentuent les douleurs. Je suis forcée de m'asseoir tant la fatigue m'empêche de rester debout. En sortant de la douche, avant de m'habiller, je pose le long de mon dos une bande chauffante pour soulager ma douleur. Après quelques minutes, la souffrance s'atténue, et je peux enfin me calmer.
Quand j'étais plus petite, j'ai eu un accident. Un débris d'acier a touché ma colonne vertébrale. Depuis j'ai un morceau de ferraille planté dans le dos et c'est cette chose, immonde, ignoble, impossible à retirer, qui me provoque ces éclairs de douleur. Cependant, à part mes parents personne ne le sait, et ma meilleure amie en sait très peu. Je fais bonne figure par habitude mais parfois je suis à bout de force et je voudrais tout lâcher. Cela vous est déjà arrivé de vouloir tout envoyer valser comme de vulgaires feuilles mortes dans un vent d'automne ? C'est le sentiment qui me traverse en ce moment. Mais je n'ai aucunement la possibilité de le faire. C'est dommage, n'est-ce pas ? Mais rien n'y fait, je suis bloquée ainsi.
En m'installant sur le sofa, seul moment de répit depuis le début de cette dure journée, je regarde mon téléphone portable. J'aperçois une notification sur l'écran, un message de Tim. Tim et moi sommes amis depuis deux ans maintenant, et nous réfléchissons de manière très subtile, voire confuse, à sortir ensemble. Nous nous portons une confiance mutuelle tels frère et sœur, mais nous nous disputons tels deux jeunes amants. C'est étrange car cette discussion n'a lieu que par l'intermédiaire de Sana, ma meilleure amie que Tim apprécie vraiment (mais pas autant que moi, il le lui a lui-même confié). Elle me demande souvent : « Quand est-ce que l'un de vous deux va se décider à avouer ses sentiments à l'autre ? Ça craint, sérieux, votre façon de faire... » conclut-elle en rigolant. Et moi-même je me pose parfois la question entre deux pensées. Mais je n'y arrive pas, c'est étrange, je ne sais pas comment faire autrement. Mais en ce moment il est souvent en colère et nous nous disputons de plus en plus.
Je lis donc ce qu'il m'a écrit :
"De : Tim
Alors pas trop trempée ? Fais attention de pas prendre froid ce serait dommage que tu ne puisses pas venir en cours demain..."
Son ironie récurrente aura ma peau... Il ne changera donc jamais. C'est la preuve qu'il est toujours un peu énervé. Je prends donc le parti de jouer le même jeu que lui et lui retourner la question telle qu'il me l'a posée :
"A : Tim
Pas la moindre goutte ne m'a touchée ! Cela veut dire que je pourrai venir t'embêter demain matin dès huit heures, et tu le sais pertinemment... à moins que tu ne te sois enrhumé toi-même ?"
Je l'imagine déjà rigoler dans ma tête. Il me connait (presque) par cœur, et il sait aussi que je cherche à le faire sortir de sa colère que je trouve un tant soit peu futile. Il a tendance à s'énerver pour un rien. Il me fascine pour cela car je suis exactement pareille.
Nous continuons à discuter et un de ses messages me fait éclater de rire. Je ris tellement que ma douleur se relance malgré la chaleur. Je suis obligée de prendre une bouffée d'oxygène pour me calmer. Je ne peux même plus vivre normalement, je ne peux plus respirer, je m'asphyxie presque... Voyant que je ne réponds pas pendant un long moment, Tim me renvoie un message affolé :
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Euthanasia
Fiksi UmumJane est une jeune lycéenne qui, victime dans son enfance d'un accident, essaie de vivre le plus normalement possible. Essayant de gérer sa souffrance, l'on suit sa vie de jeune fille, ses amours, ses amitiés, ses rêves, mais aussi sa manière de gér...