Debout devant le miroir, je scrute mon reflet, une silhouette familière, mais pourtant étrangère. Mes yeux, verts en amande et éclatants, capturent la lumière, mais ils ne cachent pas la vérité troublante que je perçois sur ma peau. Mon corps, bien que fin et élancé, est parsemé de cicatrices, comme un paysage marbré d'histoires inachevées.
Certaines évoquent des coups de fouet, d'autres des entailles profondes, des marques laissées par des lames invisibles qui ont tranché à travers ma chair et mon âme. Mon père m'a toujours dit que c'étaient des taches de naissance, des marques spéciales qui me rendaient unique. J'ai fait semblant de le croire, m'accrochant à ses mots réconfortants, mais au fond, une voix sourde murmure que cette explication ne fait que masquer une réalité plus troublante.
Pourquoi moi ? D'où viennent elles vraiment ? Chaque cicatrice est une question qui résonne dans ma tête, un rappel constant de quelque chose que je ne peux pas saisir. Elles sont les témoins d'une douleur ancienne, des souvenirs d'un passé que je ne connais pas. Je me penche en avant, scrutant chaque détail. L'une d'elles, sinueuse et parfaite, ressemble à un point d'interrogation gravé dans ma chair. Elle me défie, me pousse à m'interroger sur son origine, sur les vérités enfouies dans mon propre passé.
Je frémis à l'idée que ces marques pourraient être liées à des événements que j'ai oubliés, des fragments de mémoire enfouis sous des couches de néant. Mes souvenirs sont flous, comme des ombres d'un temps révolu. Je n'ai aucun souvenir de moi-même avant l'âge de six ans, aucune photo, aucun récit. C'est comme si ma vie avait commencé à un moment précis, et tout le reste s'était évanoui dans le néant. Ce vide me pèse, me laisse une sensation d'incomplétude, un trou béant dans ma mémoire.
Un détail attire mon regard, un fil rouge enroulé autour de mon poignet. Depuis toujours, il est là, discret mais constant, un rappel mystérieux que je ne peux pas ignorer. Je ne sais pas comment je l'ai eu ni pourquoi il est là, mais je sens qu'il est lié à quelque chose de plus grand, à une légende qui parle de liens invisibles tissés entre les âmes. Cette pensée me trouble, surtout dans ce contexte de douleur et de cicatrices. Est-ce que ce fil représente un lien que je ne comprends pas ? Un destin que je ne peux pas fuir ? L'idée que je suis liée à quelqu'un, quelque part, me donne des frissons, mais aussi une lueur d'espoir. Peut-être que ce lien pourrait expliquer certaines de mes cicatrices, comme si elles étaient des marques de cette connexion invisible.
Je détourne le regard du miroir et me concentre sur Miel, mon chat au poil long crème et légèrement roux, qui se prélasse sur le lit. Sa présence est un réconfort dans cette solitude. Miel est l'un des rares éléments constants dans ma vie, un compagnon silencieux qui semble comprendre mes tourments. Lorsque je caresse sa fourrure douce, je cherche du réconfort dans sa chaleur, dans ce lien silencieux qui nous unit. Ses yeux dorés brillent comme des phares dans la nuit, me guidant à travers mes pensées tumultueuses. Il se frotte contre ma jambe, et je me sens un peu moins seule, un peu plus ancrée dans le présent.
Je pense à ma passion pour les livres, à ces mondes imaginaires qui me permettent d'échapper à ma réalité. Les mots m'enveloppent, me transportent loin des cicatrices visibles et invisibles qui marquent ma vie. Dans les pages, je trouve des histoires de personnages qui, comme moi, portent des fardeaux, des cicatrices, mais qui parviennent à se relever. Ces récits m'inspirent, m'offrent des échos de mes propres luttes, mais aussi des espoirs de rédemption. Parfois, je m'assieds sur le tapis, Miel à mes côtés, et je plonge dans des univers où la douleur est transformée en force, où les héros se battent et triomphent des ténèbres qui les entourent. Alors que je tourne les pages, je m'imagine devenir l'héroïne de mon propre récit, combattant mes démons intérieurs, affrontant le passé qui me hante. Mais alors que je m'immerge dans ces histoires, je sens le poids de ma réalité m'engloutir à nouveau. Je me redresse, un frisson d'angoisse me traverse. Peut-être qu'un jour, je trouverai le courage d'explorer l'origine de ces marques, d'affronter ce mystère qui me définit. Mais pour l'instant, elles restent là, inscrites dans ma chair comme des témoins silencieux d'une lutte intérieure. Dans cette chambre plongée dans l'obscurité, je suis seule avec mes pensées, perdue dans un océan de questions qui me hantent, entourée par la chaleur de Miel et le murmure des mots sur les pages qui, elles aussi, me racontent des histoires de courage et de résilience.
Je regarde à nouveau le miroir, cherchant une once de réconfort dans mon propre reflet. Chaque cicatrice est une page de mon histoire, mais je n'en ai pas écrit le chapitre. Que faire avec ces souvenirs égarés, cette quête d'identité à la recherche d'une vérité que je ne peux pas nommer ? La nuit s'étire autour de moi, comme un manteau pesant, et je me sens piégée dans ce labyrinthe de pensées. Peut-être qu'un jour, j'aurai le courage d'explorer ces marques, de faire face à ce qui a laissé des traces sur mon corps et mon esprit. Mais pour l'instant, je me blottis contre Miel, en quête d'un peu de chaleur, d'un peu de paix, alors que l'obscurité me rappelle que le voyage vers la lumière est encore à faire.

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NightBound
RomanceDans les ruelles sombres de Londres, où la violence et les secrets s'entrelacent, une jeune femme porte en elle des cicatrices invisibles, témoins d'un passé tumultueux. En lutte pour sa survie, elle croise le chemin d'un homme tourmenté, hanté par...