Chapitre deux

86 16 15
                                    

Je te laisserai des mots - Patrick Watson

Maiden - (Quelques heures après son réveil)

Malgré ma lutte acharnée contre le sommeil, je n'ai pas pu résister à la fatigue. Mais en dépit des nombreux cauchemars, ce moment de repos m'a été bénéfique. Je me sent un peu plus en forme qu'hier. J'émerge lentement, cependant lorsque je réalise où je me trouve, mon cerveau se remet instantanément en marche. À nouveau, une flopée de questions se bouscule dans ma tête, je tente de les chasser afin de profiter pleinement du paysage incroyable qui s'offre à moi.

Derrière la fenêtre, j'aperçois le vent souffler au point de faire vaciller les arbres dans tous les sens. Quelques feuilles se décrochent et s'envolent au passage. J'apprécie cette vue. J'affectionne tout particulièrement les ciels sombres et tristes remplis de nuages gris. Mais ce que j'aime par-dessus tout dans cette saison, c'est les temps frais et pluvieux. Enfant, j'adorais filer en douce dans la chambre de mes parents, car je pouvais grimper sur le toit en passant par leur balcon. Une fois là-haut, la vue était époustouflante, surtout en période hivernale. Mes mains et mes baskets glissaient sur les tôles mouillées, je luttais difficilement pour ne pas tomber et réussir à atteindre ma destination.  Je savais que tout cela été dangereux pourtant je ne pouvais m'en priver.  Le souffle du vent froid et les gouttes de pluie ruisselantes sur ma peau me faisaient me sentir libre. Je veux à nouveau sentir cette odeur unique qui n'appartient qu'à l'hiver.

Ma bouche asséchée me force à me détourner de ce spectacle magnifique que m'offre la nature, pas plus mal finalement, car si je m'écoutais j' y resterai scotché pendant des heures. Quand j'ingurgite le peu de salive qu'il me reste je me rends compte que ma gorge est beaucoup moins douloureuse que la veille.

Je crève de soif par contre.

J'observe ma table de chevet et remarque le fond d'eau restant dans le petit gobelet en plastique, je tends mon bras et arrive à l'atteindre. Je l'approche de mes lèvres, mais une faiblesse dans ma main m'empêche de déverser le contenu dans ma bouche, celui-ci préférant s'écouler sur mon menton ainsi que sur ma chemise de nuit blanche. Comme un putain de bébé! Je grommelle à défaut de pouvoir hurler ma colère. J'empoigne le verre vide puis, de toutes forces restreintes, je l'écrase et le jette dans la pièce. Celui-ci ne va pas plus loin que le bout de mon lit. Je souffle par le nez laissant le haut de mon corps retomber sur le matelas. Même si je suis conscient que j'ai besoin de temps pour m'en remettre, j'ai beaucoup de mal à accepter ma condition physique, ça me ronge de l'intérieur. Je ne peux que très peu me servir de mes membres encore endoloris par le coma, je déteste l'idée de devoir me faire aider par autrui. J'ai toujours eu le contrôle sur mon corps. Je suis un homme sportif, depuis toujours, je suis le meilleur dans mon sport de prédilection, le basket. Je m'entraîne chaque jour, comme un acharné, mon quotidien est strict et discipliné, je suis en harmonie avec mon corps, ma force et mes capacités physiques. Cette situation est un supplice pour moi. Toutefois,  je dois me raisonner, bien que cela reste difficile tant ma colère est ancrée au plus profond de moi, une longue journée m'attend, il faut que je reste focus et puis qui sait peut-être, que quelqu'un finira par me raconter ce que j'ai besoin d'entendre. Je prends une grosse inspiration, pensant que celle-ci puisse me fournir un tant soit peu de courage. Seulement, l'oxygène qui s'introduit dans mes sinus laisse sur son passage une senteur qui ne me procure pas l'effet escompté.

Cette putain d'odeur de... brioche.

Flashback

Maiden, 6 ans.

—Mamaaaaaan... Maiden m'a encore mordu...

Elle hurle dans mes oreilles puis se met à courir en direction de sa mère et de mon père. Je ne l'ai même pas mordue fort en plus, enfin, je crois. J'aime bien la mordre quand elle m'embête, non, c'est faux, j'aime la mordre tout le temps parce que j'aime le goût que sa peau laisse dans ma bouche. Et si ça lui fait mal, tant pis, après tout, elle n'a qu'à pas venir jouer avec moi, je ne veux pas d'elle à mes côtés. Papa n'arrête pas de me dire qu'elle est ma sœur, mais ce n'est pas vrai, je n'ai pas de sœur. Je n'en veux pas. Encore moins elle. C'est trop chiant les filles en plus, ça fait que pleurer et rigoler fort, pour rien. Lys est super énervante aussi, parce qu'elle est moche, non, c'est pas vrai, elle est très jolie. Elle a de beaux yeux bleus avec de très grands cils, grands jusqu'au ciel. Je la déteste.

Forbidden Flower. 1-Liens toxiques Où les histoires vivent. Découvrez maintenant