C'était il y a longtemps. Quand j'étais jeune et que mon cœur battait pour les filles. On aurait dit qu'elle était morte, Margot, sauf que sa poitrine gonflait assez régulièrement. Et puis Margot s'est arrêtée. Gonfler pour récupérer l'air qui l'entourait, invisible, était devenue une fausse nécessité, une douleur trop grande pour continuer à le faire.
Ses mains bougeaient sur les draps blancs au début, ses lèvres aussi - comme si elle me parlait - mais tout ça s'est arrêté. Mais ça va, j'veux dire, j'me lamente pas.
J'y croyais pas trop à son incroyable pouvoir de résurrection. Elle était morte et puis c'est tout.
Déjà à huit ans, son cœur s'arrêtait. Sans lui demander son avis. Ça s'arrêtait juste et ça attendait. C'était parce que Margot ne souriait pas assez. Moi, c'est comme ça que je le voyais. La vie avait vu. La vie avait pris.
Ses respirations abracadabrantes, son cœur qui vivait sans son corps, tout ça prouvait qu'elle ne voulait pas de la vie qu'on lui avait préparée lorsqu'elle était un fœtus.
