Ma destinée

Chapitre 1

Pdv Catalina

Je n'avais jamais envisagé de vivre loin de ma mère, encore moins d'être proche de mon père. Depuis toujours, c'est elle qui avait été mon pilier, celle qui m'avait accompagnée dans chaque étape de ma vie. J'ai grandi avec sa présence constante, ses conseils, ses attentions. Elle représentait la figure parentale centrale, celle sur qui je pouvais compter chaque jour. Mon père, en revanche, était une silhouette plus lointaine, presque éphémère dans ma vie. Il ne se manifestait que rarement, surtout lors des occasions spéciales, comme les fêtes de fin d'année ou mon anniversaire. En dehors de cela, nos interactions étaient limitées à quelques appels occasionnels, jamais très longs ni profonds.

Durant mon enfance, il m'invitait parfois à passer les vacances d'été chez lui, mais c'était exclusivement pour mon anniversaire, comme s'il essayait de marquer le coup, d'assumer un rôle paternel un minimum. Pourtant, au fond de moi, je savais que ces moments n'étaient qu'une forme d'obligation, une tradition annuelle plutôt qu'un réel désir de tisser un lien plus fort. Mon père n'a jamais été très présent dans ma vie quotidienne, et cela m'a longtemps laissé une sensation de vide. Je ne pouvais m'empêcher de penser qu'il se contentait d'être le parent distant, celui qu'on voit à de rares occasions, mais qui ne prend jamais véritablement part à votre existence.

Les rares souvenirs que j'ai de mes deux parents ensemble sont malheureusement marqués par la violence de leurs disputes. Quand ils étaient encore mariés, avant leur divorce, les scènes de cris et de conflits étaient monnaie courante à la maison. Je me rappelle surtout des moments où ma mère, exaspérée et en colère, frappait mon père. Ces images sont gravées dans ma mémoire, et elles constituent les seules traces que j'ai de leur vie commune. Après leur séparation, ces scènes ont cessé, mais elles ont laissé une empreinte indélébile dans mon esprit. Ce passé non joyeux  a probablement contribué à mon éloignement émotionnel de mon père.

Malgré cette situation, je savais au fond de moi que mes deux parents m'aimaient. Ils avaient chacun leur manière de le montrer, même si l'un d'eux était beaucoup plus absent que l'autre. Ma mère me comblait d'affection, tandis que mon père, malgré son éloignement, essayait tout de même de garder un lien, aussi mince soit-il.

Quand mes 19 ans approchèrent, comme chaque année, mon père m'invita à passer quelques jours chez lui à Buenos Aires pour célébrer mon anniversaire. C'était devenu une sorte de tradition, une invitation que je n'avais jamais refusée, malgré la distance qui nous séparait. Ces moments passés chez lui, bien que ponctuels, avaient une importance particulière, presque comme une manière de maintenir un semblant de relation familiale. Cette année encore, j'avais accepté. C'est pour cette raison que je me trouvais en voiture, depuis trois heures déjà, en route vers la grande maison de mon père, sentant l'appréhension mêlée à l'habitude. Approchant de la demeure, je me demandais comment cette nouvelle rencontre allait se dérouler.

Comparée à l'endroit où je vivais habituellement, la maison de mon père était tout simplement gigantesque. Même si je ne pouvais pas vraiment me plaindre de ma propre situation, sa demeure dépassait de loin tout ce que j'avais connu. Elle était au moins dix fois plus grande, avec des pièces spacieuses, des plafonds hauts et des couloirs interminables. Chaque coin de la maison respirait le luxe, de la décoration aux meubles anciens en passant par les immenses fenêtres qui laissaient entrer une lumière naturelle éclatante.

Ce qui m'a toujours intriguée, c'est qu'il vivait seul dans cette immense maison. Il n'avait ni femme ni enfants autour de lui au quotidien, et pourtant il avait choisi de résider dans un lieu conçu pour abriter une grande famille, avec plusieurs chambres et des espaces de vie si vastes qu'on s'y perdait presque. Je n'ai jamais vraiment compris pourquoi il avait besoin de tout cet espace pour lui seul. Peut-être que c'était une façon de combler un vide, ou simplement un choix lié à son style de vie.