I see you

1: Dans les Ombres de San Francisco

L'air frais du matin imprègne les rues de San Francisco, encore silencieuses avant que la ville ne s'éveille complètement. L'équipe avance rapidement sur le trottoir, leurs silhouettes nettes se détachant sous le ciel gris. À leur tête, Teresa Lisbon, une femme aux cheveux châtains coiffés en un chignon strict, toujours impeccable et résolue. Patrick Jane, consultant au sourire désinvolte mais au regard perçant, marche à côté d'elle, les mains dans les poches de son manteau, observant tout sans vraiment sembler y prêter attention.

Derrière eux, l'équipe complète suit. Wayne Rigsby et Kimball Cho, deux agents robustes et professionnels. Wayne, grand, musclé, à la démarche assurée, est un homme d'action. Kimball, plus discret, avec un t'acte assez présent. Et puis, il y a Sam Blake, celle dont l'esprit est aussi vif que celui de Jane. Mais contrairement à Jane, elle ne se vante pas de ses talents. Elle cache ses capacités sous un masque d'efficacité froide, gardant toujours le contrôle, sans jamais laisser paraître qu'elle pourrait lire les gens avec la même précision que Jane.

Ils arrivent devant la maison victorienne délabrée, entourée de rubans de police. À Lisbon prend les devants, s'adressant à l'équipe d'une voix ferme mais calme.

— "C'est un meurtre multiple. Une famille de quatre personnes — les parents et deux enfants. Aucun signe d'effraction. On est en terrain glissant, les médias sont déjà en route, alors faisons vite."

Jane, déjà en train de scruter la maison d'un air nonchalant, sourit légèrement, comme s'il se délectait du défi.

— "On entre et on voit ce que nous avons," dit Lisbon, avant de se tourner vers Sam. "Blake, tu t'occupes des premières impressions. Jane, tu fais ce que tu sais faire avec les voisins."

Sam hoche la tête en silence. Elle sait déjà ce qu'elle va trouver, elle le sent, mais elle garde son calme, dissimulant cette intuition fulgurante qui menace de surgir à chaque instant. Ses compétences de déduction sont aiguisées, tout comme celles de Jane, mais elle préfère que personne ne sache à quel point.

Patrick jette un regard vers elle, curieux. Il a souvent remarqué que Sam était plus subtile, plus prudente que lui, et cela le fascine. Mais aujourd'hui, quelque chose semble l'agiter encore plus que d'habitude.

Ils franchissent la porte d'entrée. L'intérieur de la maison est plongé dans un silence lugubre. L'odeur du sang est encore forte. Dans les chambres, les corps sont encore sur place — un père, une mère, et leurs deux enfants. Leur mort est violente, mais rapide.

Sam s'arrête devant l'une des chambres, son regard balayant la scène sans en avoir l'air. Les détails lui sautent aux yeux : la position des corps, l'angle des blessures, la disposition de la pièce. Tout est parfaitement clair dans son esprit. Elle pourrait presque deviner qui est le coupable, mais elle reste impassible, ne laissant rien transparaître.

Jane, de l'autre côté du couloir, observe les mouvements des policiers et des voisins. Son attitude décontractée masque une intense concentration. Il remarque aussi le comportement de Sam. Il sent que quelque chose cloche chez elle, quelque chose qu'elle essaie de dissimuler.

Sam fait un pas en avant, prenant une longue inspiration. Cette scène lui rappelle des souvenirs, ceux qu'elle s'efforce d'oublier. Le sang, les visages inertes... Cela la ramène à des moments qu'elle a passé des années à enterrer. Une goutte de sueur perle sur sa tempe, mais elle l'essuie rapidement, reprenant contenance avant que quiconque ne puisse le remarquer.

Patrick approche lentement, toujours avec cette légèreté apparente.

— "Tu sens ça aussi, hein ?" murmure-t-il avec un sourire en coin, ses yeux fixés sur la scène du crime. "Il y a quelque chose de... non conventionnel ici. On dirait presque que tu savais déjà ce que tu allais trouver."

Sam lui jette un regard furtif, ses yeux brièvement inquiets avant de redevenir impénétrables.

— "Ne commence pas, Jane. On est là pour résoudre un crime, pas pour jouer à deviner," répond-elle calmement, bien qu'intérieurement elle sente qu'il a percé son masque.

Mais Patrick n'est pas dupe. Il se demande depuis longtemps ce que Sam cache, car il sait reconnaître quelqu'un qui maîtrise les mêmes compétences que lui, quelqu'un qui sait lire les signes, les expressions, les gestes imperceptibles. Il sent qu'elle ne montre pas tout son jeu. Et aujourd'hui, plus que jamais, il a l'impression que quelque chose ne va pas chez elle.

Pendant ce temps, Lisbon discute avec Wayne et Cho à l'intérieur. Les deux agents fouillent la maison à la recherche d'indices matériels, laissant Sam et Jane seuls un instant dans ce couloir empreint de mort.

— "Ça t'affecte plus que tu ne veux bien l'admettre, non ?" dit Patrick, sa voix douce, sans jugement.

Sam ne répond pas immédiatement, son regard figé sur le corps de la petite fille. Son cœur bat plus fort, la scène réveille un traumatisme enfoui, mais elle n'a jamais laissé personne voir cette partie d'elle.

— "Je fais juste mon boulot," finit-elle par répondre, sa voix distante.

Patrick la fixe un instant, puis baisse les yeux, laissant le silence s'installer.

— "Tu sais, cacher ce que l'on est vraiment, c'est épuisant. J'en sais quelque chose."

Sam tourne lentement la tête vers lui, ses yeux le dévisageant un instant. Pour la première fois, elle semble sur le point de parler, de révéler un fragment de la vérité. Mais elle se retient, refermant la porte de son passé avec une maîtrise presque douloureuse.

— "On devrait se concentrer sur l'enquête," dit-elle finalement, presque comme une échappatoire.

Patrick ne répond pas, mais son sourire léger disparaît. Il sait que cette enquête n'est que le début de quelque chose de bien plus profond. Pour Sam, mais peut-être aussi pour lui.