Chapitre 3

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Après la superbe soirée d'hier soir, où j'avais célébré une nouvelle étape dans la vie de Adèle Lefevre, mon amie proche et mon binôme, je me rendis à l'agence comme d'habitude. L'excitation de la veille flottait encore dans l'air, mais je savais qu'il me fallait me concentrer sur mes projets et mes affaires. L'architecture moderne du bâtiment me semblait familière, les murs ornés de tableaux représentant des propriétés en vente m'inspiraient. Je pris place à mon bureau, entourée des bruits de l'agence : le cliquetis des claviers, les conversations animées des collègues, et le bourdonnement des téléphones.
Alors que je commençais à organiser mes tâches du jour, *** s'approcha de moi et me tendit une enveloppe.
— "C'est pour toi," dit-elle d'un ton neutre, mais je pouvais déceler une pointe d'inquiétude dans sa voix.
Je fus très étonnée. Je ne m'attendais pas du tout à recevoir une lettre ici, à l'agence. Je décryptai rapidement l'enveloppe, essayant de deviner qui pouvait bien m'envoyer une correspondance dans ce cadre professionnel. Mes pensées s'embrouillèrent, et une petite appréhension s'insinua en moi.
Quand je lus le nom de mon notaire, un frisson d'angoisse me parcourut. La dernière fois que j'avais reçu une lettre de sa part, c'était au sujet de la succession de mes parents, décédés il y a quelques années. Ce moment-là avait été si douloureux, si dévastateur. Je savais que ce qui se passait n'était pas anodin. Je décidai de ne pas ouvrir la lettre tout de suite, afin de me préserver. Je ne voulais pas me déconcentrer et risquer d'être moins productive si c'était une mauvaise nouvelle.
La journée défila à toute vitesse. Je m'enchaînai dans les mails, les appels, les rendez-vous et toutes sortes de tâches qui occupaient mon esprit. Chaque nouvelle mission me faisait oublier l'existence de cette lettre, qui reposait là, sur mon bureau, comme un poids invisible. Cependant, une légère angoisse persistait au fond de moi.
Alors que je cherchais un dossier dans mon bureau en désordre, mes yeux tombèrent à nouveau sur l'enveloppe. Elle brillait sous la lumière fluorescente de l'agence, m'appelant presque. Mon cœur se mit à battre plus vite. Ne pouvant pas succomber à la pression plus longtemps, je pris une grande respiration, puis l'ouvris soigneusement.
Je dépliai la lettre, mes mains tremblant légèrement, et commençai à lire. Chaque mot semblait me frapper comme un coup de tonnerre. J'eus l'impression que le temps s'arrêtait, que le monde autour de moi s'effaçait. Mes yeux parcouraient les phrases, mais je peinais à en comprendre le sens. J'étais pétrifiée. Ma tête devint lourde, et ma respiration se fit saccadée. Je ne parvenais plus à respirer, l'angoisse me coupant le souffle. Mon corps tremblait de partout.
Je vérifiai une énième fois l'expéditeur. Non, ce n'était pas une fausse blague. C'était bien mon notaire. Ce qui était inscrit dans la lettre était véridique. Une demi-sœur. J'apprenais aujourd'hui que j'avais une demi-sœur dont la mère était décédée il y a peu, et que j'étais devenue sa responsable légale. Mon esprit refusa d'accepter cette nouvelle, trop lourde à porter.
Je restai immobile, les yeux dans le vide, absorbée par cette information qui me dépassait. Les minutes s'écoulèrent lentement, chaque seconde semblant une éternité. Je n'avais même pas réalisé que mon collègue, Jérôme, s'était approché de mon bureau.
— "Ça va, Gloria ?" me demanda-t-il, son haleine caféinée chatouillant mes narines.
Je l'observai à peine, encore perdue dans mes pensées. Impuissante à répondre, je soufflai un "oui" peu convaincant. Il resta devant moi un moment, fronçant les sourcils, visiblement inquiet, puis reprit son chemin, me laissant seule avec ma détresse.
À cet instant, je réalisai que je ne pouvais pas extérioriser mes émotions. Ma meilleure amie, Mila, habitait loin, et nos vies avaient pris des directions différentes au fil des années. Mon binôme, Adèle, était en télétravail et tous ceux présents dans l'agence aujourd'hui n'étaient pas vraiment proches de moi. Une solitude pesante s'installa, un vide immense devant cette nouvelle qui me bouleversait. J'avais toujours été la fille forte, celle qui gardait ses émotions enfouies au fond d'elle, mais cette fois, je me sentais totalement désemparée.
Je repensai à la lettre, à ce qu'elle contenait. Une demi-sœur. Comment cela était-il possible ? J'avais toujours cru être la seule à avoir perdu mes parents, à porter le poids de leur absence. Et maintenant, cette nouvelle responsabilité... Cela me semblait trop. Les souvenirs de ma jeunesse me revinrent en mémoire, des images floues de ma famille, de mes parents, de l'amour et des rires qui emplissaient notre maison avant que tout ne bascule. Comment avais-je pu passer à côté d'une sœur ? J'étais incapable d'imaginer les épreuves qu'elle avait traversées.
Je fermai les yeux, tentant de chasser ces pensées, mais elles revenaient, plus pressantes que jamais. Je me visualisai face à cette jeune fille, perdue, sans repères, comme je l'avais été à son âge. Je ressentais une vague de compassion pour elle, mais aussi une immense peur. Je n'étais pas prête à être responsable de quelqu'un d'autre. Que pouvais-je offrir à cette adolescente ? Je n'avais même pas réussi à gérer ma propre douleur.
La journée continua de défiler, mais tout semblait flou autour de moi. Je passai des heures à jongler avec mes tâches sans vraiment y prêter attention. Les appels que je prenais étaient des échos lointains, les conversations des collègues s'évanouissaient dans un brouhaha indistinct. Je me concentrai sur le travail, mais mon esprit était accaparé par cette nouvelle.
Finalement, la journée de travail toucha à sa fin. Alors que je fermai mon ordinateur et rangeai mes affaires, un sentiment d'angoisse m'envahit. Je savais que je ne pouvais pas rester là à éviter cette lettre plus longtemps. Je décidai de me rendre chez le notaire le lendemain, pour discuter de cette nouvelle situation et comprendre ce que cela signifiait réellement. Une nouvelle vie se dessinait à l'horizon, et j'avais besoin de réponses.
Le trajet vers chez moi fut long. Les rues se succédaient, mais je ne voyais rien. Mes pensées tourbillonnaient, entre l'angoisse de la situation et la curiosité de connaître cette demi-sœur. En arrivant, je me laissai tomber sur mon canapé, épuisée. Je pris la lettre en main, la relus une fois de plus. Les mots résonnaient dans ma tête : "Vous êtes désormais la responsable légale de votre demi-sœur..."

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 15 ⏰

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